La Fondation Wilmotte a révélé ce 23 juin 2020, les lauréats du Prix W 2020, récompensés pour leur projet de greffe contemporaine sur le château de la Tour d'Aigues. Sur les 139 projets candidats, le jury a retenu trois projets ex-aequo et neuf mentions.
"La base d'une greffe, c'est cela : des racines." En apercevant ce château au loin, éclairé par la lumière si particulière d'un coucher de soleil en Provence, Jean-Michel Wilmotte s'est arrêté. Ses façades extraordinaires, parmi les seules rescapées des divers incendies et turpitudes de sa vie, sa tour en son centre, ses caves restaurées... en voyant les restes de "cette folie" de la Renaissance, construite sur les fondations d'un édifice médiéval et dont les plans d'origine auraient inspiré les plus grands châteaux d'Île-de-France, comme Le Louvre, Ecouen ou encore Anet, la décision est prise. La Tour d'Aigues sera le prochain défi proposé aux candidats de la neuvième édition du Prix W, organisée par la Fondation Wilmotte.
139 dossiers, 900 inscrits (26 ans d'âge moyen), 27 nationalités représentées
139 dossiers ont été présentés, un record pour cette édition si particulière, avec une prolongation du délai de rendu et le report de l'exposition à l'année prochaine, le confinement et l'annulation de la Biennale de Venise - pandémie oblige - étant passés par là.
Ce 23 juin le jury, présidé par le maire de la Tour d'Aigues et dont Batiactu est membre depuis plusieurs éditions, a désigné trois projets ex-aequo. Une première ! Chacun montre une facette pertinente de la greffe contemporaine et une variété graphique. Surtout, cette diversité de réponses architecturales démontrent, s'il le fallait, la richesse des intentions architecturales.
Proposer une greffe contemporaine, c'est permettre la revitalisation d'un lieu, mais surtout, réfléchir à son histoire, son implantation : ces fameuses racines qu'il convient de ne pas dénaturer, mais de sublimer. Donner une seconde vie, dans le respect de l'émotion première ressentie, rappelle Jean-Michel Wilmotte. Finalement, c'est se poser la question de savoir quelle mémoire voulons-nous garder de notre passé ?
Un coup de pouce pour les jeunes et un plaidoyer pour la greffe contemporaine
La Fondation Wilmotte s'est donné pour but, non seulement de promouvoir de jeunes architectes en devenir ou tout juste diplômés mais, surtout, de mettre en avant les vertus de la greffe contemporaine. Une discipline malheureusement peu étudiée et enseignée dans les écoles d'architecture : c'est pourtant l'un des nombreux défis auxquels peuvent se confronter les architectes dans leur carrière et dont les conséquences sont irrémédiables... Comment éviter ces "catastrophes" tant patrimoniales qu'architecturales, que sont ces "attentats" au bâti, par manque de culture ou de recul, ces "fausses greffes" qui ne sont qu'ajout d'un geste personnel, sans réflexion globale, voire ces démolitions qui font perdre à jamais un patrimoine essentiel ? La greffe a sauvé nombre de bâtiments merveilleux, rappelle encore Jean-Michel Wilmotte.
"Vins et Gastronomie" au programme
Le programme du Prix W 2020, invitait ainsi les candidats - étudiants ou jeunes diplômés de l'Europe, la Suisse et la Russie - à "redonner vie" au Château de la Tour d'Aigues par la greffe architecturale : les architectes devaient le repenser autour de la thématique "Vins et Gastronomie" pour le faire entrer pleinement dans le XXIe siècle. Il fallait ainsi "transformer le château de la Tour d'Aigues en lieu de rencontres et d'échanges", en un "espace de transmission des savoir-faire, d'un art de vivre" ; le tout, en révélant "la dimension conviviale et festive de la gastronomie" sans oublier, bien sûr, les dimensions "responsable" et "innovation." "Cette enceinte revisitée accompagnera l'émergence de nouveaux usages et des nouvelles tendances en matière de goût, d'esthétique et de culture des saveurs."
Pierre, verre et espaces
Les trois lauréats, deux projets français et un espagnol, ont ainsi chacun à leur manière, proposé une ligne directrice sans jamais dénaturer le lieu : l'un, en rappelant sa minéralité ; l'autre, en se jouant des pleins et des vides, afin de le faire ressortir en majesté ; et le dernier, en ouvrant ses portes et en l'ancrant ainsi pleinement au cœur du village. Des premières lignes de réflexion qui permettent ainsi à la Tour d'Aigues d'envisager un nouvel élan !
Découvrez les projets lauréats en pages suivantes.
- Alvaro Olivares (26 ans) & Esther Sanchis (25 ans), Escuela Tecnica Superior de Arquitectura de Valencia, Espagne, pour le projet "Horizon"
- Julien Picard (24 ans) & Julien Desbat (23 ans), École Nationale Supérieure d'Architecture de Nantes, France, pour le projet "Grammaire d'une nouvelle Cité"
- Lambert Gabillet (27 ans), ENSA Montpellier, France, pour le projet "Cultures des Sols, Sols des Cultures"
- Yorgos Apostolopoulos (26 ans), Aristotle University of Thessaloniki, Greece & Francesco Rosati (26 ans), Accademia di architettura di Mendrisio, Italy pour le projet "Agora"
- Elisabeth Sala (25 ans) & Charlotte Batifoulier (27 ans), Ecole Nationale Supérieure d'architecture de Clermont-Ferrand, France pour le projet "Aigues Wide Shut"
- Amélie Besvel (22 ans) & Florian Bechet (27 ans), Ecole Nationale supérieure d'architecture Paris-La Villette, France pour le projet "Au(x) Tour(s) d'Aigues"
- Amélie Lhomet (22 ans), ENSAP Bordeaux, France pour le projet "Contretemps"
- Céline Veaute (23 ans) & Élise Lartigue (22 ans), ENSAPBX, France pour le projet "Éclosion"
- Jules Villegas (29 ans) & Gabrielle Chapuis (25 ans), ENSAG, France pour le projet "Fondation Turre de Aquis"
- Clémentine Huck (24 ans) & Maël Barbe (25 ans), École Nationale Supérieure d'Architecture de Versailles, France pour le projet "Le château de la Tour d'Aigues : Saveurs & Savoirs"
- Anastasya Cornu (22 ans) & Joseph Reymond (29 ans), ENSAP Bordeaux, France pour le projet "Lever de Rideau"
- Pier Nicolò Pantani (30 ans), Istituto Universitario di Architettura Venezia, Italy pour le projet "Orangerie Verticale"
Jean-François LOVISOLO, Maire de la Tour d'Aigues, Président du Jury
Olivier BROCHET, Architecte, Membre de l'Académie d'Architecture, Bordeaux
Andrea BRUNO, Architecte, Turin, Italie
Milena CHESSA, Journaliste, Groupe Le Moniteur, Paris
Anne DEMIANS, Architecte, Paris
Julien ROUSSEAU, Architecte, Paris
Pierre-Antoine GATIER, Architecte en Chef des Monuments Historiques, Académicien, Paris
Armel RACT-MADOUX, Directeur du développement international de SETEC, Paris
Pauline POLGAR, Directrice de la rédaction, Batiactu, Paris