FISCALITÉ. Le Président de la République vient d'exprimer des doutes quant à l'application dès 2019 du prélèvement à la source. Cette mesure est notamment décriée par les organisations patronales des TPE-PME qui y voient l'équivalent d'un nouvel impôt.
Le Gouvernement envisagerait-il de faire demi-tour ? Alors que l'application au 1er janvier 2019 du prélèvement à la source (PAS) semblait ne faire aucun doute, Emmanuel Macron semblerait tergiverser à ce sujet et envisage un décalage de son entrée en vigueur. Lors d'un déplacement en Finlande, questionné sur le sujet, il a répondu qu'il avait "plutôt l'intention de conduire cette réforme à son terme", nous informe Le Figaro. Tout en précisant : "J'ai demandé au ministre compétent de répondre à toutes les questions qui se posent encore avant de donner ma directive finale. [...] J'ai besoin d'une série de réponses très précises et d'être sûr de ce que nos concitoyens vivront le jour où on le mettra en place si on le met en place."
"Nous ferons le point sur la préparation de cette réforme"
Des propos récents du Premier ministre avaient allumé la mèche : "Il faut faire les réformes quand on les croit bonnes pour le pays. Mais je suis attentif : nous avons décidé de reporter en 2017 d'un an cette réforme [du prélèvement à la source] parce que nous voulions être sûrs qu'elle serait mise en œuvre dans de bonnes conditions. Nous ferons le point sur la préparation de cette réforme dans les prochaines semaines", répondait-il ainsi au Journal du dimanche.
Ces propos tranchent nettement avec la détermination habituelle du Gouvernement à ce sujet. Même si Gérald Darmanin, sur Europe 1, a ensuite affirmé que la réforme se passerait comme prévu. La décision sera toutefois prise, on le voit, au niveau de l'Élysée.
Le Président tranchera "courant septembre"
Ces hésitations semblent redonner espoir aux artisans et indépendants, qui voient dans cette réforme une forme d'impôt supplémentaire et un risque social pour l'entreprise. "Le Président de la République nous a dit, en juillet dernier, qu'il trancherait la question courant septembre", explique Alain Griset, président de l'Union des entreprises de proximité (U2P), à Batiactu - le Canard enchaîné du 29 août 2018, pour sa part, donne la date du 15 septembre. "Nous espérons évidemment que le Gouvernement va revoir sa copie, nous continuerons en tout cas à nous battre, car ce dispositif est très clairement pénalisant pour nos entreprises. Nous voulons sortir par le haut de ce désaccord que nous avons avec les pouvoirs publics." Courant août, le Gouvernement avait envisagé pour les entreprises de moins de 20 salariés de faire fonctionner le dispositif via les titres emplois services (Tese) : une solution qui ne convainc pas non plus le représentant des artisans et indépendants. Mais prouve que les décideurs sont conscients du mécontentement et cherchent des solutions conciliantes.
Pourquoi ces hésitations du Président ? D'après un article des Echos du 30 août, Emmanuel Macron craindrait qu'un 'bug' informatique se produise, et plus encore que les salariés croient que leur pouvoir d'achat a baissé en 2019 en voyant leur salaire diminuer sur leur fiche de paie. Le quotidien fait également le lien avec la baisse des APL prévue par ailleurs : "A partir du printemps 2019, l'exécutif a prévu que les APL soient versées en fonction des revenus contemporains des allocataires, et non pas en fonction de ceux d'il y a deux ans. [...] Mais pour cela, il faut les données fiscales les plus récentes fournies par le prélèvement à la source." Une difficulté technique de plus à résoudre rapidement avant une éventuelle entrée en vigueur dans quatre mois, en même temps que l'évolution des APL...
L'Union des entreprises de proximité, reçue par le Premier ministre et les ministres du Travail et de la Santé ce jeudi 30 août 2018, précise avoir salué "la décision du Président de la République d'examiner au cours des 15 prochains jours l'opportunité de mettre en œuvre le prélèvement de l'impôt à la source au 1er janvier 2019". Les représentants de l'U2P "ont alerté sur le fait que les chefs d'entreprises de proximité, artisans, commerçants et professionnels libéraux, ne souhaitent pas collecter l'impôt de leurs salariés". Une pratique qui risquerait de dégrader "les relations au sein de l'entreprise" tout en amenant "une surcharge de travail inacceptable".