Phénomène moins visible que les vols de voiture ou les braquages de bijouterie, le pillage quotidien des engins de BTP sur les chantiers en France oblige les entreprises du secteur à prendre des mesures pour tenter d'enrayer cette forme de criminalité.

Mardi 4 novembre, 12h30: un compresseur est volé sur un chantier à Laventie (Pas-de-Calais). Muni d'un système de détection, l'engin est repéré quatre heures plus tard, à 15 km, dans un atelier. Les policiers récupèrent le compresseur intact et un chariot-élévateur, également volé.
Plusieurs fois par jour en France, le scénario se répète mais se termine rarement aussi bien car la plupart des engins de BTP (bâtiments et travaux publics) volés ne sont pas équipés de systèmes de détection.
Des engins sont retrouvés endommagés après avoir été utilisés pour arracher un distributeur automatique de billets. D'autres sont transformés en pièces détachées.
D'autres enfin reprennent du service sur un autre chantier à quelques centaines de km de là ou partent, par la route ou par bateau, vers des chantiers à des milliers de km de la France.

Selon une enquête de l'AFP, le vol d'engins (compresseurs, nettoyeurs à haute pression, mini-pelle, chariot-élévateur, tractopelle, ...), dont les prix vont de 30.000 à plus d'un million d'euros, connaît une augmentation sensible, même s'il reste difficile à quantifier. A la direction centrale de la police judiciaire, on fait remarquer que la plupart de ces engins ne sont pas immatriculés, ce qui rend difficile leur contrôle.

Pour Francis Gilberg, secrétaire général du syndicat des distributeurs loueurs réparateurs (LDR, 70 % du marché de la location BTP), le vol de "matériel de plus en plus lourd et de plus en plus cher" est devenu "une vraie économie parallèle" au profit de réseaux spécialisés.
Loxam, premier loueur d'engins BTP en France, a ainsi vu disparaître en 2002, selon M. Gilberg, 2.000 de ses engins sur un parc total de 25.000. Les loueurs d'engins BPT, possesseurs de 60 % de ce type de matériel, sont évidemment les premières victimes du vol, qui représente 3 % de leur chiffre d'affaires.

Michel Huard, responsable des affaires de vol de matériel à la Fédération nationale des travaux publics (FNTP, 9.000 entreprises adhérentes), a créé en janvier 2001 un fichier en ligne d'engins volés, rempli par les adhérents, qui compte à ce jour quelque 1.150 références d'engins volés. Mais ce chiffre, selon M. Huard, est inférieur à la réalité puisque de nombreux engins ne sont pas déclarés volés.
En quatre ans (2000-2003), la Cellule interministérielle de lutte contre la délinquance itinérante (Cildi) a dénombré près de 2.600 engins volés, dont une partie a quitté la France, par la route, vers les pays de l'ex-Yougoslavie (Bosnie, Kosovo) ou par bateaux vers le Maghreb et l'Afrique.

En 2000, la gendarmerie a démantelé un réseau de vols d'engins BTP, installé à Menton, près de l'Italie, d'où les engins maquillés et avec des faux papiers de propriété, partaient pour être embarqués dans des conteneurs à Marseille ou à Toulon vers l'Afrique.
Selon Hugues Le Faucheur, de la Société mutuelle d'assurances du BTP (SMABTP, leader du secteur), le manque de protection des engins sur les chantiers, les complicités internes et le besoin de matériel BTP bon marché dans les pays en reconstruction (comme les Balkans) constituent un "environnement favorable aux vols". Les systèmes de blocage des engins et ceux de détection à distance des engins volés sont, selon lui, les meilleures parades.

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