Après l'attaque de Bruxelles de taxer le photovoltaïque chinois d'environ 47%, la Chine contre-attaque et met en garde l'Union européenne contre le protectionnisme. "De telles mesures pourraient se retourner contre les intérêts économiques de l'Europe" et engendré une "guerre commerciale", a même menacé Chine Nouvelle, l'agence chinoise officielle. Détails.
L'UE l'avait annoncé, elle l'a fait. Mercredi 8 mai, la Commission a décidé de prendre de lourdes sanctions antidumping sur les panneaux solaires en provenance de Chine. Ainsi, une série de taxes douanières, d'une moyenne de 47%, sera appliquée sur les achats de matériels solaires chinois. Elles sont destinées à lutter contre des pratiques de distorsion de la concurrence dont bénéficieraient les producteurs asiatiques, soutenus par des subventions cachées illégitimes leur permettant de pratiquer un dumping des prix.
Vers une politique européenne plus "musclée"
Si ces taxes sont provisoires - en attendant la décision du 6 juin prochain qui mettra un point final à l'enquête lancée il y a un an contre les producteurs chinois - elles ont le mérite de piquer là où ça fait mal, l'industrie photovoltaïque étant l'un des fleurons technologique de l'Empire du Milieu. Frapper fort sur un secteur stratégique pour l'Europe, tel est le défi qu'a donc lancé le commissaire au Commerce, Karel De Gucht, qui est apparemment partisan d'une approche musclée avec la Chine, indique le quotidien Les Echos, dans son édition de vendredi 10 mai. Et un avocat de Bruxelles de souligner dans les colonnes du journal : "Il a compris que de simples discussions ne menaient à rien. Désormais, il préfère lancer des enquêtes ou imposer des taxes provisoires pour imposer un rapport de force".
La Chine contre-attaque
Dès le jeudi 9 mai, Pékin a réagi et appelé l'UE à "éviter de s'engager dans une politique protectionniste", selon les mots du porte-parole du ministère des Affaires étrangères, cité par l'AFP. Si ce dernier parle de "coopération constructive", de "dialogue" ou encore de "coopération gagnant-gagnant", en revanche, la colère est plus perceptible du côté "officiel". En effet, l'agence Chine Nouvelle a employé un ton plus virulent : "L'idée que la Chine ne va rien faire et accepter les taxes est irréaliste. La Chine ripostera vraisemblablement à moins que les deux parties ne se mettent à table et examinent le meilleur moyen d'éviter une guerre commerciale". Le ton est donné…
En Europe, les réactions sont mitigées. Paris soutient cette décision, tandis que Berlin émet des réserves. Ainsi, Delphine Batho, ministre de l'Ecologie, parle d'une "procédure qui [me] paraît parfaitement légitime et normale", alors que son homologue allemand, Peter Altmaier, explique qu'"il faut séparer la procédure judiciaire qui aboutira, dans un sens ou dans l'autre […], et la deuxième chose qui est que nous cherchons évidemment une solution politique avec la Chine". Car, rappelons-le, la Chine est un marché stratégique pour l'Allemagne.
Hausses de prix en vue ?
La filière française du solaire estime, pour sa part, que la procédure de l'UE est une bonne chose, elle qui a perdu 15.000 emplois en deux ans, notamment à cause de la concurrence chinoise. "Mais attention, prévient Thierry Mueth, président d'Enerplan, dans les colonnes des Echos, cette taxation ne sera pas suffisante (…) La filière a besoin d'appels d'offres réguliers afin que les volumes soient suffisants pour inciter aux investissements industriels et permettre de les amortir". Et de parler d'une "mesure nécessaire", mais pas "suffisante". A ceux qui s'opposent à ces taxes à venir - regroupés au sein de l'Afase (Alliance pour l'énergie solaire abordable) qui voient là une augmentation des prix qui mettrait fin à certains projets photovoltaïques et provoquerait des destructions d'emplois - Thierry Mueth répond : "On peut toujours souhaiter bénéficier du produit le moins cher du monde… Mais certaines choses ont un prix (…) Il y a toujours un juste prix à payer".