Alors qu’il faudra des mois aux experts pour connaître les raisons de l’effondrement de la voûte du terminal 2 E, la justice – aidée par un corbeau particulièrement bien informé – se demande si Aéroports de Paris a joué ou non un rôle dans l'obtention du chantier de l'Opéra de Pékin par Paul Andreu.

«Andreu : cabale ou vérité ?»... s’interroge France Soir. Dans son édition du lundi, le quotidien populaire n’hésite pas à consacrer sa Une à l’enquête sur l’opéra de Pékin où l’architecte Paul Andreu est cité, reléguant le nouvel attentat d’Al-Qaida en page 11. Pour une fois que la bâtiment ou l'architecture fait la une des jounaux nationaux, c'est malheureusement dans la rubrique des faits divers.
A l'origine de ce "coup" : un document anonyme de près de 200 pages envoyé au pôle financier du tribunal de Paris, aux syndicats et à la presse.

Il faut reconnaître que les documents remis par cette «gorge profonde anti-Andreu» sont particulièrement précis. On y trouve pêle-mêle des courriers à en-tête, des extraits de la comptabilité, des notes manuscrites, des notes d’honoraires... "Un tissu de mensonge" commentera une proche de Paul Andreu qui a déclaré connaître l’existence de ce dossier. Dans l’une de ces dernières déclarations, l’architecte n’hésitera pas à faire la comparaison dans Le Monde avec "l’époque de Vichy" "ce sont toujours les délateurs qui ont la pas sur les honnêtes gens".

Le délateur en question semble en vouloir particulièrement à Andreu à qui il reproche, entre autres, de percevoir des honoraires en tant qu’architecte libéral tout en étant salarié d’ADP (directeur architecte).
Plus grave, le nom de Paul Andreu est cité dans une enquête judiciaire ouverte portant sur des malversations présumées qui pourraient être liées à l'attribution du chantier de l'Opéra de Pékin.

Ouverte le 18 juillet 2003 au vu d'un rapport de la Cour des comptes de 2003 sur la gestion d'ADP et sur la base d'une lettre anonyme, l'enquête vise des faits susceptibles de relever de "l'abus de confiance" au détriment d'ADP, de la "prise illégale d'intérêts", et de la "corruption par octroi d'avantages de personnes relevant d'un Etat étranger", selon une source judiciaire.
Cette dernière qualification indique que la justice cherche à déterminer si des pots-de-vin ont été versés à l'étranger.
"Des centaines de personnes ont donné leur avis. Ce n'est pas la décision d'une ou deux personnes, la corruption était donc simplement impossible", affirme Wang Zhengming, le porte-parole chinois du projet cité par l’AFP.

L'enquête a été confiée à la juge d'instruction du pôle financier du TGI de Paris, Anne-Elisabeth Honorat, qui a désigné la Brigade de répression de la délinquance économique (BRDE) pour mener les investigations. A ce stade, aucune mise en examen n'a été prononcée.

La juge devra déterminer si ADP a joué ou non un rôle dans l'obtention du chantier de l'Opéra de Pékin par M. Andreu, longtemps architecte d'ADP, et si oui dans quelles conditions.
En outre, cette information judiciaire devra établir si l'architecte a perçu ou non des honoraires injustifiés dans ce cadre de la part d'ADP.

La double casquette de Paul Andreu est également au centre de cette partie de l’enquête. Courant 2003, un mystérieux corbeau a adressé à la justice parisienne une lettre dénonçant le double rôle qu'aurait eu Paul Andreu en tant qu'architecte d'ADP et en tant qu'architecte privé.
La lettre indique qu'ADP - pour qui M. Andreu a travaillé jusqu'en 2002 - aurait signé en 1998 avec une société anglaise, Sodefinance Ltd, une convention en vertu de laquelle cette société assurerait la promotion de ses projets en Chine, en échange du versement de commissions en cas de réussite.

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