RÉNOVATION. Le ministre de la Transition écologique et solidaire, François de Rugy, vient de préciser devant les sénateurs que des mesures d'accompagnement, mais aussi de "contrainte", seront mises en œuvre pour rénover l'ensemble des passoires énergétiques d'ici 2025.

Le président de la République s'était engagé, durant la campagne de 2017, à rénover l'ensemble des passoires énergétiques dans les dix ans. Et pour atteindre cet objectif, les pouvoirs publics mettront en place des mesures d'accompagnement, mais aussi de "contrainte", comme l'a assuré François de Rugy, ministre de la Transition écologique et solidaire, ce 2 octobre 2018 au Sénat. "L'objectif d'éradiquer les passoires thermiques est difficile à mettre en œuvre", a-t-il reconnu. "Mais nous mettrons des moyens d'accompagnement, mais aussi de contrainte. On ne peut pas être uniquement dans l'incitation, car les enjeux sont bien sûr écologiques, mais surtout sociaux. Les locataires payent des factures de chauffage qui leur sont imposées. C'est un gaspillage d'énergie et un trou dans leur budget mensuel. Et la situation est comparable pour les propriétaires occupants." Le ministre estime donc, comme il l'avait dit le jour de la présentation de la campagne Faire, que la stratégie à adopter consiste à "mobiliser l'investissement privé et l'amortir dans la durée grâce aux gains de consommation d'énergie".

 

Des propos qui ouvrent à nouveau la porte à l'idée d'un bonus malus sur la qualité énergétique des logements, scénario qui semblent décidément se dessiner pour l'avenir - dans un contexte où les faibles prix de l'énergie ne constituent toujours pas un élément incitant aux travaux.

 


 

Une annonce dont se félicite le Réseau pour la transition énergétique (Cler), contacté par Batiactu. "Nous avons toujours soutenu cette idée poussée depuis le Grenelle de l'environnement", nous explique Jean-Baptiste Lebrun, directeur de l'association. "Il y a énormément de dispositif de bonus-malus que l'on peut imaginer, mais nous sommes attachés pour notre part à l'amélioration du décret 'décence' - afin que l'efficacité énergétique soit prise en compte -, ou encore à une obligation de travaux au moment des mutations. Quoi qu'il en soit, c'est une bonne chose de voir que l'idée fait son chemin au sein du Gouvernement. Il est légitime qu'en face des dispositifs de soutien, qui constituent en quelque sorte la 'carotte', il y ait le 'bâton'."

 

Une solution à envisager en "dernier recours", pour l'association Coénove
L'association Coénove, qui réunit des acteurs de la filière gaz, également contactée, estime de son côté que "la déclaration du ministre nous renvoie directement à la problématique du passage à l'acte". "Même si la conscience citoyenne augmente, que la recherche de confort se fait de plus en plus prégnante, des freins viennent toujours retarder le moment décisif de se lancer dans des travaux. Aller vers une obligation de travaux dans ce contexte peut s'entendre mais si et seulement si elle est proposée dans un temps long et comme dernier recours. Ainsi, une trajectoire sur 10 ans visant à soutenir financièrement les actes de rénovation comme c'est actuellement le cas puis seulement les accompagner sans soutien financier pour enfin arriver à une obligation, voire à des sanctions mérite d'être regardée de près - tout en sachant qu'il faudra de facto prévoir un traitement différencié entre les exigences qui pourraient être imposées aux logements individuels et aux logements collectifs dans la mesure où l'acte d'engagement ne repose pas sur un seul propriétaire."

 

Une idée évoquée... il y a un an déjà

 

Pour rappel, l'idée avait été évoquée une première fois il y a tout juste un an, par Nicolas Hulot. Il était alors envisagé d'introduire une obligation de travaux au moment de la vente d'un bien ou une augmentation des droits de mutation si ceux-ci n'étaient pas réalisés. En mai 2018, l'ex-ministre de la Transition écologique et solidaire revenait sur le sujet, évoquant cette fois-ci un bonus-malus impactant le montant de la taxe foncière.

 

Ce type d'annonce a systématiquement entraîné la colère des professionnels du bâtiment et de l'immobilier. Pour la Fédération française du bâtiment, ce dispositif "pénaliserait avant tout les territoires déjà en difficulté, où le coût d'une rénovation énergétique équivaut à une part très importante du prix d'un logement". Et la Fnaim dénonçait quant à elle rien moins qu'un hold-up : "Nous condamnons sans retenue les systèmes de malus qui constituent une double peine : en copropriété, le propriétaire n'est pas maître de la décision d'effectuer des travaux énergétique qui dépend d'une décision d'assemblée générale. On ne voit pas comment il pourrait être sanctionné sur sa propre taxe foncière des conséquences d'une décision qui ne lui appartient pas totalement."

 

La balle est à présent dans le camp du Gouvernement qui devra tenter de trouver un système acceptable pour le maximum d'acteurs.

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