Pour Michel Couaillier, Premier président de la Cour d'Appel de Besançon qui vient de s'installer dans le nouveau palais de justice redessiné par Henri Gaudin, la justice n'est pas insensible au lieu.

En quoi l'architecture peut jouer un rôle dans la justice ?

La justice n'est pas insensible au lieu. Il faut bien s'attacher au fait qu'on siège dans un " Palais " de justice, expression qui me semble plus adaptée que celle de " Cité judiciaire " car on parle ici de la manifestation du troisième pouvoir de l'Etat. Il faut donc lui donner une relative solennité.
Mais, le but de la Justice étant l'harmonie sociale, le palais de justice doit être un lieu de pacification, de médiation et d'apaisement. C'est ce que souhaitait le ministère de la Justice en élaborant, en 1991, les schémas directeurs de réorganisation et de modernisation du patrimoine judiciaire de 26 départements jugés prioritaires. Rigueur, pacification, transparence.

Ce but a-t-il été atteint ?

De 1996 à 2000, 24 concours d'architectures ont été jugés. Près d'une vingtaine de bâtiments ont été livrés. Il est intéressant de voir comment ces mots de transparence, rigueur et pacification ont diversement inspiré les architectes. Certains ont joué une transparence exacerbée, où l'on pouvait voir ce qui se passait dans les cabinets des juges d'instruction à travers les vitres. Ce qui n'a pas plu à tout le monde. D'autres ont privilégié une sévérité si dramatique, que les justiciables se sentaient comme condamnés à l'avance. D'autres ont su concilier tous les aspects du programme.

Comment vivez-vous le palais de Justice de Besançon ?

Ce projet fait plus que me satisfaire, il m'émeut. Le tribunal pour enfants, sous les combles et avec ses charpentes, donne presque l'impression d'être chez soi. Les salles d'audiences reflètent l'apaisement. La solennité ne manque pas pour autant, mais on pourrait comparer son rendu à l'équilibre existant entre le fléau rigide de la balance et la sensibilité de ses plateaux. Je n'ai entendu jusqu'à présent qu'une remarque négative, à savoir que "cela faisait luxueux". Or, parmi les palais de justice récemment livrés, c'est une des réalisations les moins coûteuses : 20 millions d'euros pour les études et les travaux.

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