ÉTUDE. L'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie - Ademe - publie le second volet d'une étude sur la gouvernance des "nouveaux modèles économiques urbains", résultante des transformations numériques que connaît notre société. Le but : fournir aux collectivités territoriales des outils d'adaptation. Détails.

Qui gouvernera la cité de demain ? C'est à cette question, pour le moins vaste et probablement encore floue, que l'Ademe tente de répondre, en finançant et en publiant le second volet d'une étude portant sur la gouvernance des "nouveaux modèles économiques urbains", autrement dit la nouvelle économie qui s'installe dans les villes suite aux nombreuses transformations numériques que connaît notre société. La première partie de l'étude s'était focalisée sur les changements observables parmi les opérateurs urbains, mais l'objet de ce second volet ambitionne de préciser les défis auxquels doivent faire face les collectivités territoriales, et les moyens d'adaptation dont elles disposent. La Caisse des dépôts et consignations et l'Institut pour la ville durable ont apporté leur soutien à ces travaux.

 

L'étude a été réalisée par trois cabinets de conseil : Espelia, Ibicity et Partie Prenante. Partant du constat que la technologie numérique est en train de changer en profondeur le fonctionnement de la collectivité et les habitudes des citoyens et usagers, ces spécialistes ont cherché à analyser les mutations induites par l'arrivée de nouveaux acteurs économiques et de services inédits dans un environnement urbain toujours plus dense et connecté. Les différents secteurs d'activité - mobilités, immobilier, espaces publics, énergie, eau, déchets... -, ainsi que les questions de gouvernance et d'évolution des usages, ont été intégrés à la réflexion, pour tenter notamment de cerner les financements des services urbains de demain.

 

Multiplication des services... et de l'interdépendance entre services

 

Alors concrètement, que ressort-il de cette étude à destination des collectivités et des opérateurs urbains ? Que ce sont justement eux qui se retrouvent "en première ligne" face aux nouveaux acteurs économiques, tels que les jeunes pousses, les entreprises de l'économie sociale ou solidaire, ou les plateformes numériques comme Google, Uber ou Airbnb. Certes les offres de services se multiplient, mais l'interdépendance ne cesse de croître entre ces différents acteurs urbains : "Chaque opérateur a besoin des autres pour fonctionner et est à la fois concurrent et complémentaire", comme le relève l'étude. Face à ces nouveaux acteurs, les collectivités territoriales, bien qu'affaiblies sur le plan de l'action publique, constituent pourtant les premiers interlocuteurs. D'autant que les opérateurs de la nouvelle économie expriment aujourd'hui une volonté de dialogue avec les structures publiques locales.

 

 

Le problème étant que les collectivités se retrouvent démunies face à cette situation inédite. "Leurs modes d'intervention traditionnels (notamment via la cadre de la commande publique) ne fonctionnent plus", affirment les cabinets de conseil. Cependant, plusieurs collectivités tentent de réguler certains services : Paris s'est par exemple emparée de la question des locations Airbnb et des vélos en libre-service. "De nouveaux cadres de négociation se mettent en place", souligne l'étude. "Mais ils restent bâtis sur une logique défensive, ciblés sur les services les plus problématiques quant à leurs externalités négatives produites sur le territoire. En outre, ces réponses se font souvent au coup par coup, sans s'inscrire dans une stratégie plus globale." L'enjeu serait alors de proposer des outils de gouvernance, mariant régulation et impulsion.

 

Identifier les opérateurs et actionner de nouveaux leviers

 

Pour les cabinets de conseil, une première solution serait que les collectivités soient "en mesure de cartographier et de qualifier les opérateurs en présence", afin de mieux s'orienter dans le maquis de la nouvelle économie. Un tel diagnostic permettrait de mieux cibler les enjeux selon la taille de la collectivité : une métropole attractive et une ville moyenne de province ne sont évidemment pas confrontées aux mêmes problématiques. De là peuvent découler de nouvelles stratégies de gouvernance, plus ou moins volontaristes. Enfin, les acteurs publics locaux disposent de leviers d'action, autre que la commande publique : il ne faut pas négliger le rôle de la tarification, des données ou encore du domaine public.

 

En conclusion de l'étude, les auteurs annoncent la publication prochaine d'un troisième volet consacré cette fois aux outils d'adaptation et de régulation/impulsion à proprement parler. Réalisé en partenariat avec des collectivités territoriales, ce nouvel opus tentera d'intégrer ces outils à différents contextes territoriaux. Au bout du compte, il s'agira de savoir s'il est possible de créer une gouvernance propre à chaque ville, et s'il existe des stratégies permettant à la fois de peser sur les opérateurs déjà présents, tout en cherchant à en attirer d'autres. Tout l'enjeu sera aussi de trouver les nouveaux modèles économiques pour rendre viables ces offres de services urbains, sans que cela n'engendre une augmentation des budgets publics. La route de la réflexion est donc encore longue.

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