DÉBAT. Voici un sujet qui devrait faire couler beaucoup d'encre dans les mois à venir : avec quelle technique, et selon quel parti pris architectural, faut-il reconstruire la toiture et la flèche de la cathédrale Notre-Dame de Paris ? Jean-Michel Wilmotte et Jean Nouvel ont d'ores et déjà pris position.

Pour l'architecte Jean-Michel Wilmotte, il ne fait aucun doute que la cathédrale Notre-Dame de Paris peut être reconstruite dans le délai de cinq ans évoqué par Emmanuel Macron, à condition que l'on utilise des techniques et des matériaux contemporains. Il s'exprimait à la radio France inter. "Nous sommes aujourd'hui en mesure de construire un stade de 50.000 places en deux ans et demie, donc ce délai est atteignable", a-t-il notamment assuré.


"Nous pouvons installer une structure pérenne en un temps record"

 

Sur la question des matériaux à employer, le starchitecte ne milite pas pour le béton en toiture, mais plutôt pour une solution en acier, plus légère ; rappelant que la charpente sera de toute façon cachée par la voûte et la toiture. "Le métal est deux fois moins lourd que le bois ; les pièces peuvent être préparée en atelier et montées sur place, dans le cadre d'un chantier approvisionné par la Seine. La couverture, elle, peut être en titane qui est un matériau léger. Nous pouvons installer une structure pérenne en un temps record", a-t-il énoncé. "Dans un premier temps, les experts feront leur analyse, viendra ensuite le temps de la décision pour la solution la plus pertinente."

 

Ancienne flèche de Notre-Dame de Paris
Ancienne flèche de Notre-Dame de Paris © Hilader/ Wikicommons

 

"Je pense qu'il faut reconstruire à l'identique", Roland Castro
"Le délai de cinq ans fixé par Emmanuel Macron est possible à atteindre, s'il n'y a pas de contraintes administratives." C'est l'architecte Roland Castro qui l'assure au micro de BFM-TV. Celui qui a été missionné par le président de la République sur le Grand Paris, assure que les compagnons du devoir "s'arracheraient" pour recréer la charpente. "C'est un moment pour développer l'apprentissage, il y a par exemple des métiers formidable autour du plomb. Refaire la charpente bois serait également un moyen d'étudier l'histoire de cette technique. L'architecture en bois est par ailleurs un sujet d'avenir pour nous." Quant à la flèche, Roland Castro reconnaît qu'il n'apprécie guère les travaux de Viollet-le-Duc. "Si un architecte trouve une solution géniale et moderne pour cette flèche, pourquoi pas ? On a bien fait cela pour la pyramide du Louvre." Il invite quoi qu'il en soit à sauvegarder le chevet de la cathédrale, et propose de faire appel à Yann Kersalé, un "formidable sculpteur de lumière".

 

Estimant que le coût du chantier de rénovation général approchera probablement le milliard d'euros, Jean-Michel Wilmotte s'est également positionné sur la future flèche de la cathédrale. "Elle peut être reconstruite avec des matériaux actuels", insiste-t-il. "J'aime l'idée de stratification dans les bâtiments du patrimoine, les époques qui se superposent. Il serait intéressant que cette flèche ait une nouvelle histoire ; pourquoi ne pas la construire en carbone ? Cela serait un très beau signal."

 

"Il ne faut pas passer à côté de cette expérience professionnelle"

 

Dans l'esprit d'un chantier-école que les pouvoirs publics souhaitent mettre en avant pour cette cathédrale, l'architecte imagine une opération suivie depuis le monde entier en direct, avec découverte des métiers. "J'imagine un chantier vivant, cela serait une expérience exceptionnelle, il ne faut pas passer à côté. Nous rendrions visibles le travail des artisans du XXIème siècle. Cela pourrait faire avancer le secteur de la restauration."

 

 

Un deuxième architecte de renom a réagi à ce qu'il s'était passé à Notre-Dame, il s'agit de Jean Nouvel, que Le Figaro a interrogé. Il n'envisage pas de modifier la flèche de Viollet-le-Duc, qui "était un geste fort et signifiant déjà à son époque". "Elle fait partie des choses intangibles de la cathédrale."

 

"Chaque siècle ou presque aura laissé son empreinte sur la cathédrale", Dominique Perrault
"La reconstruction de Notre-Dame sera un chantier délicat, et la perte irréversible de sa charpente médiévale, 'la forêt', ne doit pas nous décourager", a affirmé l'architecte Dominique Perrault dans un communiqué de presse. "Le patrimoine d'aujourd'hui est une superposition d'époques, chaque siècle ou presque aura laissé son empreinte sur la cathédrale. [...] Il faudra la reconstruire, sans dénaturer sa substance patrimoniale, et cela nous encourage à ré-envisager notre relation au patrimoine et à croire en sa capacité de résilience."

 

Plus largement, Jean Nouvel voit la restauration qui se présente comme une "course d'obstacles". "Il faut laisser le temps aux historiens et aux experts de se prononcer."

 

Le cabinet d'architecture Godart et Roussel n'a, pour sa part, pas perdu de temps et a déjà communiqué une esquisse de projet sur les réseaux sociaux :

 

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