Les acteurs du commerce de gros et du négoce bois et matériaux ont été reçus au cabinet de Ségolène Royal pour réitérer leur demande de supprimer en l'état l'article 21 quater relatif à la reprise des déchets des matériaux de construction. Ils ont également déposé un amendement en ce sens.
Le 9 avril dernier, des délégations de la CGI (commerce inter-entreprises) et de la FNBM ont été reçues par Philippe Bodenez au Cabinet de Ségolène Royal, ministre de l'Ecologie et du Développement durable. Objet de cette rencontre : rappeler le caractère "inopérant et impraticable" du dispositif créé par l'article 21 quater de la loi sur la transition énergétique qui concerne la reprise des déchets des matériaux de construction par les négoces et les entreprises du commerce de gros. Son entrée en vigueur est prévue au 1er janvier 2017.
En novembre dernier, Géraud Spire évoquait déjà cet amendement voté dans le cadre de la loi sur l'économie circulaire, qui obligerait les distributeurs professionnels à collecter les déchets de leurs clients. "Pourquoi ce serait aux distributeurs de collecter les déchets alors qu'ils ne sont pas producteurs de ces déchets ? Ce n'est pas de leur responsabilité", s'étonnait-il. Depuis, les actions de lobbying ont fait leur chemin, et la FNBM a réitéré sa colère en février dernier, en adressant un courrier à Ségolène Royal. Cette mesure vient en fait d'une directive qui indique que les collectivités doivent créer des déchetteries pour les artisans. Dans les faits, on en est loin, et du coup, les artisans ont tendance à se débarrasser de leurs déchets de façon anarchique et, lorsqu'il y a bien une déchetterie, on leur refuse l'accès.
Reprendre les déchets, c'est un métier !
Ainsi, lors de leur entretien avec le conseiller de la ministre, la CGI et la FNBM ont pu démontrer que le report de cette responsabilité non assumée des artisans, sur les grossistes, et ce sans concertation, "est incompréhensible et tout simplement voué à l'échec", nous explique Hugues Pouzin, président de la confédération du commerce de gros. Et d'évoquer des raisons structurelles d'abord : les PME du secteur n'auront pas les moyens de prendre en charge les déchets, le critère de chiffre d'affaires n'est pas pris en compte au profit d'un critère de surface.Il existe aussi des raisons économiques et foncières. En effet, combien de bennes faudra-t-il installer sur les points de vente pour assurer les collectes ? Posant alors l'épineuse problématique du foncier disponible pour le faire… Car la "zone de récupération des déchets" serait aux frais des entreprises alors même qu'aucune compensation financière n'est confirmée. Quant aux risques sanitaires, ils sont bel et bien présents. Tout comme ceux liés à la maîtrise de la gestion des déchets. "Attention, la reprise des déchets, c'est un métier !", prévient la CGI.
Echéance trop courte
De plus, "la ministre avait imaginé que les camions qui livrent les matériaux pourraient repartir avec les déchets", nous confie Hugues Pouzin. Mais c'est sans compter sur le fait qu'on ne peut pas faire cohabiter dans le même véhicule des matériaux propres et des déchets, et aussi que les tournées approvisionnent plusieurs chantiers. Enfin, l'article 21 quater ne prend pas en compte les filières existantes, qui pourraient être fragilisées si le dispositif était adopté."L'échéance de 2017 est dans tous les cas trop courte", constate le président de la CGI. D'où l'amendement déposé pour supprimer l'article tel qu'il est écrit aujourd'hui. Les professionnels se disent désormais prêts à s'impliquer aux côtés des pouvoirs publics pour trouver une "réponse efficace, raisonnée et raisonnable". Un prochain rendez-vous est prévu avec la chef du bureau Planification et gestion des déchets du ministère de l'Ecologie. Pour rappel, le projet de loi sur la Transition énergétique est reparti pour une seconde lecture à l'Assemblée nationale, avant un ultime aller-retour par les deux chambres pour une adoption définitive prévue fin mai/début juin.