RÉACTIONS. Au lendemain du sinistre qui a ravagé la toiture et la charpente de la cathédrale parisienne, la mobilisation est totale du côté des acteurs de la construction. Le président de la République, Emmanuel Macron, a donné un objectif ambitieux : reconstruire l'édifice en cinq ans. Tour d'horizon des propositions formulées par les professionnels et les entreprises.
"Nous sommes ce peuple de bâtisseurs. Alors, oui, nous rebâtirons la cathédrale de Notre-Dame, plus belle encore, et je veux que cela soit achevé d'ici cinq années. Nous le pouvons." C'est le président de la République, Emmanuel Macron, qui s'est exprimé ainsi lors d'une adresse aux Français, le 16 avril 2019, au lendemain du terrible incendie ayant ravagé le mythique monument catholique. Le délai de cinq ans nous ferait arriver jusqu'aux Jeux olympiques 2024.
Qu'ils estiment cet objectif atteignable ou non (certains experts parlent d'un chantier qui durera plus de dix ans), de nombreux professionnels du secteur de la construction ont fait savoir, tout au long de la journée du 16 avril, leur volonté de participer d'une manière ou d'une autre à cette reconstruction, que le Président aimerait transformer en effort d'union nationale.
"Chacun de nous veut mettre sa pierre à l'édifice"
"L'architecture est le grand livre de l'humanité, l'expression principale de l'Homme à ses divers états de développement, soit comme force, soit comme intelligence", Victor Hugo dans "Notre Dame de Paris". Une citation choisie par l'Union nationale des syndicats français d'architectes (Unsfa), présidée par Régis Chaumont, en réaction à l'effroyable incendie qui a détruit une partie de la cathédrale, ce 15 avril 2019. Dans un bref communiqué, il ajoute : "Peu de bâtiments portent avec autant de majesté, de forces de l'Histoire, de puissance littéraire, de foi religieuse, l'Histoire, le patrimoine et l'actualité de notre pays, voire de notre civilisation". L'Union des architectes se dit émue par ce drame "qui attaque notre patrimoine, proche ou lointain" qui "appartient à toute l'humanité". Régis Chaumont conclut : "Bâtir, construire, reconstruire ou préserver, chacun de nous veut mettre sa pierre à l'édifice", appelant à rebâtir avec grandeur, en dehors de toute considération économique.
Denis Dessus, le président du Conseil de l'Ordre des architectes (Cnoa), fait savoir : "Nous sommes effectivement très affectés, comme tous les Français, par ce drame qui atteint un bâtiment aussi riche d'histoire et d'architecture. Notre-Dame sera reconstruite, encore plus belle je l'espère, et l'émotion que cause ce drame est porteuse de leçons". Il ajoute : "Le patrimoine, ancien ou contemporain, est un élément révélateur et structurant de notre culture partagée, et nous devons apporter le même soin à garder vivants ces marqueurs de notre histoire qu'à construire aujourd'hui les futurs témoins de notre époque". Les Compagnons du devoir, concernés au premier chef, commentent sobrement dans un Tweet : "Nous sommes terriblement attristés par ce drame qui touche un si grand chef d'œuvre, qui a nécessité tant de travail de la part de couvreurs, charpentiers, tailleurs de pierre… Remercions particulièrement nos pompiers de Paris et unissons-nous pour reconstruire Notre-Dame". Les coopératives forestières, quant à elles, "offrent leurs chênes pour refaire la charpente". Les 110.000 propriétaires forestiers privés regroupés en leur sein, se disent prêts à participer à l'effort de reconstruction en fournissant du chêne français, afin de respecter le modèle historique.
Les entreprises se disent volontaires
La Fédération française du bâtiment a réagi par la voix de Jacques Chanut, son président : "La FFB a toujours été au centre des travaux de rénovation des cathédrales et les entreprises adhérentes, tout particulièrement celles du GMH (groupement des entreprises de restauration des Monuments historiques) sont engagées et volontaires pour répondre présentes. Les bâtisseurs d'aujourd'hui, à l'image des artisans et entrepreneurs d'hier, relèveront ce défi comme ils l'ont toujours fait". Interrogé sur d'éventuelles interventions extérieures, il répond : "Contrairement à ce que l'on a pu entendre, les moyens pour restaurer cette cathédrale existent, il n'y a pas besoin de faire appel à des compagnies étrangères pour le faire". Le président de la FFB estime que les dernières heures ont été encourageantes, "avec un élan de solidarité de certaines grosses entreprises et familles qui ont fait des dons déterminants".
#NotreDameDeParis Les artisans du #bâtiment sont en deuil ce matin. Mais nous sommes mobilisés : ensemble, reconstruisons Notre-Dame ! 👷♂️https://t.co/p1vdUEg7oG
- capeb_fr (@capeb_fr) 16 avril 2019
Frédéric Letoffé, co-président du GMH, est également intervenu lors d'un point presse : "Nous sommes en relation avec le ministère de la Culture et la Direction du patrimoine pour œuvrer sur les travaux d'urgence, dans un premier temps, faire le diagnostic avec les architectes et les instances publiques, puis se charger des étaiements, des consolidations et confortements pour éviter d'autres effondrements possibles suite à l'incendie et l'arrivée massive d'eau. Nous nous mettons à leur disposition, nous disposons de moyens techniques et humains pour pouvoir assurer une parfaite restauration. Avant de commencer à restaurer, il faudra d'abord mettre le site en sécurité, cela va nous demander un travail énorme. Si on veut repartir sur des méthodes traditionnelles de restauration, on peut le faire".
Le monde de l'entreprise au chevet de la cathédrale
Du côté des entreprises, les grands groupes répondent présent. Vinci a proposé un "mécénat de compétences" pour la reconstruction de Notre-Dame, qui serait menée par toute la profession, et s'organiserait "sous l'égide de la Fondation du patrimoine". Ceci pour engager, dans les plus brefs délais, le chantier. Même son de cloche chez Bouygues, qui annonce "se tenir à la disposition des autorités et organisations compétentes pour prendre part, dans le cadre d'un mécénat de compétences, aux travaux de rénovation" d'un joyau inscrit au Patrimoine mondial de l'humanité. Le groupe fait valoir un savoir-faire reconnu en matière de restauration de bâtiments historiques, en citant l'aile Richelieu du Louvre, le musée d'Orsay ou l'hôtel de la Marine. Martin Bouygues a commenté : "Comme des millions de personnes en France et dans le monde, les collaborateurs du groupe ont été profondément émus par l'incendie qui a frappé Notre-Dame. Nous souhaitons apporter notre contribution à la renaissance de la cathédrale de Paris". Un autre géant du monde de la construction, Saint-Gobain, s'est aussi manifesté : "Suite au tragique incendie qui a ravagé Notre-Dame de Paris la nuit dernière, il mettra à disposition son expertise en matière de rénovation et de matériaux de construction, notamment pour la restauration de vitraux. D'autres formes de soutien sont également à l'étude". L'industriel rappelle, lui aussi, son engagement au service du patrimoine et de la culture, via le mécénat, notamment de la Chapelle royale de Versailles.
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Des entreprises plus modestes ont également répondu à l'appel de solidarité et de générosité, à l'image du groupe Duval (immobilier) annonce qu'il participera à l'effort de reconstruction aux côtés des autorités. L'entreprise Novoferm France (matériaux de construction), écrit : "Notre-Dame de Paris représente pour nous en France, notre Histoire, et pour le monde entier bien plus qu'une cathédrale. C'est un lieu de valeurs humaines et de refuge". La société donc décidé de faire un don de 10.000 € au nom de tous ses salariés. La mobilisation est donc générale afin de réparer, au plus vite, les dégâts de ce sinistre.