ANALYSE. Des modes constructifs employés dans les années 60-70 peuvent entraîner des effondrement de balcons dans de très nombreux logements français. C'est du moins l'analyse de la Scop d'architecture Solécité, qui est intervenue sur plusieurs chantiers de ce type. Batiactu l'a contactée.
Alors que l'Agence qualité construction (AQC) devrait rendre prochainement un premier rapport lié aux pathologies des balcons, la Scop d'architecture Solécité, basée à Nantes, a déjà développé une certaine expérience à ce sujet. Contacté par Batiactu, son architecte gérant Laurent Raimbault nous explique les enjeux qu'il a pu identifier. Tout a commencé sur une opération de rénovation d'une copropriété d'une centaine de logements, comprenant 56 balcons. "Nous souhaitions notamment remplacer les garde-corps abîmés", nous explique-t-il. "Mais, lors des travaux, l'un des balcons est tombé, car il n'était plus soutenu que par le garde-corps..."
"La reprise de bétonnage crée systématiquement des débuts de fissuration"
Après la chute, les architectes constatent qu'il ne reste plus qu'un dixième de l'une des 30 barres d'acier qui maintenaient le balcon... Pourquoi cette fragilité ? Les six mois d'arrêt de chantier qui suivent cet incident (qui n'a heureusement pas fait de victime) sont l'occasion d'auditer les autres balcons. "Un certain nombre avaient des fissurations plus ou moins importantes sur la jonction entre la dalle de béton et la dalle du plancher", se souvient Laurent Raimbault. "Cela est dû au fait que dans les années 60-70, le mode constructif était le suivant : on laissait les aciers en attente et on venait couler les dalles de balcons ensuite. Or, cette méthode a un défaut : la reprise de bétonnage crée systématiquement des débuts de fissuration à la jointure. Le nouveau béton ne s'accroche pas assez bien à celui qui est déjà en place."
Dans certains cas, pour l'architecte, ce défaut favorise les infiltrations qui viennent fragiliser l'ensemble. Solécité décide donc de procéder à un renforcement de l'ensemble des balcons de la résidence - de l'ordre de 3.000 euros par unité. "Pourquoi tous ? Car l'analyse spectrographique de chacun d'entre eux coûtait presque aussi cher que de les réparer ; de la même manière, les détruire était tout aussi onéreux."
Solécité est ensuite intervenu sur d'autres immeubles où les balcons étaient fragilisés, pour des travaux de rénovation du même type. "Nous couplons autant que possible ce type d'opération de renforcement avec des ravalements, des extensions de balcons, ou des isolations thermiques par l'extérieur", détaille Laurent Raimbault. "Cela diminue le coût des opérations puisque l'échafaudage est déjà installé."
"Énormément de logements sont potentiellement touchés"
Pour l'architecte, une campagne de communication nationale ne serait pas de trop pour informer les résidents et prévenir plutôt que guérir. "Des milliers d'immeubles d'habitations ont été construits via ce mode constructif, énormément de logements sont potentiellement touchés", assure-t-il.