Conçue à l'origine par Louis Paillard pour sa femme trapéziste, cette maison atypique, calée dans une rangée d'immeubles contemporains, à Montreuil (93), révèle aussi la philosophie d'un défricheur toujours à la recherche de projets audacieux et innovants.
Profondément marqué par la culture "underground" des années 80, Louis Paillard ne craint pas de prendre l'architecture à bras le corps pour la forcer à sortir des sentiers battus. Formé à l'école Boulle puis à l'école nationale de l'architecture La Villette, il a tour à tour monté une exposition dédiée aux projets des jeunes architectes qui n'étaient pas reçus aux concours. Puis, il a proposé, par le biais de plusieurs actions, un nouveau regard sur la maison individuelle alors cantonnée aux lotissements, avant de fonder avec Jacques Ferrier et Philippe Gazeau, un laboratoire de recherche en Urbanisme : FGP(u). La devise de ce fonceur ? "No risk, no fun", une formule propre aux surfeurs, qui accompagne désormais chacun de ses projets y compris lorsqu'il décide, il y a quatre ans, de construire sa propre maison en forme de trapèze, à Montreuil (Seine-Saint-Denis).
Une lanterne magique
Comment ne pas s'arrêter devant cette maison, sorte de montgolfière de plastique et véritable ovni, en déambulant rue du 18 juin, à Montreuil ? "Le toit, en forme de trapèze, est à base de polycarbonate alvéolaire en nid d'abeille", explique Louis Paillard. En choisissant ce matériau translucide couramment utilisé pour les gymnases, l'architecte a créé un espace propice à la pratique sportive. Il a également souhaité introduire un peu de magie de son enfance dans son quotidien : "Petit, je me rendais régulièrement au théâtre de la ville, à Paris, avec mes parents. Au retour, j'étais toujours fasciné par les monuments de verre illuminés qui longent le front de Seine. J'ai souhaité intégrer un peu de cette féerie dans mon habitation".Le socle de la maison est, quant à lui, recouvert de bois, un matériau qui se coordonne parfaitement avec la couleur dorée des panneaux en plastique. Mais ce choix a aussi été influencé par la mairie :"Les seules contraintes imposées par la ville concernaient l'esthétique de la façade et le plan d'occupation des sols. Notre maison devait s'aligner sur la rue, au même titre que les immeubles alentours. En revanche, la municipalité a autorisé une élévation maximale du bâtiment de quinze mètres de haut !"
Le luxe, c'est l'espace
Mais cette maison a d'abord été conçue pour répondre à un impératif de taille, à savoir servir de lieu d'habitation et de travail à la femme de Louis Paillard, qui exerce une activité de haut vol : "Mon épouse est trapéziste. Pour pouvoir exercer son métier, elle a besoin d'espace et d'une hauteur minimale de neuf à dix mètres de haut". Tout le projet du logement a donc été pensé pour réaliser l'un des plus petits chapiteaux du monde : "La hauteur moyenne des deux niveaux habitables situés au rez-de-chaussée et au premier étage a été limitée à deux fois 2,50 mètres". Deux escaliers indépendants ont également été créés pour permettre à l'acrobate d'accueillir ses collaborateurs, sans pour autant les faire passer dans la partie privée de la maison de ville.Le reste de l'habitat ne manque pas non plus d'originalité : la superficie de plus de 250 mètres carrés est totalement exploitée car les pièces sont ouvertes les unes sur les autres : "Le luxe d'une maison n'est pas le 'bling-bling' qui la recouvre, mais son espace à vivre", assure Louis Paillard. Pour éviter de le fractionner, aucune porte n'a été créée. L'intimité est préservée grâce à des parois coulissantes posées sur des rails et à des placards qui servent de pièges à son. Résultat : les pièces ne sont plus cantonnées à un rôle unique et définitif, mais accueillent plusieurs fonctions, comme la salle de bains de 20 m2 que Louis Paillard nomme sa "chambre d'eau" et qui sert aussi d'aire de jeu à sa plus jeune fille. Un sacré pied-de-nez à la conception souvent trop cloisonnée des maisons de particuliers !
Pour avoir un aperçu de la maison de Louis Paillard, cliquez sur suivant.
Une maison trapèze
Architecte de profession, Louis Paillard a décidé de réaliser une maison trapèze pour sa femme trapéziste, en pleine ville.
Vue de la rue
Située rue du 18 juin, à Montreuil (Seine-Saint-Denis), la maison créée par Louis Paillard fait figure d'OVNI aux côtés des immeubles contemporains.
Une maison de ville
La ville n'a pas posé beaucoup de restrictions. Elle a uniquement demandé qu'une partie de la façade soit recouverte de bois et que la maison s'avance sur la rue, dans l'alignement des immeubles alentours.
Vue du jardin
Derrière la maison de ville compacte de 270 mètres carrés sur quinze mètres de haut s'avance un petit jardin de 60 mètres carrés.
Un toit en polycarbonate
Le toit, en forme de trapèze, est à base de polycarbonate alvéolaire en nid d'abeille. Le socle de la maison est, quant à lui, recouvert de bois, un matériau qui se coordonne parfaitement avec la couleur dorée des panneaux en plastique.
Des courbes géométriques
Outre le clin d'œil envers le métier de sa femme, la structure en trapèze a été étudiée pour embrasser la courbe de la balançoire et lui permettre d'évoluer sans heurts.
Des matériaux bruts
Les plafonds, les escaliers et les sols sont en béton brut ; la structure en acier anti-rouille et les murs en parpaings enduit de ciment.
La cuisine
Pour éviter de fractionner le logement, aucune porte n'a été créée. L'intimité est préservée grâce à des parois coulissantes posées sur des rails et à des placards qui servent de pièges à son.
Une lanterne
Petit, Louis Paillard était fasciné par les monuments de verre illuminés qui longent le front de Seine. Avec son toit translucide, il a finalement intégré un peu de cette féerie dans son habitation.
Maître d'œuvre et d'ouvrage : Louis Paillard
Surface : 270 m²
Coût : 650.000 euros