L'une des principales tours dans le ciel parisien vient de rouvrir ses portes après plus de cinq années de chantiers de désamiantage et de réhabilitation. La tour centrale de Jussieu, qui culmine à 95 mètres, a été repensée pour optimiser les espaces occupés par les bureaux en créant un jeu de lumières. Découverte du chantier.
La «tour Zamansky», bâtiment emblématique du campus parisien mais aussi du désamiantage, accueille de nouveau les services administratifs de l'université après cinq années de travaux. Une opération «hors norme par son ampleur et sa complexité», selon Michel Zulberty, directeur général de l'établissement public du campus de Jussieu (EPCJ).
Alors que la dangerosité liée à la présence de l'amiante dans les bâtiments est dénoncée dès les années 1970, ce n'est qu'en 2003 que la tour est évacuée, par décision du tribunal administratif qui pointe aussi le problème de la sécurité incendie. Le chantier de désamiantage, le plus important en Europe, commence en janvier 2004 pour prendre fin en septembre 2005 et laisser place aux travaux de réhabilitation de la tour, orchestrés par le cabinet d'architectes Thierry Van De Wyngaert. Au total, les travaux sur cet immeuble de 24 étages avec 11.000 m² SHON auront coûté 48 millions d'euros TDC, dont 7,5 millions d'euros consacrés au désamiantage. Un coût élevé par rapport à ce qu'aurait représenté une destruction puis reconstruction, mais il s'agit selon Michel Zulberty d'une «vision économique : sur trente ans, on aura rentabilisé quatre fois le coût des travaux», avance-t-il. De plus, l'édifice est l'une des rares tours parisiennes à mesurer 95 mètres de hauteur (88 mètres depuis la dalle Jussieu), et le plan local d'urbanisme n'aurait pas permis de construire un bâtiment dépassant les 37 mètres de hauteur. Comme il n'était pas non plus possible d'élargir la tour, c'est l'option réhabilitation qui a été choisie.
Tour vrillée
C'est au groupement constitué des bureaux d'études Coteba et Voutay et de l'architecte Thierry Van de Wyngaert qu'ont été confiés les travaux de réhabilitation de la tour centrale, qui s'élève au dessus des bâtiments en forme de quadrillage imaginés par Edouard Albert dans les années 1970. En 2005, la fin du désamiantage a laissé à nu les plateaux de la tour centrale, sur laquelle les travaux de réhabilitation commencent en 2006. L'objectif est de concevoir des locaux capables de répondre à l'évolution des services administratifs, tout en respectant l'œuvre originale d'Edouard Albert qui avait imaginé une tour vrillée. Il s'agit également d'améliorer la surface utile, dans le strict respect des planchers existants et autour du noyau central de 12 m par 12 m, en essayant malgré tout d'élargir la surface dédiée aux bureaux. Au total, on trouve désormais dans la tour Zamansky 6.500 m² de surface utile et des gorges lumineuses pivotant géométriquement d'un étage à l'autre, afin de rappeler l'idée de la tour vrillée mais aussi celle de l'ADN, un clin d'œil à ce campus scientifique. La lumière se reflète aussi sur la façade faite de verre et d'aluminium sur lequel est inscrite un adage que pourront méditer les occupants du campus en admirant la tour : «L'avenir est un présent que nous fait le passé»…
Chantier
Chantier de réhabilitation après désamiantage, décembre 2007. La tour compte 24 étages, qui s'élèvent à 88 mètres au dessus de la dalle.
Grue
La tour centrale du campus en janvier 2008, pendant la mise en peinture des poteaux qui nécessitera pas moins de 2.720 pots de 25 kg, afin de recouvrir 5,2 km de poteaux extérieurs.
Pose des façades
Juin 2008 : pose des façades de verre et d'aluminium.
Verre
Septembre 2008, la pose des façade est presque terminée.
Quadrillage
La tour centrale s'élève au dessus des bâtiments en forme de quadrillage imaginés par Edouard Albert dans les années 1970
Tour
Les travaux de réhabilitation se sont achevés début 2009.
Nuages
Sur la nouvelle façade vitrée de la tour, on peut lire «L'avenir est un présent que nous fait le passé» (André Malraux).
Vue de Paris
La tour centrale de Jussieu trône au milieu de la capitale.
Nuit
Architecte
L'architecte de la rénovation, Thierry Van De Wyngaert (à gauche), accompagné de Michel Zulberty, directeur général de l'établissement public du campus de Jussieu (EPCJ).
ADN
Au total, on trouve désormais dans la tour Zamansky 6.500 m² de surface utile et des gorges lumineuses pivotant géométriquement d'un étage à l'autre, afin de rappeler l'idée de la tour vrillée mais aussi celle de l'ADN, un clin d'œil à ce campus scientifique
Couleurs
Espace
Mesure de l'air
Au 10e étage, une pompe mesure les niveaux de pollution de l'air par l'amiante. Il s'agit de mesures de restitution, visant à montrer qu'il n'y a plus de pollution dans l'air.
Lumières
La tour mise en lumières.
1976 : Les premiers articles d'information scientifique sur l'amiante et ses dangers paraissent dans la presse médicale.
1977 : Un premier arrêté limite l'utilisation de l'amiante (interdiction de flocage dans les locaux d'habitation) et liste les travaux nécessitant une surveillance médicale. Par ailleurs, un décret limite les concentrations d'amiante admissibles au poste de travail à 2.000 fibres d'amiante par litre d'air sur 8 heures.
1988 : un décret interdit l'utilisation de la crocidolite (catégorie d'amiante dont les fibres sont en forme de croix). Ce texte établit une liste de produits contenant de l'amiante interdits à la vente, et oblige à étiqueter les produits en contenant.
1995 : Un diagnostic portant sur les flocages est fait à Jussieu par un bureau d'étude à la suite duquel des mesures d'urgence sont adoptées et mises en place par les universités. Un plan de retrait de ces flocages est envisagé, puis c'est le retrait total de l'amiante qui sera décidé.
1997 : Un décret promulgue une interdiction totale de fabriquer, importer ou créer tous les matériaux amiantifères.
2004 : Sur le seul campus de Jussieu, on dénombre 110 cas avérés de maladies professionnelles liées à l'amiante et cinq décès par cancer (mésothéliome) d'enseignants et de chercheurs ayant travaillé sur le site.