Le Conseil national de l'Ordre des médecins a indiqué vendredi que la loi sur le logement opposable du 6 mars, en offrant la possibilité à un bailleur de consulter le futur Dossier médical personnel (DMP) du demandeur d'un logement, présente un risque de dérive «inadmissible» et constitue une entorse au secret médical. Les ministères de la Santé et du Logement proposent déjà un amendement pour rectifier le tir.

Confirmant une information donnée par Europe 1, le président de la section éthique et déontologie de l'Ordre des médecins, Dr Pierrick Cressard, a déclaré vendredi qu’«il est inadmissible qu'un bailleur, qui n'a aucune compétence médicale, puisse accéder à toute l'histoire médicale d'un patient».

L'Ordre des médecins qui «n'a pas été consulté et a découvert l'article 35 avec stupeur» réclame «une nouvelle loi qui abrogera cette ligne». «Il s'agit sans doute d'une bonne intention -la loi ouvre cette possibilité dans le cas où le demandeur souhaite un logement adapté ou spécifique- mais elle a des implications perverses», estime le Dr Cressard. «Imaginez un demandeur âgé ou handicapé, qui souhaite un logement doté d'un ascenseur, le bailleur pourra demander le dossier médical et aura connaissance d'événements tels qu'une interruption volontaire de grossesse». L'accès au DMP peut aussi fonder un refus, «stigmatisant le demandeur du logement», poursuit-il. La disposition est d'autant plus «stupéfiante» que le législateur a voulu faire du DMP une «forteresse», en prévoyant que seuls les médecins autorisés par le patient pouvaient y accéder. «On construit une forteresse, puis on fait un trou de souris, par lequel peuvent s'engouffrer d'autres professions comme les assureurs», indique le praticien.
Le Dr Cressard juge la disposition d'autant plus «ambiguë» que le Dossier médical personnel n'existe pas (sa création a été repoussée à 2008) : «des patients mal informés risquent de fournir le dossier médical constitué par leur médecin traitant», craint-il.

Vers un amendement
Pour rectifier le tir, les ministères de la Santé et du Logement ont répondu vendredi en précisant qu'un amendement législatif allait «repréciser la formulation» de l'article 35. Le bailleur est ainsi autorisé à accéder au dossier médical personnel (DMP, dont la création est prévue en 2008) lors de la demande d'un logement «adapté ou spécifique» pour une personne présentant un handicap. «L'esprit de la loi est bien que le dossier médical personnel ne peut être demandé», a souligné un conseiller du ministre de la Cohésion sociale et du Logement, Jean-Louis Borloo. «Le dossier médical personnel doit rester confidentiel et du seul ressort du monde médical, il ne pourra en aucun cas être demandé pour l'obtention d'un logement adapté ou spécifique», précise le ministère, dans un communiqué. «Seul un certificat médical pourra être demandé par le bailleur».

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