FEUILLE DE ROUTE. En prévision de son congrès qui aura lieu du 9 au 11 octobre à Marseille, l'Union sociale pour l'habitat a fait le point sur les nombreux changements de l'année écoulée (la loi Elan en premier lieu) et sur les combats que l'organisation veut mener l'année prochaine. Détails.
Le jour où l'Union sociale pour l'habitat (USH) organisait son point conjoncture sur le bilan 2018 et les perspectives 2019, la loi portant évolution du logement, de l'aménagement et du numérique (Elan) trouvait un accord en CMP (commission mixte paritaire, rassemblant députés et sénateurs), pour une adoption définitive dans les semaines à venir. Autant dire que le contexte était tout particulier quand Marianne Louis, directrice générale de la fédération, a pris la parole : "Le débat n'est pas derrière nous, mais devant nous. On va maintenant attendre de voir les mesures induites par Elan. D'après ce que l'on sait, les décrets d'application s'étaleront dans les 12 prochains mois. Il existe assurément des leviers facilitateurs d'activité, mais ce ne sont pas des leviers 'financeurs'. Notre secteur s'interroge donc encore largement : qu'est-ce qu'on attend de nous ?"
Bien que désemparée, l'USH prend acte du parcours législatif du texte et assure ne pas vouloir en rester là. Même si le monde HLM reconnaît que le processus de dialogue institué autour d'Elan a permis des avancées, il insiste aussi sur le fait que loi et budget vont inexorablement de paire : "Les HLM ne pourront pas continuer à payer seuls la facture, à fournir des efforts", reprend Marianne Louis. "Idem pour les locataires du parc social. Le président de la République avait promis 'un choc de l'offre', mais on l'attend toujours... Les alertes portées par notre secteur n'ont pas été entendues, et cela va aujourd'hui impacter le bâtiment et les travaux publics."
Une production en baisse de 5%
Le ton est donné en prévision du congrès de l'USH, organisé du 9 au 11 octobre prochain à Marseille. L'organisation estime que cet évènement s'ancre dans un moment-charnière : à l'heure du bilan de la loi de finances 2018, de l'adoption imminente de la loi Elan, et de la présentation du PLF 2019, l'actualité impose son rythme. La question principale restant de savoir quelle trajectoire les pouvoirs publics veulent attribuer au monde HLM : "Nous subissons une contrition de nos moyens", poursuit Marianne Louis. "Nous avons chiffré le coût du passage du taux de TVA de 5,5% à 10% à hauteur de 700 millions d'euros pour notre secteur. De plus, la baisse des APL [Aides personnalisées au logement, NDLR] a dû être compensée par nos organismes. Bien que les dossiers PRU [Projets de rénovation urbaine, NDLR] soient en train d'être lancés, on table déjà sur une baisse tendancielle d'environ 5% de la production. Car les paramètres économiques risquent d'être les mêmes en 2019 qu'en 2018… Et parallèlement, nous avons comptabilisé 2,5 millions de demandes de logements sociaux, soit une hausse de 3% par an. Dans le secteur HLM, un entrant sur deux est sous le seuil de pauvreté."
Regrettant un discours officiel dur, couplé à un manque de cohérence entre les paroles et les actes, l'USH se positionne comme rempart face à des économies budgétaires impactant le monde du logement : "Ce congrès sera un anti-rapport CAP 22", assène Marianne Louis. Pour rappel, le rapport CAP 22, dont Batiactu avait détaillé les possibles conséquences sur le BTP, ambitionne de réduire de 30 milliards d'euros le déficit public à horizon de 2022. Toujours est-il que le secteur HLM considère que les véritables problématiques se trouvent ailleurs, loin des considérations purement administratives : "Le vrai sujet, c'est la répartition géographique des logements sociaux. Des régions extrêmement sollicitées comme l'Ile-de-France et Provence-Alpes-Côte d'Azur ne peuvent pas envisager une stabilisation de leur demande".
Jacques Mézard attendu de pied ferme
Au-delà du constat, l'USH veut poursuivre la mobilisation autour de certains combats, et propose des pistes de réflexion. Tout d'abord, l'organisation souhaiterait que le gouvernement s'interroge sur la pertinence d'une nouvelle baisse d'APL en 2019. Ensuite, le monde HLM demande à obtenir une estimation fiable de la part des bailleurs sociaux dans les revenus de la TVA. "Il faut aussi poser la question des outils de la relance, et réaliser un véritable examen des impacts budgétaires en 2019", souligne Marianne Louis. "Sur ce point, le premier semestre 2019 sera déterminant." En revanche, l'USH se réjouit d'ores-et-déjà que certaines collectivités territoriales investissent dans des projets de renouvellement urbain, à l'instar d'Angers, d'Avignon, de Clichy-sous-Bois, d'Evreux, de Valence ou encore de Villeurbanne.
L'a priori sur les mois à venir est donc en toute logique négatif : "La politique actuelle du logement répond davantage à des économies budgétaires qu'à une véritable réforme en profondeur", regrette Marianne Louis. "Il y a un droit qui est fondamental, c'est celui au logement. Nous avons posté [mardi 18 septembre] un courrier au Premier ministre [Edouard Philippe, NDLR] pour attirer une nouvelle fois son attention sur les problématiques de notre secteur. Si les pouvoirs publics restent droits dans leurs bottes et maintiennent des décisions qui fragilisent le monde HLM, notre congrès risque d'être vif et agité." D'autant plus que le PLF 2019 venant d'être présenté, les esprits seront certainement encore plus échauffés - le congrès USH de 2017 s'était déjà soldé par une bronca mémorable face aux représentants du gouvernement. Côté personnalités, les visiteurs du congrès pourront suivre les interventions de Jacques Mézard, ministre de la Cohésion des territoires, et de Julien Denormandie, son secrétaire d'Etat. Annick Girardin, ministre des Outre-Mer, et Marlène Schiappa, secrétaire d'Etat chargée de l'Egalité entre les hommes et les femmes, devraient également assister à une partie des débats. Une brochette d'invités qui ne fera pas perdre de vue à l'USH son premier combat : "Nous portons une exigence de solidarité nationale envers la population des logements sociaux", conclut sa directrice générale.