CONCERTATION. Deux semaines après le coup d'envoi du Grand débat national, des acteurs du logement, de la construction ou de la promotion immobilière s'emparent du sujet du logement abordable, à la location comme à l'accession. Comme si la problématique qui préoccupe une grande partie des Français avait été éludée dans le dispositif de concertation nationale.

Au 15 janvier, date de lancement du Grand débat national, quatre thématiques ont été soumises aux Français pour orienter les échanges qui émailleront les territoires de l'Hexagone jusqu'au 15 mars prochain. La fiscalité et les dépenses publiques, la démocratie et la citoyenneté, l'organisation de l'Etat et la transition écologique sont les quatre fils directeurs des débats entre citoyens, associatifs et élus.

 

Dans la lettre du président de la République Emmanuel Macron adressée le 13 janvier dernier aux Français, le volet de la transition écologique doit faire émerger des propositions sur la réduction "des dépenses contraintes des ménages en carburant, en chauffage, en gestion des déchets et en transports". Et parmi les questions posées par le chef de l'Etat : "Quelles sont les solutions pour se déplacer, se loger, se chauffer, se nourrir, qui doivent être conçues plutôt au niveau local que national ?".

 

Si le terme logement est abordé dans la missive présidentielle, dans quelle mesure est-il débattu dans les gymnases de France ? Pour la Confédération nationale du logement, s'adressant à Emmanuel Macron dans une lettre ouverte, "vous n'incluez pas le logement dans la liste des thèmes sur lesquels les Français seront amenés à s'exprimer".

 

Investir les réunions publiques

 

Alors qu'il constitue pour beaucoup le premier poste de dépenses, "c'est une faute de goût de ne pas inclure le logement au cœur du Grand débat national", a estimé Eddie Jacquemart, président de la CNL auprès de Batiactu. "Nous avons le sentiment que l'on n'a pas tenu compte de l'avis des locataires, alors nous avons décidé de nous inviter dans le grand débat, en distribuant des livrets contenant nos propositions en matière de logement pour tous, en investissant les réunions publiques, et pourquoi pas, en organiser", annonce-t-il par ailleurs.

 

"Nous avons bien senti dans les cages d'escalier que la colère était là", alerte Eddie Jacquemart pour illustrer la crise du logement, tiraillée entre des perspectives mitigées des acteurs de l'immobilier et des chiffres de la construction dans le rouge. Pour autant, le ministre du Logement Julien Denormandie ne croit "pas du tout" à une esquive du sujet par le Grand débat national. "C'est par définition des moments de partage et d'échange. Le logement est une grande préoccupation pour une grande partie de nos concitoyens, et il sera évidemment abordé", a-t-il assuré à Batiactu.

 

La thématique du logement ne constitue peut-être pas un volet à part entière. Cela n'empêche pas les acteurs orbitant autour de ce secteur de présenter leur lot de propositions pour le logement accessible.

 

Briser le tabou de la densité

 

La CNL appelle notamment à construire "massivement" des logements sociaux supplémentaires, de suspendre les mesures de réduction des moyens des bailleurs sociaux, et la création d'une "sécurité sociale du logement", co-financée par les cotisations salariales qui "aiderait de manière ponctuelle les personnes ayant subi un accident de la vie", précise Eddie Jacquemart.

 

La Fédération des promoteurs immobiliers elle, estime que "le logement abordable" est la solution aux nombreuses doléances qui sont ressorties du mouvement des gilets jaunes. Pour la FPI, la résorption de la crise du logement se traduira par une installation choisie des ménages dans les métropoles. "Le modèle maison individuelle + automobile (…) certains ménages le choisissent mais beaucoup le subissent, faute de pouvoir se loger dans les villes", a-t-elle déploré dans un communiqué du 18 janvier.

 

Le Grand débat national peut constituer pour la fédération le premier maillon de discussion sur la cherté du logement qui reste, selon sa présidente Alexandra François-Cuxac, indissociable d'une réflexion sur la densification dont "il faut briser le tabou". "A nous de savoir rendre la densité acceptable, soutenable, désirable, en ajustant nos méthodes et nos produits ; aux élus locaux de faire la pédagogie auprès des habitants et de veiller à ce que cette densité soit mise au service d'un logement moins cher", recommande la FPI.

 

Lundi, c'était à la Fédération française du bâtiment de s'emparer du dispositif de concertation national qui, dans un communiqué, affirme sa volonté de "contrer le procès inique fait à l'investissement immobilier" et préconise "le maintien de dispositifs en faveur de l'accession à la propriété dans les zones rurales".

 

Si chaque acteur prêche pour sa paroisse, tous s'entendent sur la nécessité d'une production massive de logements au service d'une offre abordable. Mais les différentes préconisations doivent se frotter à la nouvelle-née loi Elan, censée servir "le choc d'offre" promis par Emmanuel Macron au début de son mandat.

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