ANALYSE. Le rabotage des aides à la pierre, décidé l'an dernier, n'aura pas tardé à produire ses effets. En effet, d'après la Fédération française du bâtiment (FFB), le marché du logement neuf connaît déjà un "retournement".
Alerte sur le logement neuf ! C'est le message qu'a souhaité faire passer la Fédération française du bâtiment (FFB), lors de son habituelle conférence de presse trimestrielle qui s'est tenue le 11 juillet 2018. "Le gouvernement en place fin 2017 a raboté le PTZ et le Pinel, supprimé l'APL accession et profondément bouleversé le modèle du logement social ; un effondrement s'en suit presque mécaniquement", a assuré Jacques Chanut, président de l'organisation. "Nous tirons aujourd'hui la sonnette d'alarme : les aspects positifs à long terme de la loi Elan ne permettront pas de compenser cette menace à court terme."
Une baisse de -14,3% des ventes dans l'individuel diffus
Plusieurs chiffres viennent illustrer l'inquiétude de la profession. Ainsi, de janvier à mai 2018, en glissement annuel, les autorisations baissent de 1,8% et les mises en chantier de 4,3% (en logement individuel pris séparément, cela donne respectivement -7,5% et -2,4%). Et les ventes, dans le neuf, sont entraînées dans une même dynamique négative : -5,1% au premier trimestre 2018 pour la promotion immobilière, et -14,3% dans l'individuel diffus sur les cinq premiers mois de l'année.
Les constructeurs aménageurs de la FFB (LCA-FFB) ont réalisé leur propre enquête interne, auprès de répondants cumulant 22.000 logements vendus en 2017. Il en ressort qu'une baisse de 11% des ventes est constatée sur le premier semestre en individuel et en collectif. Et le lien est fait avec les choix gouvernementaux de la loi de finances votée fin 2017. "Côté accession, il en ressort que dans les zones A et B1, la suppression de l'APL explique 40% de la baisse, le solde relevant de la dégradation de l'environnement économique et 'psychologique'", nous explique Patrick Vandromme, président de LCA-FFB. "En zones B2 et C, la disparition de l'APL accession compte pour presque autant qu'en A et B1, avec 42%, mais il faut encore y ajouter le rabotage du PTZ qui devient ici prépondérant, avec 45 % du repli des ventes." De même le repositionnement du Pinel serait à l'origine de 84% du recul des ventes en investissement locatif.
Autre donnée, le nombre de PTZ accordés au premier trimestre 2018 s'est effondré de 46% dans le neuf par rapport au premier trimestre 2017 et de 61% dans l'individuel neuf.
Les carnets de commandes à un plus haut historique
Toutefois, le secteur reste généralement bien orienté. Il a créé 30.000 emplois (intérim compris) au premier trimestre et les carnets de commandes se situent à un plus haut historique, 7,5 mois de chiffre d'affaires en juin 2018. Ceci notamment grâce à la très bonne tenue du marché du non résidentiel neuf, avec +7,5% d'autorisation et +13,3% de mises en chantier, sur la période janvier 2018-mai 2018. "Il faut souligner la belle performance des bâtiments administratifs (+28,0 %), l'échéance des élections municipales de 2020 y étant pour beaucoup, et des bureaux (+22,5 %)", note la fédération.
Plan de rénovation, TVA, CITE... Les inconnues de 2019
Jacques Chanut, président de la FFB, a également exprimé les inquiétudes de la profession sur des sujets qui restent flous. Ainsi du plan de rénovation énergétique des bâtiments, encore "dans les limbes", et le contenu de la "Prime Hulot" qui remplacera le CITE en 2019. Ce sont également les menaces qui pèsent sur le taux de TVA à taux réduit qui rendent la FFB vigilante. Enfin, la tenue des coûts des productions, qui ont augmenté selon la FFB de +2,3% l'an à fin mars 2018.