GRAND DÉBAT. Remise au préfet de la région Ile-de-France en présence du ministre du Logement Julien Denormandie, la synthèse des cahiers de doléances des communes franciliennes révèle un faible nombre de contributions, où les thématiques d'aménagement et de logement sont peu abordées.

Ce vendredi, dans l'enceinte de la préfecture de région, Stéphane Beaudet, Sylvine Thomassin et Jacques JP Martin - maires et respectivement président, vice-président et secrétaire général de l'Association des maires d'Ile-de-France (Amif) - remettaient au préfet Michel Cadot et au ministre Denormandie les recueils et synthèse des cahiers des doléances rapportés de plus de 400 communes franciliennes.

 

L'initiative d'enregistrement des doléances des administrés a débuté le 3 décembre dernier, en pleine crise des gilets jaunes. De ces cahiers, l'Amif a tiré "près de 3.000 contributions". Un nombre qui paraît infime au regard des 12 millions d'habitants qui peuplent l'Île-de-France.

 

Des 2.865 doléances franciliennes, l'Amif a établi un premier profil des contributeurs, un public qui est "plus âgé, habite moins fréquemment des quartiers populaires et est sensiblement plus aisé que la moyenne des habitants d'Île-de-France".

 

5% de contributeurs issus de la Seine-Saint-Denis

 

En ce sens, seuls 2% des Parisiens et 5% des Séquano-Dionysiens (habitants de Seine-Saint-Denis) ont exprimé leurs attentes, laissant le plus grand nombre de contributeurs au département des Yvelines (20% de contributions), de la Seine-et-Marne (19%) et de l'Essonne (17%).

 

A l'image des pancartes brandies au cours des 14 derniers week-ends de mobilisation des gilets jaunes, ce sont bien les questions de gouvernance et de niveau de vie qui sont en tête des contributions. A contrario, les sujets de l'aménagement et du logement restent minoritaires, mais laissent apparaître des avis précis sur cette thématique jetant une lumière crue sur les fractures territoriales, la dévitalisation des centres-villes ou les difficultés d'accès à un logement abordable.

 

L'aménagement incarne ainsi 6,8% des doléances, où "les contributeurs soulignent en grande majorité la dichotomie urbain/rural, en particulier entre Paris et les secteurs plus ruraux de l'Ile-de-France". De cette thématique, découlent notamment des demandes de "rééquilibrage mégapole et province", "dé-saturer Paris et sa banlieue" ou encore d'arrêter "de concevoir la politique avec les critères du Paris intra-muros".

 

Un appel à la proximité

 

Une des propositions émises par un contributeur, à savoir "établir un seuil d'habitants dans les mairies des villes moyennes", traduit à elle seule l'appel à une redynamisation des centres-villes et centres-bourgs avec un retour des commerces de proximité, et une demande de "favoriser le commerce et l'activité locale avec une TVA différente en fonction de l'impact écologique".

 

Qui dit commerce de proximité dit coup de frein sur les centres commerciaux périphériques, mal perçus par les contributeurs qui demandent la limitation, sinon l'arrêt de leur développement. Cela s'inscrit dans une exigence plus grande de limiter l'étalement urbain, où certains contributeurs "préconisent plus de densification pour éviter le mitage des terres agricoles, tandis que d'autres prennent position contre la densification à outrance de la région pour privilégier les espaces verts".

 

Les banlieues et quartiers populaires sont eux, peu évoqués, et simplement commentés "à la marge", selon l'Amif. On signale une demande de "moratoire sur les banlieues des métropoles".

 

Transparence des attributions de logements sociaux

 

Si la question du logement revêt un intérêt supérieur à celle de l'aménagement, elle reste encore isolée en représentant 9% des doléances recensées. Le sujet est abordé dans sa majeure partie sous l'angle du logement social, pour lequel les contributeurs se montrent en faveur d'un développement du parc.

 

En ce sens, ils appellent notamment au strict respect des quotas SRU par les communes, ou à la réquisition de logements vacants ad hoc. "Les répondants indiquent également qu'il est important de pouvoir simplifier l'accès au logement social, et de faire preuve de transparence sur les critères d'attribution de ces logements", indique la synthèse de l'Amif.

 

Concernant le volet des attributions, les contributeurs souhaitent un contrôle plus rigoureux des bénéficiaires de logement, craignant des risques de clientélisme et d'inadéquation avec certains revenus. A contrario, toujours "à la marge" selon l'Amif, certains répondants appellent à une réduction du nombre de logements sociaux, "de l'abandon de la loi SRU", ou à ce que les logements soient "réservés aux personnes de nationalité française".

 

Relation locataire-bailleur

 

La question d'une plus grande transparence dans l'attribution des logements sociaux révèle en filigrane la question de la cherté du logement, qu'il soit issu du parc locatif social ou privé. Sur ces deux sujets, les doléances plaident en faveur du "plafonnement ou l'encadrement du prix des loyers, voire la baisse de ces loyers". La question de l'habitat indigne est quelques fois évoquée à travers le prisme des marchands de sommeil, envers qui les contributeurs appellent à plus de contrôle et de sanctions, ce que prévoit la loi Elan.

 

Certaines doléances font état d'une volonté de donner davantage de droits au locataire, appelant à des possibilités d'action contre un syndic, à la suppression des APL "qui ont un effet d'augmentation des loyers", ou l'interdiction de l'augmentation des loyers sur une période donnée.

 

Côté propriétaires, les contributions restent faibles mais s'orientent autour de "la lutte contre la spéculation immobilière et le plafonnement des prix de vente". Selon eux, l'incitation " à un choc de l'offre" de logements passerait notamment par "l'octroi du permis de construire aux logements aux départements", aujourd'hui dévolu aux maires.

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