PODCAST. Promis par le gouvernement, le choc de l'offre nourrit les fantasmes des acteurs de la construction et du logement, public comme privé. Mais avec une année 2018 plutôt terne pour la production, ceux-ci craignent que le rêve ne se transforme en « cauchemar ». Christophe Boucaux, délégué général adjoint de LCA-FFB et Laurent Goyard, directeur général de la Fédération des OPH témoignent de leurs craintes pour leur secteur respectif. Un débat animé par Batiactu sur Batiradio.
Dans le secteur de la maison individuelle comme celui du HLM, les chiffres de production en berne laissent penser à leurs représentants que le choc de l'offre n'est encore qu'un lointain mirage. Une « utopie » accentuée par les nombreuses mesures budgétaires qui se sont abattues sur leurs secteurs respectifs. Batiactu a réuni le temps de son émission Christophe Boucaux et Laurent Goyard pour en témoigner. Un podcast à retrouver ci-dessous.
Dans la construction de maisons individuelles et de promotion immobilière représentées par LCA-FFB, la suppression de l'APL Accession et la disparition annoncée du prêt à taux zéro pour le neuf dans les zones B2 et C annoncent déjà une diminution des mises en chantier, donc des ventes. A l'échelle du logement social, les bailleurs sociaux pourraient se voir prélever 1,5 milliards d'euros en 2020 en totalisant la baisse des loyers, la réduction du loyer de solidarité et l'augmentation de la TVA de 5,5% à 10% pour la construction neuve comme les opérations de rénovation.
« On a effectivement une offre qui est plutôt en choc plutôt qu'un choc d'offre », témoigne, rire jaune, Christophe Boucaux, futur délégué général de LCA-FFB à compter du 28 mars. Reprenant le mantra de la loi Elan « Construire plus, mieux et moins cher », ce dernier déplore que « les chiffres de 2018 montrent à l'évidence que ce n'est pas du tout le cas, on peut espérer que la construction aille plus vite avec certaines mesures de la loi Elan notamment sur le traitement des contentieux. Quant à construire moins cher, on demande à voir, puisque plusieurs mesures qui ont été ou vont être prises risquent de surenchérir le coût du logement ».
« Le logement social a longtemps joué un rôle contracyclique »
Avec 106.000 agréments chiffrés en 2018 contre 120.000 l'année précédente, le monde HLM craint lui une baisse de production de l'ordre de « 30 à 40% dans les prochaines années », prospecte Laurent Goyard. Un sentiment de sacrifice, pour le DG de la Fédération des OPH, car « chaque coup de frein engendre des périodes difficiles ». Et de craindre qu'en cas de nouvelle crise immobilière, le logement social « qui a longtemps (…) joué un rôle contracyclique » ne soit plus en mesure de « résister et de faire en sorte que les secteurs ne s'effondrent pas en même temps ».
Ces mesures budgétaires et leur impact conjoncturel auront-elles raison du choc de l'offre avant même que la loi Elan ne démontre ses premiers effets ? Le délégué général adjoint de LCA-FFB se montre dubitatif quant au fait que « les mesures de la loi suffisent à créer le choc de l'offre attendu ». Une impuissance qu'il associe entre autres à la question du foncier dont « la rareté (est) de plus en plus forte avec une surenchère permanente entre les différents acteurs, publics comme privés, pour satisfaire leurs objectifs de production ».
Laurent Goyard lui, dénombre des « outils intéressants » visant à « réduire un certain nombre de normes ou améliorer la possibilité d'accélérer la mise en œuvre des permis de construire », tout en fustigeant les « contradictions » du gouvernement. « On nous impose des prélèvements très élevés, et une baisse des APL aux ménages tout en nous affirmant que ces derniers n'en verront pas la couleur puisque l'on baisse leurs loyers. Pour les organismes, ce sera de l'entretien, des réhabilitations et des constructions neuves en moins, donc les locataires verront malheureusement la différence », peste le directeur général de la Fédération des OPH.
Pérennisation du PTZ neuf
Pour le secteur des constructeurs de maisons et promoteurs, les jeux sont encore ouverts sur un maintien du PTZ neuf en zone périurbaine et rurale, mais la question d'un retour de l'APL Accession s'avère « plus complexe » selon Christophe Boucaux, quand bien même celle-ci constitue un levier « très peu coûteux par rapport à l'enveloppe globale des APL ».
Pour les acteurs du mouvement HLM, une clause de revoyure est en cours de négociation avec les ministères de la Cohésion des territoires et de l'Economie, et devait donner lieu, ce vendredi, à une rencontre à Matignon avec le Premier ministre. Plutôt qu'un allègement des prélèvements ou de la suppression de certaines mesures, les discussions portent davantage sur des mesures compensatoires, comme l'allongement des dettes, que les bailleurs sociaux devront bien rembourser un jour.