A peine évoquée, l'hypothèse de la taxation des plus-values réalisées lors de la vente de la résidence principale suscite de vives réactions, tant des acteurs politiques que des professionnels. Le gouvernement tempère en rappelant que rien n'est encore décidé. Retour sur une polémique annoncée.
Il y a les pour et les contres, les virulents et les plus nuancés : ce que l'on ne peut nier, c'est que l'hypothèse d'une taxation des plus-values réalisées sur la vente de la résidence principale alimente le débat ! Même si le ministre du budget en charge de la réforme de la fiscalité, François Baroin, s'évertue à rappeler que rien n'est encore décidé... il n'en sait pas moins que cela reflète l'état du chemin à parcourir pour arriver au consensus final ! L'on s'étonnerait d'ailleurs du contraire, tant les enjeux économiques et politiques d'une telle réforme qui concerne tous les Français sont dans toutes les consciences.
Tout part d'une volonté - avancée par le Chef de l'Etat lui-même - de rapprocher la fiscalité et l'économie de notre pays de celles de l'Allemagne. A cela s'ajoute les polémiques autour du bouclier fiscal et de l'impôt sur la fortune (ISF). Et il ne faut pas oublier dans ce contexte, les effets de la crise économique et la hausse des prix de l'immobilier. Tous ces facteurs interagissant les uns avec les autres, bien entendu, à l'image par exemple, du véritable problème que pose l'assujettissement à l'ISF de certains ménages, du seul fait de l'augmentation de la valeur de leur bien immobilier.
Un rapport accueilli fraîchement
La réflexion est donc engagée. Et il est sûr qu'il y aura un nouvel impôt défini en juin prochain. Qui et quoi taxer ? Faut-il agir plutôt sur les revenus ou sur les biens ? La première piste, évoquée par le Président de la République, de la taxation des plus-values sur la résidence principale semble d'ores et déjà bien mal partie. Elle suscite d'ailleurs la controverse au sein même du parti présidentiel. Ce jeudi, alors que le député UMP Jérôme Chartier* remettait justement son rapport sur ses "Réflexions pour une convergence fiscale franco-allemande" au secrétaire général du parti Jean-François Copé, la réunion du groupe à l'Assemblée n'a pas manqué d'être houleuse, selon les Echos qui l'ont rendu public. Car parmi les pistes évoquées par le député, beaucoup sont sujettes à polémiques : maintenir l'ISF pour les plus fortunés (ceux qui déclarent plus de 4,04 millions d'euros) tout en baissant les barèmes à 0,5% ; plafonner l'avantage de la déduction des charges de leur résultat pour les entreprises ; relever les taxes foncières des résidences secondaires pour la part excédant 500.000 euros ; et enfin, taxer les plus-values sur les résidences principales à partir d'un seuil de cession fixé à 1,2 million d'euros, et si le propriétaire l'a gardée moins de 15 ans.
Sur ce dernier point, le ministre du budget lui-même, après être apparu sur i-Télé plutôt réticent - parlant d'une mesure aux impacts sur le marché immobilier et sur la mobilité des gens non négligeables - se serait montré carrément "opposé" devant les députés UMP, rejoignant en cela Christian Jacob, le président du groupe UMP à l'Assemblée. Une position soutenue également par le Premier Ministre, toujours selon les Echos citant des témoins. Placée en tête de tous les analystes comme celle choisie par le Président, l'hypothèse bat ainsi de l'aile dans son propre camp. Même si d'autres la soutiennent, comme Nathalie Kosciusko-Morizet, ministre du développement durable et du logement, qui a, quant à elle, exprimé sur RMC son "bon sens" : "Oui, on pourrait taxer plus" a-t-elle déclaré. En revanche, chez les adversaires politiques, cela semble déjà plus clair : pour François Bayrou - qui s'est exprimé chez nos confrères de RMC et BFM-TV - cela serait "une erreur colossale" et il n'hésitera pas d'ailleurs à "combattre" cette mesure. A gauche, à l'image de François Hollande, l'on propose, plutôt que de taxer le patrimoine, d'ouvrir un barème supérieur à l'impôt sur le revenu.
Réactions des professionnels
Nombreux professionnels de l'immobilier ont enfin réagi par voie de communiqués dès ce mardi et encore ce mercredi, faisant vent debout contre cette première piste. Ici pêle-mêle : l'UNPI, le plus virulent, qui "s'insurge" par la voix de son président Jean Perrin contre une taxation qui "va engendrer une paralysie totale du marché" et lourde de conséquence pour le secteur déjà fragilisé ; Century 21 qui dénonce une "fausse bonne idée" qui devrait "rejoindre les limbes" car elle mettrait fin à la fluidité du marché et aggraverait la pénurie de logement ; et enfin, le réseau EffiCity qui s'élève contre cette "très mauvaise idée" qui a fait "bondir" son président Christophe de Pontavice...
Le groupe de travail mis en place par François Baroin doit se réunir chaque semaine. En février, les hypothèses non retenues seront connues, en mars celles retenues. Avec l'objectif de présenter un projet de loi fin avril, début mai au Conseil des ministres, pour un passage en juin au Parlement. Il devra en ressortir, a exprimé le ministre du budget sur iTélé, "une idée simple sur le bouclier" fiscal, "une idée simple sur l'ISF (l'impôt de solidarité sur la fortune, ndlr), son évolution, sa suppression totale ou partielle" et "une idée simple, compréhensible par tous, sur la fiscalité du patrimoine, sur ce nouvel impôt du patrimoine". Car, voilà au moins une chose qui est certaine : "il y aura un nouvel impôt du patrimoine".