Plus de 90 % des Français estiment qu'il est inutile d'assouplir la loi de protection du littoral, votée en 1986, qui serait efficace pour éviter le bétonnage des côtes. Un rapport parlementaire, remis au mois de janvier 2014, préconise pourtant des aménagements dans son application accusée de freiner le développement de certains territoires.
Eviter le bétonnage des côtes françaises et préserver les espaces naturels, telles étaient les missions de la loi Littoral, apparue en 1986. Un contrat qui semble avoir été rempli pour une majorité de Français : 91 % des personnes sondées par l'Ifop pour Sud Ouest Dimanche, pensent qu'il ne faut pas assouplir ses dispositions, même s'ils sont un peu moins nombreux (59 %) à penser que le texte a été réellement efficace. Ce chiffre a progressé de six points, depuis la dernière consultation, réalisée en 2008, mais il reste plus faible chez les habitants les plus proches du littoral (52 % des résidents à moins de 10 km des côtes).
Sensibilité différente selon la proximité des côtes
Cette disparité s'observe également sur la réponse à la question de l'investissement nécessaire à la construction et l'entretien des digues. Les Français "littoraux" estiment que ces dépenses sont nécessaires (à 45 %), ce qui est supérieur à la moyenne nationale (40 %). En effet, beaucoup de personnes interrogées pensent qu'il faudrait laisser la mer reprendre ses droits et possession des espaces. "Une évolution qui s'explique par le contexte général de réduction des déficits publics, dans lequel l'opinion se montre de plus en plus systématiquement réticente à toute nouvelle dépense publique", analyse l'étude.
De la seule préservation de l'environnement au développement durable
Un rapport, remis en janvier dernier par Jean Bizet (sénateur de la Manche) et Odette Herviaux (sénatrice du Morbihan), expliquait pourtant que l'application de la loi Littoral soulevait de nombreuses difficultés. Les élus locaux se plaindraient de l'imprécision de ces dispositions, de l'hétérogénéité de traitement, de problèmes d'articulation avec d'autres textes et d'un "abondant contentieux alimenté par des phénomènes de recours abusifs". Les co-rapporteurs pour la commission du développement durable, s'ils reconnaissent l'effet de préservation des côtes dans un contexte de forte pression foncière, estiment que la loi ne présente pas de vision de développement durable.
Ils plaident pour une décentralisation de l'interprétation du texte et de son application, en la confiant aux élus locaux sous le contrôle du Conseil National de la Mer et des Littoraux. Les deux sénateurs proposent également l'ajustement de règles d'urbanisme, afin de permettre les opérations de densification des hameaux existants (par comblement des dents creuses sans pour autant étendre le périmètre de ces hameaux). Ils envisagent un durcissement du régime des coupures d'urbanisation et l'ajout d'un 3e motif d'extension de la bande littorale "pour les risques naturels liés aux submersions marines". Les deux élus souhaitent que le volet économique de la loi soit renforcé, notamment en introduisant la solidarité financière entre les communes côtières, et en élargissant le panel des interventions du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres. Enfin, ils encouragent l'amélioration des modalités du contrôle administratif et sur la généralisation de l'utilisation de modèles numériques de terrain dans l'élaboration des cartes de submersibilité.