Lors des opérations de consolidation des sols, les ingénieurs disposent de différentes méthodes de suivi dont l'utilisation de tassomètres ou la technique par profilométrie. Laurent Portejoie, ingénieur géotechnicien chez Ginger-CEBTP, nous éclaire sur ces diverses solutions, avec leurs avantages et leurs inconvénients.
Les opérations de consolidation des sols consistent à préparer un terrain avant le lancement de travaux de construction. L'une des solutions les plus employée est celle du pré-chargement, la mise en place de poids sur un terrain (le plus souvent par le biais d'un remblai), afin de le tasser avant réalisation de la construction. "Pour suivre la compression du sol, on utilise généralement des tassomètres qui se présentent sous la forme de cellules enfouies dans les sols sous le remblai de pré-chargement. Elles permettent de suivre l'évolution du sol, par le biais de la mesure d'une différence de pression qui s'exerce entre les cellules situées sous le remblai, et une cellule témoin située en dehors de son emprise", explique Laurent Portejoie, géotechnicien pour Ginger-CEBTP. "L'autre option est d'effectuer un suivi profilométrique : il ne s'agit plus de cellules ponctuelles, mais d'un tube guide continue mis en place dans une tranchée sous le remblai avant sa mise en œuvre. On peut alors obtenir une mesure continue des tassements engendrés par le remblai de pré-chargement", poursuit l'ingénieur.
Tassométrie ou profilométrie ?
Cette seconde méthode a l'avantage d'une précision plus pointue dans la mesure des tassements. Mais sa problématique réside dans le fait qu'il est impossible de les identifier sur un seul linéaire par dispositif installé - il faudra alors installer plusieurs dispositifs sur un même site, ce qui au final sera plus lourd et plus coûteux. "D'autant que les tassomètres sont plus faciles à mettre en œuvre, la zone de test pouvant être plus étendue, avec une géométrie plus complexe, que pour la méthode profilométrique", nous confie Laurent Portejoie. Plus d'une dizaine de boules tassométriques peuvent ainsi être disposées sous le remblai afin d'en suivre l'évolution dans le temps. "Il est également possible de suivre le tassement des sols sous le remblai de pré-chargement par d'autres méthode plus rudimentaires (pose de plots au sommet du remblai, ou de plaques métalliques à la base du remblai surmontées de tiges métalliques soudées au fur et à mesure de la montée du remblai). Ces méthodes restent cependant beaucoup plus sujettes aux aléas extérieurs et aux effets parasites qui faussent plus fréquemment les mesures", précise-t-il.
"On peut associer aux solutions de pré-chargement la pose de drains verticaux en particulier dans les terrains argileux, moins perméables que les sols sableux", poursuit le géotechnicien. Cette technique consiste à mettre en œuvre des colonnes de petits diamètres remplis de matériaux granulaires afin d'en accélérer le drainage. Une opération qui permet de gagner du temps en amont du chantier et de se dispenser de techniques d'amélioration des sols (injection souterraine plus coûteuse). "On recommande l'usage de cette méthode là où la construction de fondations profondes serait trop compliquée ou trop coûteuse. Elle permet de recourir plus simplement à un radier - fortement ferraillé - après tassement des sols".
Une opération longue, très en amont du chantier
En tout, les opérations de consolidation peuvent prendre entre plusieurs mois et plusieurs années en fonction de la nature des sols, délais qui ne sont pas toujours compatibles avec la marge de manœuvre des maîtres d'ouvrages. "Mais elles sont difficilement conciliables avec d'autres opérations de chantier : un remblai par exemple, occupe beaucoup plus de place que le bâti qui le remplacera, de l'ordre de trois fois sa surface au sol !", précise Laurent Portejoie. Le pré-chargement doit donc être réalisé très en amont et l'édification du remblai doit être la plus rapide possible, en corrélation avec la capacité portante des sols qui sont chargés, afin que la réaction du sol chargé soit homogène. Mais les difficultés rencontrées sont nombreuses : il est, par exemple, impossible de faire travailler un terrain à proximité de bâtiments, de voiries ou de réseaux déjà existants, sous peine de leur infliger des dommages. "Le terrain doit donc être libre de toute mitoyenneté", nous confie le géotechnicien. "Et les tassomètres de suivi doivent être bien posés et correctement protégés, notamment des engins de chantier qui circulent à proximité et risquent de les dérégler ou de les abîmer". Le pré-chargement concernera principalement les projets à charge importante, comme les immeubles d'une certaine hauteur ou les bâtiments destinés à accueillir des machines industrielles lourdes. Une méthode plus que jamais indispensable, à un moment où les étapes de construction se font toujours plus rapidement et ne laissent pas toujours le temps au sol de s'adapter à la nouvelle charge.