Résultat : si l'on peut parler d'explosion de l'impression 3D, la grande échelle reste encore difficile à atteindre : "Les processus employés actuellement consistent à souder et coller des petits modules in situ qui feront surgir par la suite un bâtiment", souligne Emmanuel Di Giacomo, expert en AEC Autodesk, société d'édition de logiciels de création et de contenu numérique. Et d'ajouter comme exemple : "De nombreuses initiatives sont visibles un peu partout dans le monde, comme en Angleterre où des têtes de poteaux pour des canopées ont été construites via l'impression 3D". Même constat pour les architectes australiens Roland Snooks et Robert Stuart-Smith qui ont présenté une installation en fibre de verre dans leur pays : "Nous mixons des process, et nous allions le numérique et l'impression 3D avec des procédés faits main", soulignent-ils. Le 100% impression 3D, n'est donc pour l'instant pas d'actualité. D'autant plus que certains paramètres ne sont pas encore maîtrisés tels que l'intégration de plusieurs couleurs avec différentes typologies de matériaux.
Nouvelle logique constructive
C'est finalement davantage un changement de mentalité, et plus particulièrement la mise en place d'une nouvelle logique constructive qui est en train de s'opérer, comme le souligne François Brument : "Il faut oublier le fantasme de la maison construite en une fois. A terme, il faut penser la structure comme le gros œuvre et intégrer à celui-ci les canalisations de fluides d'eau et d'électricité, et ce en amont de la conception avec l'ensemble des corps de métier. C'est une vision globale de la construction que l'on doit développer". Un point de vue partagé par l'architecte Philippe Morel qui précise que tout l'enjeu du futur réside dans la recherche structurelle et l'ingénierie. A cela s'ajoutent également les questions économiques : le coût des machines et des matériaux est un paramètre important des années à venir pour démocratiser la solution : "Les fabricants d'imprimantes souhaitent garder la main sur le prix des matières premières utilisées dans les appareils. Actuellement, on recense une vingtaine de procédés différents et à chacun est assimilé une stratégie de solidification bien spécifique de la matière", note François Brument. A titre d'exemple, un volume complet mesurant 4 mètres de long, 1 mètre de haut et 2 m de large coûte environ 27.000 euros.
Enfin, qui dit nouvelles technologies, pense aussi nouvelles manières de travailler. Les acteurs de la construction devront donc intégrer de nouveaux savoir-faire. Si les architectes semblent sur la bonne voie, le procédé misant sur l'automatisation ne risque-t-il pas d'effrayer certains corps de métier, notamment dans l'artisanat, qui pourraient voir d'un mauvais œil cette robotisation ? La question est lancée…