L'OPPBTP a présenté les résultats d'une vaste étude sur les risques des chantiers et la place de la parole dans leur prévention. Une enquête de deux années, menée auprès d'employés de PME, doit permettre de mieux cerner les conduites individuelles et collectives et met en avant le rôle primordial de l'équipe et de son chef. Explications.

Le sujet de la gestion et de la réduction des risques est habituel pour l'OPPBTP (Organisme professionnel de prévention du bâtiment et des travaux publics) mais le traitement est nouveau : une étude sur les "espaces de parole" vient d'être rendue publique permettant de comprendre les conduites des ouvriers face au risque sur leur lieu de travail. Le véritable enjeu était donc d'appréhender l'appropriation des enjeux de sécurité par les équipes de terrain, par le biais d'une enquête concrète auprès des principaux intéressés, ouvriers, compagnons, chefs de travaux, etc. "A l'OPPBTP, nous avons l'habitude de réaliser des études sur les moyens techniques de la prévention mais beaucoup moins sur les déterminants de la mise en œuvre de la prévention", expose Paul Duphil, le secrétaire général de l'organisme. Divers intervenants ont donc été sollicités pour participer à ce travail de recherche, dont les chercheurs en sociologie de l'Ecole Centrale Paris, les préventeurs et médecins du GNMST-BTP ou l'Anact (Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail).

 

Donner la parole aux équipes de terrain
L'étude, achevée au printemps 2013, a finalement nécessité deux ans de travail, dont près de quatre mois de réflexion sur la méthodologie pour définir la démarche et les "objets" de recherche sociologique. "L'objectif n'était cependant pas académique mais utile socialement pour contribuer à produire des connaissances", tient à souligner Patrick Obertelli, un des chercheurs de Centrale Paris. Afin de comprendre et analyser la notion de risque, ainsi que sa perception par les différents salariés selon leur emploi, la parole a été donnée aux professionnels. Jean-François Bergamini, responsable de l'étude pour l'OPPBTP explique : "Sept PME - Firodi, Pagot, GTPR, Pozzi, l'Entreprise Dijonnaise, TBI Sham et Saussine SA - se sont portées volontaires, car leurs chefs d'entreprises étaient sensibilisés et de bonne volonté. Les maçons modulent l'espace et créent le squelette sur lequel tout vient ensuite se greffer. Et la population des maçons est relativement importante". Une situation qui justifie le choix de cette catégorie socio-professionnelle pour la réalisation de cette enquête.

 

Favoriser le dialogue et l'échange des points de vue
Premier constat : il est difficile, pour les ouvriers, compagnons et encadrants, d'échanger et d'avoir une perception identique des risques dans l'entreprise. L'analyse des témoignages recueillis démontre l'importance de l'équipe et de son fonctionnement humain, et particulièrement le rôle déterminant des chefs d'équipes et de chantiers. L'étude met également en avant la nécessité de favoriser le dialogue et l'échange des points de vue. Elle révèle enfin l'établissement systématique de comportements à risque vis-à-vis des intérimaires de façon à "mettre à l'épreuve" tout nouvel arrivant sur un chantier.

 

L'élément humain est donc une composante essentielle de la sécurité : "La prévention est la résultante de trois grandes familles d'action : tout ce qui est solutions techniques, toutes les questions d'organisation et toute la dimension humaine et sociale qui va finalement créer le lien et donner le sens aux dispositions techniques et organisationnelles", conclut Paul Duphil. Hervé Lanouzière, le directeur général de l'Anact, estime, pour sa part, que le travail de parole est "un gisement de bien être pour les travailleurs et de performance pour les entreprises, à coût constant, sans besoin de nouvel investissement en matériel".

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