Les assurances données par le Premier ministre sur le dossier brûlant de la TVA à taux réduit pour les travaux "ne suffisent pas à apaiser les craintes" des artisans, a déclaré Jean Lardin, président de la CAPEB. Si la situation n’a pas évolué d’ici le 31 décembre, les artisans «appliqueront la loi» et factureront leurs prestations à 19,6%.

"On ne peut pas se payer le luxe de rayer d'un trait de plume cette disposition sur la TVA à 5,5% et mettre à mal le seul secteur de l'économie qui fonctionne à peu près" a déclaré Jean Lardin, le président de la Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB).
«Je ne doute pas un seul instant de la bonne fois et de la volonté du gouvernement sur ce dossier, mais des déclarations de ministres, ce n’est pas ce qui manque. Il faut impérativement clarifier la situation car nous sommes dans une situation explosive sur le terrain. Si on a pas d'informations suffisamment claires, suffisamment tôt, financièrement on ne tiendra pas le coup" a-t-il expliqué lors d’une conférence de presse.

La situation de ce dossier est en effet extrêmement confuse pour les professionnels du bâtiment. Rappel des derniers événements : le 25 novembre dernier, à défaut de s’entendre sur une liste commune de produits et services qui pourraient bénéficier d’une TVA à taux réduite, les ministres des Finances des Quinze se sont prononcés pour la prolongation pour deux ans des expériences actuelles, dont en France, un taux de TVA à 5,5% pour les travaux d’entretien-amélioration des logements mis en place fin 1999.
Cette apparente bonne nouvelle ne l’est pas resté longtemps, car la déclaration des Quinze n'est qu'une déclaration de principe, valable uniquement si la Commission européenne fait formellement une proposition dans le même sens.
Or, la Commission européenne - mise à mal sur le pacte de stabilité ou le dossier Alstom - a très rapidement exprimé son refus. La situation est donc bloquée par le commissaire européen au Marché intérieur, Frits Bolkestein qui a indiqué qu'il était prêt, au mieux, à fermer les yeux pendant six mois en ne lançant pas de procédure d'infraction contre les Etats membres qui souhaiteraient maintenir des taux réduits sur ces services.
Prochaine échéance : le 10 décembre prochain, date à laquelle la Commission européenne, doit clarifier sa position sur la demande des ministres des Finances.

Face à ce constat, l’attitude des professionnels diverge, signe de la grande confusion qui règne dans le secteur. Si, aujourd’hui, toutes les organisations professionnelles du bâtiment réclament la pérennisation de cette mesure qui a créé, directement ou indirectement, entre 46.000 et 55.000 emplois, toutes n’ont pas adopté la même situation face à la décision de Bruxelles.
A la Fédération Française du Bâtiment (FFB), on est relativement serein. Son président, Christian Baffy estime qu’en l’état actuel des choses, les professionnels peuvent continuer à établir des devis à 5,5%. La FFB espère tout de même que les choses changent et "qu’un véhicule juridique soit trouvé d'ici le 31 décembre".

La Confédération de l'artisanat et des petites entreprises du bâtiment (CAPEB) a indiqué qu’elle ferait également pression pour la mise en place d’un véhicule juridique qui permettrait d’éviter aux professionnels d’être dans l’illégalité dès l’année prochaine. La confédération a déjà écrit et demandé un rendez-vous avec Francis Mer, ministre de l’Economie et des Finances en ce sens. «Si rien n’est fait, notre profession se trouve dans un vide juridique total» estime Jean Lardin. «Et si aucune décision n'est prise d'ici là, il faudra bien appliquer la loi à compter du 1er janvier» poursuit-il en faisant référence à un taux plein de 19,6%.

La CAPEB - qui, dès 1996, a été à l’initiative d’une TVA à taux réduit dans le bâtiment - a donc décidé de repartir au front. 400.000 cartes lettres avaient déjà été éditées par la confédération et distribuées à ses adhérents afin de convaincre M. Trémonti, président de l’Ecofin, du danger d’un retour en arrière. Pour convaincre la Commission, Jean Lardin promet une série de nouvelles actions dont la première se fera par l’intermédiaire d’une pleine page de publicité, dans le Figaro de mercredi et Le Monde de jeudi.

Les arguments des professionnels en faveur d’un maintien d’un taux de TVA à 5,5% ne manquent pas. Selon la CAPEB, la baisse de la TVA a été répercutée à hauteur de 75% sous forme de baisse des prix directement profitable au consommateur. Les travaux à réaliser étant moins chers, les commandes ont augmenté et les professionnels estiment que le surcroît de chiffre d’affaires engendré par la mesure se situe entre 1,3 et 1,5 milliards d’euros par an. Le nombre d’emplois créés, directement ou indirectement, est compris entre 46.000 et 55.000 selon les méthodes d’estimation utilisées. Rapporté à l’Europe, le nombre d’emplois en jeu est de 250.000. Un bon nombre de ces emplois provient d’ailleurs de la réorientation du travail au noir dans l’économie officielle.

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