SÛRETÉ. Le secrétaire d'Etat à la Transition écologique et solidaire Sébastien Lecornu a visité le siège et les laboratoires de l'IRSN, organisme public expert des risques liés aux rayonnements ionisants. Il a notamment découvert le laboratoire Lutèce chargé de mener des tests sur les solutions de confinement des déchets nucléaires. Détails.
C'est une visite chargée d'actualité pour Sébastien Lecornu, secrétaire d'Etat auprès du ministre de la Transition écologique et solidaire, à l'Institut de Radioprotection et de Sûreté nucléaire (IRSN) : pas moins de trois sujets ont en effet été évoqués ce jeudi 15 mars 2018 à Fontenay-aux-Roses (Hauts-de-Seine). L'intéressé explique : "Tout d'abord le projet Cigéo à Bure, mené par l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs, pour lequel un débat scientifique contradictoire doit être mené et dont les tests et expertises sont menés ici même. Ensuite pour Fessenheim également, pour qui se pose la question de la fin de vie et du démantèlement. Enfin pour la sûreté des autres centrales françaises et la sécurité de leurs installations face à différentes menaces".
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Des experts au service du public
Dans ces trois cas, l'IRSN apporte son expertise aux autorités, qu'il s'agisse de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), d'exploitants d'installations comme EDF ou Orano (ex-Areva) ou des services de l'Etat lui-même. Jean-Christophe Niel, le directeur général de l'Institut, rappelle : "L'IRSN c'est l'expert public du risque radiologique et nucléaire. Il a deux exigences : la sûreté et la sécurité des personnes et de l'environnement, et la participation au débat sur les déchets nucléaires". L'établissement rend ainsi 850 avis par an et consacre 40 % de son budget à la recherche pure, qu'il s'agisse de simulateurs numériques du comportement des réacteurs en situation d'incident, ou de laboratoires d'analyse pointus.
Sur ce dernier point, se trouve à Fontenay-aux-Roses "Lutèce", le "Laboratoire unifié d'expérimentation et de caractérisation", une plateforme capable de mener des analyses qui viendront en soutien des programmes de stockage géologique profond des déchets radioactifs. Les scientifiques y travaillent notamment sur les phénomènes susceptibles d'affecter les galeries qui seront creusées pour accueillir les colis de déchets à Bure (Champagne), qu'ils soient d'ordre hydromécanique ou physico-chimiques. Des recherches sont notamment menées sur des phénomènes d'interactions entre l'argilite - le minéral qui constitue la couche géologique choisie pour entreposer les matériaux de haute activité et longue durée de vie - et différents matériaux de construction comme le béton ou l'acier. Les tests sont menés grâce à des échantillons prélevés à Bure ou à la station expérimentale de Tournemire (Aveyron), où les compositions des sous-sols sont proches. Les chercheurs modélisent également le transport des radionucléides dans le sol, afin d'éviter toute contamination. Leur travail de diffusion du fer dans la roche alentour, sur une période d'une dizaine d'années, a déjà permis de déterminer que la présence d'oxygène dans les alvéoles était préjudiciable au confinement. D'où la modification des alvéoles afin de le limiter au moment du scellement. Des essais mécaniques permettent également de vérifier les capacités de résistance du bouchon, selon le matériau utilisé, y compris de la bentonite, une argile colloïdale.
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Concernant Fessenheim, l'IRSN apportera ses connaissances sur les questions de fin de vie d'une installation nucléaire. Le secrétaire d'Etat précise que le démantèlement du site prendra, au minimum, 20 ans, dont 5 années où le combustible nucléaire restera en place même si le réacteur ne produit plus d'électricité puis 15 années de chantier à proprement parler. Sébastien Lecornu ajoute : "Il y a des savoir-faire à acquérir, un retour d'expérience à rédiger pour la suite". Car ce démantèlement concernera plusieurs réacteurs dans les années qui viennent, dont Chooz A, Fessenheim et un ensemble d'autres unités dont la liste reste encore floue. Interrogé sur le sujet, le secrétaire d'Etat répond : "Cette liste fera l'objet d'échanges avec EDF et prendra en compte des critères techniques, fournis par l'IRSN et l'ASN, et des critères socio-économiques. La Programmation pluriannuelle de l'énergie, qui sera un gros décret, ne ciblera peut-être pas précisément des réacteurs mais donnera juste un volume global en MW à atteindre". Rappelons que Nicolas Hulot, ministre de la Transition écologique et solidaire, souhaite ramener la part du nucléaire de 75 à 50 % dans le mix électrique français "dans des délais raisonnables". En juillet 2017, il avait évoqué un ensemble de 17 réacteurs qui pourraient être fermés dans les huit années à venir, nombre qui n'a plus été mentionné depuis.