AMÉNAGEMENT. Au lendemain de la clôture de l'enquête publique préalable à la délivrance du permis de construire pour la transformation de la Gare du Nord, le projet de mutation suscite toujours des inquiétudes au delà du pourtour parisien. Dans des contributions à l'enquête publique, l'établissement Plaine Commune (93) et le département du Val d'Oise émettent quelques réserves.
Alors que l'enquête publique sur la transformation du Gare du Nord se clôturait le 8 janvier 2020 à 17 heures, la polémique et les inquiétudes sur le projet de mutation sont loin d'être taries.
La polémique, d'abord, a resurgi du côté de la Ville de Paris, qui publiait deux jours plus tôt deux rapports d'expertise qui se sont montrés particulièrement critiques à l'égard du projet de réaménagement imaginé par les architectes Valode et Pistre. "Le projet tel qu'il est envisagé par Stationord (...) pose des problèmes majeurs", lançait ainsi la municipalité parisienne, s'appuyant sur le document émis par des urbanistes de renom - Anne-Mie Depuydt, Jean-Louis Subileau, Pierre Veltz- et par des experts du groupe SMA.
Les réticences sont ainsi justifiées pour des raisons "de congestion à l'intérieur et à l'extérieur de la gare, de sécurité des voyageurs, de sur-densification du quartier, de programmation commerciale inadaptée, et de détérioration des conditions pour les voyageurs du quotidien". Cette dernière crainte irradie au delà des frontières parisiennes, jusqu'au département du Val d'Oise, traversé par la branche nord du RER D et la ligne H du Transilien avant de transiter par la Gare du Nord.
Des délais tenables ?
Dans un avis adopté le 7 janvier 2020 et joint au registre de l'enquête publique nécessaire à la signature du permis de construire, le département du 95 présidé par Marie-Christine Cavecchi liste ses craintes sur l'impact de la transformation de la Gare du Nord. Elle s'interroge notamment sur le maintien, voire l'amélioration des liaisons entre les quais desservant le Transilien, et les salles d'échanges, le hall de départ grandes lignes, la ligne 2 du métro ainsi que la gare routière donnant accès au réseau de bus.
Le Val d'Oise met également en garde contre les répercussions des futurs travaux sur le trafic ferré. Entre 2020 et 2024, "un grand nombre de travaux sera réalisé sur le faisceau SNCF nord (CDG express, RER B...). Dans ce contexte, à quelle condition le planning pour le projet Gare du Nord 2024 est-il tenable ? Quel impact en cas de dérapage de calendrier d'autres projets de l'Axe Nord ?", interroge le département dans son avis.
Une question que pose à son tour l'Etablissement public territorial "Plaine Commune", qui accueillera le futur village des athlètes et la piscine olympique aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024. Au-delà du confort de ses habitants pour voyager au sein du réseau francilien, le territoire de Seine-Saint-Denis estime être impacté à bien d'autres égards par le projet de transformation de la Gare du Nord.
"Cannibalisation commerciale et culturelle"
Réuni en bureau territorial le 8 janvier 2020, Plaine Commune a indiqué que la copie de Stationord était "très insatisfaisante" quant à la priorisation des usagers des quotidien pour organiser les circulations futures. Alors que la programmation commerciale de la future Gare du Nord fait particulièrement grincer des dents, Plaine Commune y voit un "phénomène de cannibalisation" , craignant que ces aménagements ne grignotent l'attractivité de pôles commerciaux sur son propre territoire, à une dizaine de minutes de l'infrastructure ferroviaire.
L'EPT relève de même que la programmation culturelle (qui devrait s'étendre sur 10.000 m² consacrés aux loisirs et aux sports) délégitimerait la vision d'un "Grand Paris de la culture", qui rééquilibrerait les territoires par la complémentarité de projets. En conclusion, "le peu de cas fait aux déplacements du quotidien entre Paris et les territoires nord francilien et la cannibalisation commerciale et culturelle (...) vont à l'encontre de la construction d'une métropole polycentrique et solidaire", fustige Plaine Commune.
Après la clôture hier après-midi du registre de contributions, la commission d'enquête aura un à deux mois pour rendre son rapport assorti d'un avis argumenté sur le projet de transformation de la Gare du Nord, dont le sort sera définitivement tranché par le préfet de la région Ile-de-France, Michel Cadot, à qui il revient de signer le permis de construire.