IMMOBILIER DE LUXE. Les professionnels du secteur de l'immobilier de prestige se sont rassemblés ce 21 juin au palace parisien Peninsula pour dresser le bilan de l'année 2017 et esquisser les perspectives pour 2018. L'élection d'Emmanuel Macron, entraînant une politique fiscale plus "bienveillante" qu'auparavant envers les plus aisés, assure à ce marché de niche une reprise et des opportunités prometteuses.
L'immobilier haut de gamme a de beaux jours devant lui. Lux-Résidence.com, site Internet d'annonces immobilières haut de gamme, a réalisé en mai dernier une étude intitulée "Tendances et prévisions" portant sur ce marché de niche que sont les résidences de prestige. Dévoilée lors d'une table ronde organisée sur le thème "Perceptions et réalités du marché de l'immobilier de prestige en France", cette étude permet de tirer plusieurs enseignements, auxquels s'ajoutent les analyses de groupes immobiliers spécialisés dans les biens de luxe. Lux-Résidence.com tente ainsi de décrypter la perception des acquéreurs fortunés, sachant que l'étude se fonde sur un échantillon de 134 porteurs de projets d'achats d'un bien de prestige d'ici à 2 ans.
Une population plus jeune, ultra-aisée, souvent parisienne et multi-propriétaire
Les principales tendances ressortant de cette étude montrent un léger rajeunissement des acheteurs : 71% sont âgés de 35 à 64 ans, et la proportion des plus de 65 ans baisse de manière significative, puisqu'ils ne représentent plus que 25% de cette population. Ce rajeunissement s'accompagne en outre d'une baisse des revenus annuels des acquéreurs, étant donné que "seulement" 21% d'entre eux disposent d'un niveau de revenus annuels nets supérieurs à 200.000 €. 66% de ces acheteurs fortunés sont des actifs et majoritairement des catégories socio-professionnelles ultra-aisées (dites "CSP++"), avec dans le détail une proportion de 41% de cadres/professions intellectuelles supérieures/professions libérales, de 25% de chefs d'entreprises/artisans/commerçants, et de 24% de retraités. Côté géographie, 59% des futurs acquéreurs affirment résider en France, contre 25% à l'étranger. Parmi ceux habitant dans l'Hexagone, 41% vivent en région parisienne, 35% résident dans le Sud-Est, 10% dans le Nord-Est, 9% dans le Nord et 5% dans le Sud-Ouest. Enfin, dernier chiffre notable : 54% des futurs acheteurs déclarent déjà posséder entre 2 et 5 biens dans leur patrimoine.
Les propriétés/villas en bord de mer ont la cote
La suite du baromètre de Lux-Résidence.com s'intéresse aux types de biens immobiliers recherchés par cette clientèle aisée. 56% des porteurs de projets interrogés affirment être à la recherche d'une nouvelle résidence principale, contre 26% pour les résidences secondaires. 1 futur acquéreur sur 2 déclare orienter ses recherches vers des biens estimés à moins d'1,5 million d'euros, 22% recherchent un bien entre 1,5 et 2,5 millions, et tout de même 8% envisagent un projet d'investissement au-delà de 7 millions d'euros. Au niveau des types de biens prospectés, 56% des acheteurs recherchent une propriété/villa, 15% un appartement, et 13% un château/manoir. 46% privilégieraient le bord de mer, 25% la campagne, 21% le milieu urbain, et 10% la montagne (Megève, Courchevel, Méribel…). S'agissant des régions ciblées, la Côte d'Azur (Saint-Tropez, Cannes…) arrive en première position avec 32% des souhaits, suivie par la Provence à 23%, puis Paris et sa région à 13%. La Côté Atlantique (Nantes, île de Ré, Bordeaux, Arcachon, Biarritz…) enregistre une progression par rapport à 2017, atteignant elle aussi les 13%.
L'environnement, le bâti, l'architecture et la vue en ligne de mire
Mais quels sont les critères considérés comme essentiels par les futurs acquéreurs d'un bien immobilier de prestige ? 59% déclarent accorder une grande importance à l'environnement privilégié de la résidence, tandis que 56% misent sur la qualité du bâti et de l'architecture, et que 55% tablent sur la vue offerte par la propriété. Quant au contexte politique, économique et fiscal, 46% estiment que c'est actuellement le bon moment pour acheter un bien immobilier de luxe en France, et 81% sont confiants quant à l'aboutissement de leurs projets. Cependant, bien que 40% penchent pour une stabilisation du contexte économique en France dans les 6 prochains mois, ils sont tout de même 28% à parier sur une dégradation de la situation. "La reprise est générale. Nos clients considèrent que c'est le bon moment pour réinvestir dans la pierre de luxe", assure Laurent Demeure, de Coldwell Banker France et Monaco. "On constate également le retour en force des acquéreurs internationaux. Dans le même registre, le Brexit provoque le retour des résidents français dans l'Hexagone, mais aussi des Britanniques qui souhaitent désormais s'installer à Paris."
Des constats très partagés sur la politique de Macron
Lux-Résidence.com a par ailleurs interrogé les clients fortunés sur leur ressenti de la politique mise en place par Emmanuel Macron depuis son élection en mai 2017 : 40% ont le sentiment que le nouveau président de la République n'améliore en rien l'attractivité de la France, contre 36% qui pensent que oui. Dans le même ordre d'idées, le site spécialisé a demandé à ces mêmes futurs acquéreurs l'impact de la transformation de l'ISF (impôt sur la fortune) en IFI (impôt sur la fortune immobilière) sur leurs projets d'investissements : 53% considèrent que l'IFI n'aura pas d'influence sur leurs décisions, contre 43% qui affirment le contraire. On le voit, les constats relatifs à la politique économique et fiscale du nouveau gouvernement sont donc très partagés au sein de cette population ultra-aisée. "Le contexte économique actuel est tout de même globalement favorable pour l'immobilier", relève Paulo Fernandes, de Sotheby's International Realty France et Monaco. "D'une part, les taux d'intérêt restent extrêmement bas - bien que cette situation ne va certainement pas durer, et d'autre part la demande reste encore raisonnable. Tout cela doit permettre au marché de prestige de conserver une croissance soutenue."
La France, 3ème pays le plus attractif pour la pierre de luxe
Il n'en demeure pas moins que la France conserve son statut de valeur sûre pour l'achat d'un bien immobilier haut de gamme : l'Hexagone figure en effet à la 3ème place du classement des pays les plus attractifs sur ce marché de niche, derrière le Portugal (1er) et l'Espagne (2ème). Le reste du classement se compose comme suit : les Etats-Unis sont 4ème, l'Italie 5ème, la Suisse 6ème, l'Angleterre 7ème, Monaco 8ème, Singapour 9ème, les Emirats Arabes-Unis 10ème, Hong-Kong 11ème et les Bahamas 12ème. Ceci dit, comment expliquer que la France reste aussi attractive ? "La confiance de notre clientèle est revenue depuis l'arrivée de Macron au pouvoir, sa politique étant résolument tournée vers une facilitation des affaires ainsi qu'une fiscalité moins lourde en direction de nos clients", explique Thibault de Saint-Vincent, de l'agence Barnes. Alexis Caquet, de l'agence Vaneau, complète cette analyse : "En fait, depuis 2016-2017, le marché français a tendance à s'aligner sur les marchés internationaux, alors qu'il était auparavant plutôt à contre-cycle. De plus, on observe que les acheteurs nationaux se réapproprient leurs marchés respectifs : un Français va acheter en France, un Américain aux Etats-Unis, etc". Le marché français de l'immobilier de prestige retrouve donc un nouveau souffle, et l'ensemble des acteurs sont confiants sur l'évolution de la situation. Inès Fonteneau, de l'agence Daniel Féau : "Le deuxième trimestre 2018 s'inscrit donc dans un cycle dynamique. La tendance est à la hausse, et les prix s'ajusteront probablement d'ici 2019. Malgré tout, au niveau du marché parisien, les prix montent, et l'insuffisance de l'offre face à l'augmentation de la demande fait que les acquéreurs restent vigilants au niveau des prix".
Focus sur Paris
Et qu'en est-il de la capitale française ? Selon les spécialistes, les prix restent élevés et ont même tendance à augmenter rive gauche. La rive droite n'est pas en reste, puisqu'elle enregistre une hausse des ventes, principalement dans les quartiers du parc Monceau, de l'avenue Montaigne et du bois de Boulogne. Cependant, le centre de Paris, et particulièrement le IXème arrondissement, sont en train de devenir des marchés de report, autrement dit des quartiers où les acquéreurs n'ayant pas trouvé leur bonheur dans les zones habituellement prisées vont chercher à acheter. Dans certains quartiers, la demande est même tellement forte qu'on observe une pénurie d'appartements, comme dans le Marais. Plus largement, les spécialistes notent un engouement pour les arrondissements plus vivants, à l'ambiance plus "village", c'est-à-dire des quartiers qui comptent beaucoup de commerces et d'activités. Ainsi, le IXème et le XVIIIème connaissent une belle attractivité, au détriment de zones ultra-résidentielles, et sans doute trop calmes, comme le XVIème. Quant à la palme du quartier le plus cher, elle revient à Saint-Germain-des-Prés, même si le Marais arrive aujourd'hui ex aequo. Concernant la typologie de la clientèle, celle-ci reste surtout française, mais les Américains font néanmoins une percée importante.