DEBAT. La formation des jeunes et moins jeunes aux métiers du patrimoine était au centre des premières Assises franciliennes du patrimoine. Pour les professionnels de l'éducation, de la formation et du patrimoine, la solution est toujours la même: donner davantage de visibilité et mettre fin au cliché "de la voie de relégation".
"Où en sommes nous sur la formation des jeunes à nos métiers ? Pour l'heure, ce n'est pas brillant", s'est agacé Frédéric Létoffé, co-président du Groupement des entreprises de restauration des monuments historiques, lors d'une table-ronde consacrée à la formation dans les métiers du patrimoine, ce vendredi 13 septembre. Faute d'attractivité, certains savoir-faire peinent à se transmettre, quand ils ne disparaissent tout simplement pas. Selon le co-président du GMH, "les métiers de la couverture, de la charpente ou de la taille de pierre sont à la peine, on ne forme même plus aux métiers du plâtre".
Un paradoxe dans la région Ile-de-France avec "l'extrême richesse et diversité de son patrimoine, et une réponse très optimiste en terme d'encadrement et de recherche", pointe Gilles Pécout, recteur de la région académique d'Ile-de-France. "On dit souvent qu'il y a des métiers sans jeunes et des jeunes sans métier", philosophe Marc Jarousseau, délégué régional des Compagnons du devoir pour l'Ile-de-France et les Hauts-de-France, qui met en avant la difficulté de canaliser les orientations vers des métiers avec peu de débouchés, quand d'autres ont un besoin accru de recrutement.
Sensibiliser les familles
Pour les acteurs de l'éducation et de la formation, il faut cesser d'opposer enseignement généraliste et professionnel. Un combat qui se mène dès le collège, en commençant par les élèves, premiers concernés, leurs enseignants et surtout leurs parents. Proviseur du lycée Hector-Guimard dans le 19e arrondissement de Paris, Christophe Laborde estime qu'il "faut faire connaître ces métiers, les dédramatiser et montrer que ce n'est pas une voie de relégation". Une sensibilisation plus facile à mener auprès des enseignants que des familles, qu'il "faut rassurer sur le climat scolaire, sur la qualité des enseignements et la fluidité des parcours".
Dans l'attente de ce changement de mentalités, les intervenants fondent tous leurs espoirs sur l'ouverture future de deux campus d'excellence, aux Gobelins et à Versailles, qui prévoient un pôle de formation aux métiers du patrimoine bâti. Le second, censé ouvrir en 2022 dans les Grandes écuries du château de Versailles, "doit favoriser la transmission des savoirs et savoir-faire, accompagner les filières vers la transition écologique et numérique" tout en faisant du domaine royal "le grand terrain d'apprentissage pour les jeunes", explique Charline Avenel, rectrice de l'Académie de Versailles.
Si l'électrochoc de Notre-Dame pourrait changer la donne, le domaine du patrimoine est en quête de sens, de visibilité et de transversalité. Et des catastrophes patrimoniales ne doivent pas faire oublier ces critères, car "il ne faut pas oublier qu'il faut dix années pour former une main d'oeuvre hautement qualifiée", juge Frédéric Létoffé.