RÉSEAUX. L'explosion de gaz survenue le 12 janvier rue de Trévise, dans le IXe arrondissement de Paris, est-elle symptomatique d'un réseau souffrant de sous-investissements, ou au contraire d'un accident isolé ? Batiactu fait le point avec Gilles de Bagneux, membre du conseil d'administration des Canalisateurs.

Le samedi 12 janvier, une explosion de gaz provoquait le chaos rue de Trévise, dans le IXe arrondissement de Paris. Le bilan s'est avéré lourd, avec 4 morts et une cinquantaine de blessés, sans oublier une centaine de riverains à reloger et des entreprises sinistrées. Mais au-delà des conséquences, un tel sinistre résulte-t-il d'un manque d'investissements dans la maintenance des réseaux ? Ou est-ce malheureusement un cas isolé ? Batiactu s'est entretenu avec Gilles de Bagneux, membre du conseil d'administration des Canalisateurs, organisation professionnelle membre de la Fédération nationale des travaux publics (FNTP).

 

Batiactu : Suite au drame de la rue de Trévise, certains responsables politiques ont dénoncé la vétusté du réseau de gaz parisien. Pour autant, GRDF a répondu que les investissements en termes de maintenance étaient bien au rendez-vous. Quelle est votre analyse ?

 

Gilles de Bagneux :
GRDF, qui est le concessionnaire du réseau, est effectivement enclin à une grande sécurité. Les DT et DICT, respectivement les Déclarations de projets de travaux et les Déclarations d'intention de commencement de travaux, sont des procédures administratives obligatoires pour le maître d'ouvrage en amont des chantiers à proximité de réseaux et de canalisations enterrées, de manière à savoir ce qui se trouve dans les sous-sols. Les plans imprécis constituent d'ailleurs la principale cause de ce type d'accident. Mais d'une manière générale, il y a eu énormément de travail de fait, et les statistiques d'accidents ont très nettement diminué depuis quelques années. Du point de vue de l'entretien, les équipes de GRDF ne prennent pas les choses à la légère : à l'échelle de l'Ile-de-France, il y a eu environ 50 millions d'euros d'investissements, pour une quarantaine de kilomètres de réseaux renouvelés. Après, il est évident que ces réseaux ont été construits il y a très longtemps, et que plusieurs matériaux doivent être changés.

 

Justement, en quoi consistent ces travaux de modernisation du réseau ? Quels sont les nouveaux matériaux employés, et les méthodes auxquelles les équipes ont recours ?

 

G. de B. :
Le polyéthylène est beaucoup employé aujourd'hui, car il s'agit d'un matériau à la durée de vie bien plus importante que l'acier, qui était majoritairement utilisé auparavant. Des problèmes demeurent toutefois, notamment les phénomènes de corrosion sur les tuyaux, qui ne sont pas forcément visibles, ainsi que d'éventuels courants électriques "pirates". S'agissant des travaux, ils sont strictement encadrés sur le plan normatif et les collaborateurs sont certifiés pour leurs interventions. La sécurité des ouvrages et des hommes est prépondérante. Pour vérifier l'état des réseaux et déceler d'éventuelles fuites, les équipes suivent un planning de tournées. Dans toute la France, des techniciens doivent toujours se tenir prêts, 24 heures sur 24, pour intervenir dans les meilleurs délais en cas de problème. Leurs véhicules sont équipés de systèmes de cartographie intégrés, de manière à analyser la présence de particules de méthane. La situation commence à devenir dangereuse lorsqu'une poche de gaz se forme : si sa pression dépasse les 30%, on risque alors l'explosion. Mais globalement, avec les nouvelles DT-DICT, les maîtres d'ouvrage sont extrêmement attentifs.

 

 

L'état du réseau de gaz parisien est-il propre à la capitale, ou est-ce sensiblement la même situation à l'échelle nationale ? Existe-t-il des disparités entre les territoires ?

 

G. de B. :
Il est clair que, du fait de son histoire, les sous-sols de Paris sont un gruyère. Entre les grandes villes et la campagne, la situation est néanmoins différente. Dans les zones rurales, les réseaux sont bien moins denses et beaucoup plus isolés que dans les agglomérations. Mais ce qu'il manque en réalité, c'est une cartographie actualisée des réseaux souterrains. Pour répondre à cette problématique, les maîtres d'ouvrage sont maintenant obligés de passer des marchés d'exécution de repérage des réseaux existants, de manière à définir avant les travaux où se situent les réseaux d'électricité, d'eau, de gaz...

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