Accusée récemment d'être une ville « ringarde », la Grande Motte a contre-attaqué, elle qui s'applique désormais à valoriser l'architecture de Jean Balladur. Ayant reçu le label « Patrimoine du XXe siècle », la station balnéaire se distingue par son originalité, sa modernité et sa qualité de vie. Explications.
Fin juillet, la publicité d'un voyagiste soulevait une vive polémique sur les côtes de la Méditerranée : on y voyait un couple de bourgeois se moquer et ringardiser les communes de Palavas-les-Flots, La Grande Motte et Argelès-sur-Mer. Levée de bouclier du côté des élus, et finalement la publicité est retirée. Stephan Rossignol, maire UMP de La Grande Motte, accusait, dans les colonnes du Figaro (24/07), le voyagiste de « colporter les clichés du passé ». Il vantait ainsi les douze hôtels de sa commune, dont cinq notés quatre étoiles et notait qu'un casino venait d'ouvrir ses portes. « Y aurait-il eu cet investissement si nous étions ringards? », s'interrogeait le maire, très agacé.
Si la commune est visitée chaque année par des dizaines d'étudiants en architecture, et reste très prisée par les cinéastes qui y apprécient ses décors insolites, La Grande Motte souffre, dans l'esprit du grand public, d'une image de station balnéaire bétonnée sans âme. C'est justement ce que réfute l'élu qui veut présenter l'architecture de Jean Balladur et l'art urbain de sa ville, aux nombreux touristes qui y séjournent chaque été. Fort du label « Patrimoine du XXe siècle » attribué par le ministère de la Culture en 2009, le directeur de la station, Jérôme Arnaud, cité dans les colonnes des Echos (04/08), déclare : « Il faut apprendre à regarder cette ville blanche, archétype des audaces de cette époque, avec ses facettes architecturales masculine et féminine, ses entrelacs de sentiers, de passerelles, de placettes, de jardins agrémentés de sculptures (…) ».
La caractéristique de La Grande Motte, ce sont surtout ses immeubles en forme de pyramides. Inspiré après un voyage à Mexico, Jean Balladur décide de reproduire ces silhouettes à La Grande Motte. Pas qu'une simple lubie, il travaille la ligne des bâtiments afin qu'elle s'accorde avec le décor des Cévennes et le Pic Saint Loup en particulier, à l'arrière du paysage. Comme le souligne le site de la ville, l'architecte en chef n'a pas conçu lui-même tous les immeubles de La Grande Motte - pas moins d'une soixantaine d'architectes ont été dirigé par Jean Balladur - mais il a décidé de la forme de tous, en imposant : un plan masse avec l'emprise au sol, le volume et le gabarit pyramidal, en conque de Vénus ou bonnets d'évêques, les types de modénatures pour les façades, les terrasses, le béton et l'enduit blanc. Il s'enquiert également des directions des vents ou des espèces végétales qui poussent dans le sable - car à l'origine, le site n'est qu'une large bande désertique et plate bordée d'une immense plage de sable fin… Des règles fondamentales qui ont garanti, par la suite, l'unité et l'harmonie de la station balnéaire. Dans ces années 60, la ville nouvelle fait aussi figure de ville idéale, comme aiment à les imaginer ses contemporains Le Corbusier ou Oscar Niemeyer.
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