Vingt ans après la résorption des bidonvilles en France, le gouvernement s'attaque à la lutte contre l'habitat insalubre --environ 50.000 logements-- et va mobiliser sur 5 ans 4 milliards de francs d'aides.

"Il faut arrêter de pratiquer la politique de l'autruche, regarder les choses en face et agir d'autant que les outils existent", a indiqué mardi Marie-Noëlle Lienemann, secrétaire d'Etat au Logement, en présentant son plan d'action. Ce projet d'éradication de l'habitat insalubre est chiffré à 10 milliards de francs, dont 4 milliards vont provenir de l'Etat et 6 milliards des propriétaires privés qui seront tenus de faire les travaux de réhabilitation.

La plupart de ces logements "indignes", selon le propre terme de la ministre, se trouvent en effet dans le secteur privé, aux mains de propriétaires peu scrupuleux qualifiés souvent de "marchands de sommeil" vu la mauvaise qualité des logements qu'ils louent à des populations fragiles et peu informées. Les fonds pour améliorer ces logements, les remettre à des normes décentes ou les raser quand ils sont trop dégradés existent en partie, mais ne sont pas suffisamment utilisés car les démarches sont longues, souvent abandonnées par le locataire ou par l'administration qui ne sait pas ou reloger les familles.

La loi SRU (solidarité et renouvellement urbain) votée l'an dernier a permis d'améliorer le dispositif juridique pour obliger le bailleur à faire des travaux, ou autoriser le locataire à refuser de payer son loyer si des travaux ne sont pas réalisés.

Pour la ministre, un logement est qualifié d'insalubre dès lors qu'il menace la santé de ses habitants par des mauvais systèmes d'aération, un taux d'humidité trop élevé ou des matériaux nocifs comme la peinture au plomb (cas de saturnisme)... L'insalubrité est définie par des normes et des arrêtés d'insalubrité sont souvent promulgués, mais peu suivis d'effet. Selon Mme Lienemann, "le problème du relogement est l'obstacle numéro un à la persistance de cet habitat insalubre". Pour surveiller cette question, des observatoires de relogement vont être créés. Les collectivités locales vont être mises davantage à contribution, quand les propriétaires font défaut ou sont incapables de reloger leurs locataires.

La ministre a souligné qu'il était très difficile de recenser le parc de logements insalubres mais il peut être évalué à 50.000. Les poches d'insalubrité majeures se situent dans 11 départements: Gard, Hérault, Bouches-du-Rhône, Nord, Pas-de-Calais, Paris, Rhône, Var, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val-de-Marne. La Seine-Saint-Denis a le triste privilège de concentrer le plus grand nombre de logements insalubres, environ 15.000. Paris n'est pas mieux lotie avec environ 700 immeubles représentant 14.000 logements. Viennent ensuite les départements du Nord et du Pas-de-Calais, où l'on en recense au total 7.000. Dans le sud, la palme revient à Marseille et ses 3.000 logements dégradés.

Pour Mme Lienemann, ce plan d'éradication peut être comparé à celui mis en place entre les années 1970 et 1980 pour supprimer les bidonvilles. A l'époque, il s'agissait de détruire des bidonvilles situés en périphérie urbaine, qui regroupaient de 100.000 à 150.000 logements. Le gouvernement a mis alors dix ans pour les supprimer, indique-t-on au ministère. "Aujourd'hui le travail est plus difficile car les logements insalubres sont disséminés", ajoute-t-on de même source.





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