MARCHÉS PUBLICS. La Fédération française du bâtiment souhaite qu'une pratique particulière de la maîtrise d'ouvrage publique soit formellement interdite : celle des ordres de service sans contrepartie financière, pour des travaux modificatifs ou supplémentaires à zéro euro. Jacques Chanut, le président de la fédération, estime qu'il s'agit d'un "permis de tuer" des entreprises.

C'est une disposition très particulière, qui s'apparente un peu au "fait du Prince", et que la Fédération française du bâtiment (FFB) souhaite voir disparaître. Dans le cadre des marchés publics, un maître d'ouvrage peut décider, en cours de travaux, d'apporter des modifications au projet : changement de programme, réalisation d'équipement complémentaire, modifications techniques différentes d'exécution suite à des sujétions imprévues… Le prix de ces ouvrages supplémentaires doit être fixé au cours de la réalisation du chantier. En cas de conflit sur le montant, et tant qu'un accord définitif n'a pas été trouvé entre le maître d'ouvrage et l'entreprise, il existe une pratique conduisant à valoriser à zéro les décomptes provisoires de l'entreprise relatifs à ces nouveaux ouvrages.

 

Une pratique qui serait courante dans le secteur hospitalier

 

Mais la FFB signale que ces "ordres de service à zéro euro" interviennent même en dehors de tout conflit sur les prix. En d'autres termes, des entreprises du bâtiment reçoivent des ordres de service du maître d'œuvre leur commandant des travaux supplémentaires gratuits. Et ce, bien que cette pratique ne soit pas conforme à l'article 14 de l'arrêté du 8 septembre 2009 sur l'approbation du cahier des clauses administratives générales (CCAG) qui prévoit bien la fixation de prix provisoires, dans l'attente d'un accord sur les prix définitifs. La situation vécue par certaines entreprises est donc pénalisante par rapport à leur trésorerie, puisque le CCAG leur impose également de se "conformer strictement aux ordres de services qui sont notifiés".

 

"Nous demandons la fin de ces ordres de service à zéro où le maître d'ouvrage oblige à faire des travaux supplémentaires. Le seul recours est le tribunal administratif, avec des décisions qui tombent 3 ou 4 ans plus tard. C'est un véritable permis de tuer des entreprises !", assène Jacques Chanut, le président de la FFB. "Dans le cas où l'entreprise refuse de réaliser ces travaux, le maître d'ouvrage passe un nouveau marché avec une société tierce et défalque son montant du marché initial", ajoute-t-il. Plusieurs entreprises en feraient régulièrement les frais, notamment celles travaillant avec le secteur hospitalier. Un plaquiste de la région lyonnaise aurait même été obligé de déposer le bilan suite à une mésaventure du genre. D'où la modification souhaitée par la fédération d'interdiction formelle par un texte réglementaire de cette pratique de réalisation sans contrepartie financière de travaux modificatifs ou supplémentaires.

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