RELANCE. Les deux fédérations ont lancé une nouvelle action de communication commune, passant notamment par la presse quotidienne, à la veille de la présentation du 3e projet de loi de finances rectificative. L'objectif : frapper les esprits pour éviter à tout prix un effondrement de l'activité en 2020.
C'est un peu l'opération de la dernière chance pour le secteur de la construction. Ce 9 juin 2020, dans plusieurs titres de la presse quotidienne nationale (Le Parisien/Aujourd'hui en France, Le Monde, Le Figaro, Les Echos), et le lendemain dans les quotidiens régionaux, la FFB et la FNTP lancent une "opération coup de poing". Un cri d'alarme, directement adressé au président de la République. "Il y a urgence : aider le BTP, c'est sauver l'emploi partout en France", interpellent les deux fédérations.
Cette urgence réside dans plusieurs aspects. Le 10 juin 2020 sera présenté en conseil des ministres le 3e projet de loi de finances rectificative (PLFR3). "A ce stade, plusieurs plans de relance ont été annoncés par le gouvernement, pour le tourisme, l'automobile, l'aéronautique… mais rien pour le secteur de la construction alors que nous faisons partie des secteurs les plus durement frappés par la crise sanitaire", commente une porte-parole de la FNTP, contactée par Batiactu, qui espère ainsi que des mesures puissent être débattues lors du débat parlementaire autour du PLFR3. Il y a quelques semaines, le ministère de l'Économie avait assuré auprès de Batiactu que des mesures spécifiques pour le secteur de la construction allaient être présentées ce 10 juin.
"Risque d'effondrement" à la rentrée
Il était d'autant plus important de frapper fort maintenant pour les fédérations qu'il s'agit sans doute de la dernière occasion qu'elles auront pour limiter la casse sur 2020. En effet, "il existe peu de chance pour qu'un nouveau projet de loi de finances rectificative pour cette année voie le jour. Le débat budgétaire suivant portera sur 2021", souligne la FNTP. Or, si aucune mesure n'est prise dans ce PLFR3, que va-t-il se passer pour les deux derniers trimestres de 2020, s'interroge la fédération. "Nous avons un problème de temporalité."
Un problème d'autant plus grand qu'il existerait un "vrai risque d'effondrement de l'activité à la rentrée, qui sera sans doute plus fort qu'en 2008, alerte la FNTP. Nous avons un problème de demande, tant de la commande publique que privée". Sachant que les carnets de commandes des entreprises de travaux publics représentaient environ 5 mois avant la crise sanitaire, si aucune nouvelle affaire ne rentre, certaines sociétés pourraient ne pas tenir le choc, s'inquiètent les organisations professionnelles.
Conséquences sur l'emploi et la trésorerie
Les conséquences sur l'emploi et la formation pourraient ainsi devenir "dramatiques", alors que la construction représente près de 2 millions d'emplois, répartis sur l'ensemble du territoire. Dans les travaux publics, les dernières données de la fédération montrent d'ailleurs que 20% des entreprises pensaient réduire leurs effectifs cette année. Elles sont également 38% envisagent de baisser leurs effectifs d'apprentis, et même 15% pensent ne plus du tout y avoir recours. Alors même que les TP nourrissaient de fortes ambitions en matière d'emplois et de formation.
C'est sans compter l'impact sur la trésorerie des entreprises, notent les fédérations. "Les surcoûts liés à la mise en sécurité des compagnons sur chantier ne sont que rarement partagés, ce qui fragilise fortement les entreprises du BTP", insistent-elles conjointement. De plus, contrairement à d'autres secteurs, les charges des entreprises ont peu de chance d'être annulées, "elles seront éventuellement étalées sur 36 mois", complète la FNTP, qui insiste aussi sur le fait que les professionnels "sont en train d'épuiser leur trésorerie. Ils n'auront plus de marge de manœuvre en septembre à ce rythme".
"C'est maintenant qu'il faut agir"
Même si la construction pourrait profiter du plan de relance de l'économie, dont l'annonce est prévue pour la rentrée, le secteur estime que "c'est maintenant qu'il faut agir, pour éviter cet effondrement à la rentrée. Attendre le plan de relance, ce serait trop tard".
Les fédérations ne nient pas l'efficacité des premières mesures de soutien. Mais elles réitèrent certaines de leurs demandes, les plus urgentes, estimant que le gouvernement "tergiverse à prendre les dispositions qui s'imposent pour maintenir à flot un secteur essentiel".
L'annulation des charges fait partie des dispositions attendues, pour éviter d'essouffler des trésoreries fragilisées. "Nous demandons l'annulation et non le lissage des reports de charges ce qui est justifié dans un secteur qui a été tout autant impacté par la crise que les secteurs fermés par décision administrative", explique ainsi Jacques Chanut, président de la FFB.
Une autre attente forte porte sur la question des surcoûts. "Le ministre de l'Économie et des Finances a annoncé qu'[elle] serait traitée mais nous n'avons toujours pas de précisions à ce stade. En tout état de cause, nous ne pouvons-nous contenter de demi-mesures", insiste Jacques Chanut.
Stimuler la commande privée et publique
Mais le secteur aimerait aussi voir émerger des mesures pour "stimuler" l'investissement. Du côté de la commande privée, les professionnels évoquent l'élaboration d'un plan massif de rénovation énergétique des bâtiments, ou le retour à une TVA à 5,5% pour l'ensemble des travaux, par exemple.
Concernant la commande publique locale, "qui représente 50% de notre activité, voire plus de 90% pour de nombreuses TPE/PME", rappelle Bruno Cavagné, président de la FNTP, plusieurs pistes peuvent être envisagées, comme l'augmentation du FCTVA. A une autre échelle, le secteur évoque également le relèvement des budgets de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France pour atteindre le scénario 3 de la loi d'orientation des mobilités, ou encore augmentation des budgets consacrés à la gestion de l'eau.