NUCLÉAIRE. Le Conseil d'Etat a annulé le décret sur la fermeture de la centrale alsacienne. Cependant, l'arrêt des deux réacteurs alsaciens aura bien lieu… en 2020-2022. Quant à la construction de nouveaux EPR, le gouvernement pourrait attendre le milieu de la prochaine décennie pour en lancer.
Ce jeudi 25 octobre 2018, le Conseil d'Etat a annulé le décret du 8 avril 2017, pris par Ségolène Royal, juste avant la fin du mandat de François Hollande, qui abrogeait l'autorisation d'exploitation de la centrale nucléaire de Fessenheim (Haut-Rhin). Le texte a été invalidé car il ne répondait pas à une demande préalable d'EDF de mettre à l'arrêt définitivement ses installations. Un vice de procédure qui ne remettra toutefois pas en cause l'extinction des deux réacteurs, souhaitée par le gouvernement qui prépare activement la région à l'après-nucléaire. François de Rugy, ministre de la Transition écologique et solidaire a réagi : "Le processus de fermeture de la centrale de Fessenheim est enclenché de façon irréversible et se poursuivra pour aboutir d'ici à 2022. Un nouveau décret sera pris en temps utile".
à lire aussi
De son côté, EDF a annoncé à l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN) qu'il renonçait à exploiter l'usine après les réexamens périodiques prévus en septembre 2020 pour le réacteur numéro 1 et août 2022 pour le numéro 2. Les travaux nécessaires à un prolongement de leur durée de vie jusqu'à 50 ans ne seront donc pas entrepris par l'électricien national. Cet arrêt de la centrale alsacienne devrait donc intervenir bien après l'entrée en service de l'EPR de Flamanville, et près de 10 ans après la promesse faite par François Hollande. Quant aux autres arrêts de centrales, EDF s'orienterait vers un calendrier échelonné entre 2029 et 2035.
D'ici à 2021, la filière nucléaire devra démontrer l'intérêt de construire d'autres réacteurs
à lire aussi
D'autre part, bien loin d'engager la France sur la voie de sortie de l'atome, le gouvernement se laisserait également une porte ouverte à la construction de nouveaux réacteurs type EPR ou "EPR simplifiés" au cours de la prochaine décennie. Une décision pourrait être prise entre 2021 et 2025, selon un document de travail de la PPE, évoqué par Le Figaro. L'exécutif donnerait le temps à la filière nucléaire de mettre sur pied un programme industriel garantissant que les futures centrales seraient économiquement maîtrisées et pertinentes. Car, pour l'heure, les programmes de construction de réacteurs EPR ne sont pas vraiment exemplaires sur ce point : en Finlande et en France, les chantiers ont entre huit et dix ans de retard et ont vu leurs coûts multipliés par trois en moyenne… EDF travaillerait donc sur des modèles plus simples à produire, et donc moins chers, en visant un coût de 60 à 70 €/MWh produit, une fourchette de prix qui rendrait l'électronucléaire aussi compétitif que l'éolien offshore flottant. Bruno Le Maire, ministre de l'Economie, interrogé à l'époque du rapport préconisant la construction de six EPR supplémentaires à partir de 2025, avait répondu : "La sagesse recommande déjà d'attendre que l'EPR de Flamanville soit achevé". Son alter-ego de la Transition écologique et solidaire, cité par Le Figaro, aurait lui aussi déclaré : "Il faudrait déjà qu'EDF fasse la démonstration que l'EPR fonctionne, ce qui n'est pas encore le cas". Wait and see.