Plusieurs fédérations tirent la sonnette d'alarme et interpellent la ministre de la Culture, Aurélie Filippetti, concernant la demande des architectes d'abaisser le seuil du recours à l'architecte à 150 m2. En attente d'une prise de position claire, elles comptent bien faire entendre leurs voix. Explications avec deux d'entre elles.
On le sait : depuis la réforme de la surface de plancher parue le 7 mai 2012, le Conseil National de l'Ordre des architectes réclame haut et fort qu'il souhaite un abaissement du recours obligatoire à l'architecte à 150 m2 (au lieu des 170 m2 actuels). D'ailleurs, l'Unsfa (l'Union Nationale des Syndicats Français d'Architectes) déclarait à l'époque qu'«une diminution du seuil de recours à l'architecte à 150 m² tiendrait compte de la perte de surface générée par la nouvelle surface de plancher». Malgré leur réclamation, leur requête est restée sans suite sous le précédent gouvernement.
Avec le changement de majorité, les architectes ont réitéré leur demande mais des dents commencent à grincer. Plusieurs fédérations, dont celle des dessinateurs * indépendants (FNDI), craignent pour leur profession : «Nous souhaitons que le seuil reste à 170 m2 afin de conserver nos droits», nous explique Philippe Spagnoli, vice-président de la FNDI. Et d'ajouter : «Nous sommes conscients que des architectes sont en difficulté et on ne veut surtout pas les dénigrer, d'autant plus qu'ils nous arrivent de travailler avec eux en sous-traitance mais abaisser de 20 m2 le seuil reviendrait à diminuer notre chiffre d'affaires». Une crainte partagée et portée par la Fédération Française des Artisans Coopérateurs du Bâtiment (FFACB), qui réalise notamment des maisons individuelles clé en main : «Le contexte économique n'est pas florissant. Résultat : s'il y a un surcoût avec la baisse du seuil pour le client, cela risque de freiner l'activité», précise Anne-Marie Becker, secrétaire générale de la FFACB.
En attente d'une position claire…
Ces différentes fédérations s'accordent donc à dire qu'en cette «période difficile où les entreprises sont sensibles aux réformes, il est impensable que pour préserver un salaire honorable d'un côté, on vienne à amputer des marchés de l'autre, au risque de voir fermer des entreprises et de voir encore augmenter le nombre de chômeurs». Et ces entités sont bien décidées à faire entendre leurs voix, c'est pourquoi elles ont envoyé plusieurs courriers au gouvernement afin de clarifier la situation. En outre, une réunion sera organisée le 19 septembre prochain à Paris afin d'évoquer ce sujet qui semble loin de faire consensus et qui pourrait diviser dans les semaines à venir. Car de leur côté, les architectes ne devraient pas en démordre. D'ailleurs, Lionel Carli, président du CNOA nous confiait fin juillet qu'il attendait un décret d'annulation indiquant que «la qualité des paysages français, du bien-vivre, des performances des constructions, n'était pas l'apanage des seuls constructeurs individuels qui construisent pour d'autres et qui profitent d'une dérogation de la Loi de 1977. Les architectes apportent une valeur ajoutée. Nous sommes là et on veut et doit apporter notre savoir-faire». Dorénavant, c'est au gouvernement de trancher. Une chose est sûre : les professionnels du secteur attendent avec impatience une prise de position.
* Le dessinateur intervient sur des avant-projets, permis de construire et en consultation d'entreprise. Pour les maisons individuelles de moins de 170m2 SHON, il exerce une mission de conception de maison individuelle.