Les biogaz provenant des matières fécales humaines représentent une source d'énergie potentielle importante, de l'ordre de 200 à 300 M€ par an. Ils pourraient aisément alimenter des dizaines de millions de foyers dans le monde tout en limitant la déforestation ou le recours au charbon, et en améliorant l'hygiène.
C'est un rapport des Nations Unies qui le dit : les excréments humains sont une source potentielle d'énergie renouvelable très intéressante. En produisant du biogaz à partir de ces matières fécales en décomposition, il serait possible d'obtenir 60 % de méthane dont la valeur pourrait dépasser les 8,7 Mrds € en équivalent gaz naturel, soit de quoi alimenter en électricité 138 millions de foyers.
Selon des estimations faites par les chercheurs de l'Institute for Water, Environment & Health, il serait pertinent de récolter les déjections du milliard de personnes n'ayant pas accès à des toilettes, dont 600 millions se trouvent dans le sous-continent indien. Cette production pourrait générer entre 184 et 345 M€ par an de biogaz, soit de quoi alimenter en électricité de 10 à 18 millions de foyers non reliés aux réseaux de distribution. Le traitement des résidus, séchés et carbonisés, pourrait également fournir une alternative à l'utilisation de charbon dans des chaudières dans des proportions tout aussi importantes : entre 4,8 et 8,5 millions de tonnes pourraient être économisées.
Un double avantage sanitaire et environnemental
La récupération de la matière (fécale) première se ferait au moyen de toilettes ayant l'avantage supplémentaire d'améliorer les conditions de vie et la santé des personnes concernées. Car le manque de sanitaires est responsable de 10 % de toutes les maladies mondiales. Corinne Schuster-Wallace, l'auteure de l'étude, précise : "De plus en plus, les eaux usées sont traitées pour récupérer de l'eau, et notamment étendre les terres agricoles dans des régions arides, et il y aurait de la même manière un potentiel technique, surtout dans les zones rurales et les petites villes, à produire de l'énergie à partir des excréments dans les pays en développement". Un de ses co-auteurs, Chris Metcalfe, de l'université canadienne Trent, renchérit : "Nous recyclons déjà efficacement dans l'agriculture les éléments nutritifs se trouvant dans les excréments et l'urine humains dans de nombreux endroits du monde, mais le potentiel énergétique de ces déchets est largement ignoré à ce jour".
En France, le projet Biovalsan de la communauté urbaine de Strasbourg, permet de valoriser les déchets de la station de traitement des eaux usées en produisant du biogaz alimentant l'équivalent de 5.000 logements. A Stockholm (Suède), c'est la flotte de bus urbains qui est alimentée grâce au gaz issu des boues d'épuration. Deux projets qui démontrent le potentiel énergétique largement exploitable des déjections humaines. D'autres projets sont en cours, notamment à Pékin (Chine) et à Nairobi (Kenya), démontrant l'intérêt grandissant pour… les déjections.