Le dernier panorama de l'électricité renouvelable montre que la part de l'éolien continue de croître en France, avec un record de 1,6 GW de nouvelles installations en douze mois. Toutefois, même à ce rythme, les objectifs fixés ne seront pas atteints. Le Syndicat des énergies renouvelables (SER) organisait ce 16 novembre 2017 les Assises de l'éolien terrestre pour évoquer les moyens d'y parvenir.
Avec 1.627 MW raccordés en un an (+14,5 %), et plus de 12,8 GW de puissance installée, le parc éolien français connaît une belle progression. Durant ces douze dernier mois, cette énergie à couvert environ 4,5 % de la consommation électrique nationale, en dépit de conditions météorologiques défavorables observées à la fin de 2016 et au début de 2017. Jean-Louis Bal, le président du SER, déclare : "Le panorama de l'électricité renouvelable montre de bons chiffres pour l'éolien. Mais ce n'est pas encore suffisant pour atteindre les objectifs de 2020 ou de 2030". Le parc s'établit en effet à 86 % de ce qu'il devrait être en 2018, à la première étape de la Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), et il reste peu de temps pour rattraper le retard.
Libérer le potentiel tout en conciliant la sauvegarde des paysages
Le président du syndicat des renouvelables annonce cependant : "Nous avons bon espoir que cela s'améliore avec les procédures mises en place". La présidente de la commission éolien du SER, Gwenaëlle Huet, ajoute : "Les travaux de simplifications menés ces dernières années nous aident déjà". Cependant, les industriels de la filière souhaitent maintenant que cette énergie s'inscrive pleinement dans la dynamique voulue par le gouvernement et Nicolas Hulot en particulier. "L'important c'est la visibilité sur les trajectoires", insiste-t-elle. Les discussions autour de la deuxième étape de la PPE vont d'ailleurs être entamées, afin que les modalités pratiques soient connues d'ici à la fin de 2018. "Des perspectives longues sont nécessaires pour mieux anticiper", note Gwenaëlle Huet, qui poursuit : "Il faut libérer le potentiel de cette énergie tout en conciliant sauvegarde des paysages et maintien de la qualité de vie". Selon le SER, il serait possible de parvenir à des puissances de 40 GW d'éoliennes terrestres (plus 18 GW offshore) en 2030, si toutes les conditions étaient réunies, ce qui permettrait à la France de s'approvisionner à plus de 20 % grâce au vent.
Cependant, pour atteindre ce niveau, de nombreux aménagements seront à faire. La présidente de la commission éolien identifie deux grands chantiers : tout d'abord, la durée de développement d'un projet, pour l'instant de 7 à 8 ans en moyenne (chiffre pouvant atteindre les 10 ans en raison de recours) qu'il faudra raccourcir. Ensuite, l'amélioration de l'appropriation des projets par les élus et les riverains, au moyen de concertations anticipées afin d'obtenir des projets développés "sur mesure" pour chaque territoire. Le syndicat propose donc un ensemble de mesures allant dans ce sens. "Tout d'abord, une réforme de la répartition de l'IFER (imposition forfaitaire pour les entreprises de réseaux) afin qu'elle soit reversée aux communes où sont implantées les éoliennes", annonce Gwenaëlle Huet. Le maire de Saint-Georges-lès-Bains (Ardèche) s'est notamment exprimé sur cette question des revenus liés à l'implantation d'une ferme éolienne, lors d'une table ronde : "Le loyer revient à la commune. Mais la CVAE (cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises) est reversée à la communauté de communes. La taxe foncière est répartie entre la commune et la communauté de communes. Et pour l'IFER, rien ne va à la commune ? C'est anormal. Il faut que les retombées économiques soient mieux réparties". Certains, comme Cécile Magherini de la Compagnie Nationale du Rhône (CNR), estiment qu'il serait par ailleurs possible de réserver une partie de la production électrique des turbines au bénéfice des communes les accueillant, "à des conditions économiques favorables", à l'image de ce qui est fait dans l'hydroélectricité. "Il y a une réflexion à mener dans ce sens", fait-elle valoir.
Améliorer l'acceptabilité des projets
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Autre proposition du Syndicat, lever des contraintes existantes dans certaines régions, notamment la Bretagne, en relation avec le fonctionnement de radars de l'aviation civile ou de l'Armée de l'air. Le SER estime que seuls 4 % du territoire seraient accessibles à ce jour aux éoliennes, freinant fortement leur implantation alors que la ressource en vent est forte. "C'est un sujet interministériel à régler entre les Transports, la Défense et la Culture pour les aspects de patrimoine…", glisse Gwenaëlle Huet. Revendication récurrente, la question des délais et de coûts de raccordement n'a semble-t-il pas été réglée. Et le SER s'inquiète également du nombre de recours "abusifs" dont les projets sont victimes : "Ils représentent 80 % des recours et sont toujours non circonstanciés", ajoute la spécialiste. Cette opposition de principe contre l'implantation de machines devrait pouvoir être traitée plus rapidement, notamment dans le cas où aucun élément nouveau ne serait apporté au dossier, afin de ramener les délais aux alentours de 4 ans, comme en Allemagne.
Les professionnels de la filière se posent également la question du futur renouvellement des turbines dans les parcs existants. La présidente de la commission éolienne raconte : "Il faudrait penser à un système réglementaire pour ne pas repartir à zéro à chaque fois sur des territoires où des parcs sont déjà implantés". Des dispositions simplifiées pour le remplacement d'une turbine par un modèle récent (et plus performant) pourraient être mises en place. Le SER réclame enfin une modification des règles de balisage lumineux afin de rendre fixes les feux clignotants. Une mesure anecdotiques qui aurait cependant pour intérêt principal de rendre plus acceptables les parcs éoliens dans la nuit noire. Cette acceptabilité passera également par la généralisation des modes de financements participatifs et citoyens, permettant aux riverains de s'approprier une partie des projets et d'en retirer des bénéfices.