REACTIONS. Suite à l'enquête exclusive Batiactu portant sur la perception des marchés publics auprès des professionnels de la construction, qu'ils soient entreprises du BTP ou maîtres d'œuvre, leurs représentant réagissent. Voici les éléments de réponses de Sabine Basili, vice-présidente de la Capeb; Jacques Chanut, président de la FFB et enfin Denis Dessus, vice-président de l'Ordre des architectes.

Batiactu : Quelle est votre réaction face aux réponses apportées par notre enquête ?
Sabine Basili, vice-présidente de la Capeb :

Globalement, les résultats ne nous surprennent pas. Répondre à un marché public nécessite de prendre du temps pour étudier les règles de la consultation et le Cahier des Clauses Administratives Particulières (CCAP), pour vérifier qu'il n'y ait pas d'erreur dans le Cahier des clauses techniques particulières (CCTP) et pour vérifier la cohérence avec le CCTP et les autres pièces, mais aussi pour examiner les clauses financières et le Dossier de consultation des entreprises (DCE) et enfin pour aller à la visite sur site.

 

Après ce temps passé à répondre, l'entreprise n'est même pas certaine d'être attributaire. Et lorsque cela fait plusieurs marchés auxquels l'artisan répond et qu'il n'obtient rien, il se décourage, et on peut le comprendre. Parfois, les entreprises évoquent la notation qui leur est attribuée et y voient un moyen de les écarter au profit d'une entreprise réputée remporter tous les marchés avec le maître d'ouvrage public en question. Les entreprises artisanales ayant une zone de chalandise de 50 km en moyenne, elles ne font pas de recours par crainte d'être "black listées". C'est une autre réalité.

 

"Les entreprises sont dissuadées par le formalisme administratif", Sabine Basili, Capeb

 

Et pour toutes celles qui n'essaient pas d'y aller, la Capeb estime que les entreprises sont dissuadées par le formalisme administratif, le temps à y passer et des règles du jeu à connaître avant de répondre pour se protéger financièrement. En complément, l'écart de connaissance et d'appropriation du guide de la commande publique est significatif. Les entreprises se concentrent sur la remise de leur offre de prix et leur offre technique, et donc moins sur les aspects juridiques et procéduraux. Elles les abordent contraintes et forcées quand il y a litige.

 

Concernant la Loi Sapin II, dans laquelle nous demandions la suppression des offres variables et l'obligation de détection des offres anormalement basses (OAB), ce que nous avons obtenu, les entreprises répondant à un marché public sont dans l'attente de ce qui va changer pour elles au quotidien.

 

"La FFB ne peut pas cautionner le fait que la compétition serait biaisée et le combat perdu d'avance.", Jacques Chanut

 

Jacques Chanut, président de la FFB :

On ne peut pas nier que la réglementation des marchés publics est bien compliquée. A titre d'exemple, les entreprises ne devraient pas avoir à fournir leur acte d'engagement au stade de l'appel d'offres, et ne devraient pas signer les DC 1 (Ndlr : lettre de candidature, habilitation du mandataire par ses cotraitants) et DC 2 (Ndlr : déclaration du candidat individuel ou du membre du groupement). Or, en pratique, nombreux sont encore les maîtres d'ouvrage qui exigent la signature de ces documents et la remise de l'acte d'engagement signé dès le stade de l'offre et non par le seul attributaire pressenti.

 

Par ailleurs, beaucoup d'entreprises n'ont pas encore compris qu'à partir de janvier, elles devront fournir un certificat fiscal daté au plus près de la demande de l'acheteur, et non plus comme avant la réforme celui valable au 31 décembre de l'année précédant le lancement de la consultation.

 

En revanche, la FFB ne peut pas cautionner le fait que la compétition serait biaisée et le combat perdu d'avance. Les acheteurs doivent, en effet, noter les offres des entreprises sur la base de critères objectifs et non discriminatoires. Il peut y avoir une part de subjectivité sur la notation, par exemple du mémoire technique, mais cela ne permet pas d'affirmer que "tout est joué d'avance".

 

Denis Dessus vice-président du Conseil national de l'Ordre des architectes (CNOA):

La complexité de la procédure est un fait avéré, même si la réforme a simplifié un certain nombre d'éléments au stade des candidatures. Le document européen de candidature, (DUME) n'est pas encore prêt, la dématérialisation systématique arrive, il va y avoir encore une phase où ces évolutions vont se traduire par des difficultés d'adaptation. De plus, les marchés publics servent à résoudre des problèmes de société, comme les obligations d'emploi de réinsertion.

 

L'accès au marché est évidemment difficile et la raison en est ni la complexité, ni le manque d'information, mais le manque de commande ! Quand vous avez 200 équipes de maîtrise d'œuvre candidates à une opération, il est clair que 199 vont s'investir pour rien.

 

Concernant le manque d'informations sur les évolutions légales et réglementaires, il faut comprendre que les procédures s'imposent aux prestataires et que ce sont les maîtres d'ouvrage qui doivent être parfaitement au point. Ce n'est pas le cas, et il y a florès de consultations de maîtrise d'œuvre non conformes, voire illégales. Il faut impérativement que soit utilisé le mini-guide de la commande de maîtrise d'œuvre réalisé conjointement par le Ministère de la Culture, l'Ordre des Architectes, la Mission interministérielle pour la qualité des constructions Publiques (MIQCP) et enfin la Fédération nationale des conseils d'architecture, d'urbanisme et de l'environnement (FNCAUE).

 

Découvrez dès la page 2, la suite des réactions de la Capeb, FFB, CNOA et retrouvez les résultats de l'enquête Batiactu sur les marchés publics dévoilés le 22 novembre 2016.


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