RENDEZ-VOUS. Les Assises du logement se sont déroulé ce jeudi 15 novembre, accueillies au sein du palais d'Iéna par le Conseil économique, social et environnemental. Près de 800 inscrits et 50 conférenciers se sont pressés à ce rendez-vous qui a évoqué en long et en large les enjeux du logement du XXIe siècle. Avant de donner la tribune aux multiples acteurs du logement, la première moitié de matinée a permis de décrypter les lois Essoc et Elan, symbole d'une année riche en réformes.

Sous le dôme quadrillé de l'hémicycle du Conseil économique, social et environnemental (CESE), des élus de tous bords, acteurs de l'immobilier, de la construction, de l'architecture ou de l'aménagement sont venus tendre l'oreille aux différentes interventions des Assises du logement. Elles ont, l'une après l'autre, fait valoir les différentes positions en matière de logement. Si les méthodologies et les convictions divergent, peu mettraient en doute l'idée que les enjeux sont de taille, tant en matière de construction que d'accès au logement ou de lutte contre l'habitat indigne. Sur ce dernier point, l'effondrement de deux immeubles survenu le 5 novembre dernier ne fait qu'appuyer le caractère d'urgence.

 

Bousculées par l'actualité, les Assises du logement font néanmoins suite à une "année charnière", émaillée par les lois visant à donner un coup de fouet au secteur du logement. En martelant le leitmotiv de la simplification, les lois Essoc et Elan ont surtout permis une clarification de dispositifs pré-existants et un encouragement encore plus vif de l'innovation dans la construction, quitte à accorder quelque souplesse aux réglementations.

 

Mais à l'image de la marche accélérée de ces deux textes législatifs sujets à des procédures accélérées, les différents acteurs du logement restent interrogatifs quant à certains dispositifs. Beaucoup d'entre eux, estiment, néanmoins, que ce n'est pas encore le grand soir pour le logement.

 

Plaidoyer gouvernemental

 

Pourtant, le gouvernement et le ministère de la Cohésion des territoires veulent convaincre de l'ambition de cette réforme. Dans les premières interventions matinales, les services de l'État en ce sens se sont d'ailleurs essayés à un décryptage des textes législatifs. A l'image de François Adam, directeur de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages (DHUP) qui loue "le texte ambitieux" que représente la loi Elan. Une législation jusque là singulière, par "sa concertation longue et approfondie, technique encore peu fréquente dans le processus", plaide François Adam.

 

 

Et d'évoquer par le menu les nouveautés consacrées par la loi Elan parmi lesquelles la restructuration du logement social "jamais abordée auparavant", la création d'un bail mobilité, la remise en œuvre de l'encadrement des loyers à titre expérimental ou la revitalisation des centres anciens, que le patron de la DHUP décrit comme "l'axe fort" du ministère.

 

Plus petit mais tout aussi puissant, l'article 49 de la loi Essoc est lui aussi perçu comme un changement fondamental dans la pratique constructive, qui permet d'élargir le permis d'expérimenter d'une part, et de réécrire le code de la construction et de l'habitat en vue de sa simplification. Ces deux volets, précisés dans deux ordonnances distinctes, seront regardés de près au cours des prochains mois, notamment le permis d'expérimenter précisé dans une ordonnance publiée le 31 octobre dernier. Car les retours d'expériences de cette nouvelle disposition, qui prévoit de déroger à certaines règles de construction, appuiera la refonte du code de la construction et de l'habitat.

 

Les résultats plutôt que les moyens

 

Sous-directeur de la qualité et du développement durable dans la construction, Emmanuel Acchiardi veut rassurer quant à cet article 49 qui entend "imposer des résultats à atteindre plutôt que des moyens" et "libérer l'acte de construire et susciter l'innovation". Certains acteurs, dont la CSCEE, craignent d'ailleurs que les délais restreints de réécriture du code de la construction ne permettent de tirer les leçons du permis d'expérimenter, et de ses résultats concrets.

 

A cette crainte, Emmanuel Acchiardi répond que les nouvelles dispositions révèleront un acteur nouveau dans le paysage de la construction, incarné par "les organismes attestateurs". Ces derniers seront "de plusieurs types", et pourront inclure "des bureaux d'étude technique qualifiés sur des sujets particuliers, tout comme le Centre scientifique et technique du bâtiment". "Nous serons en tout cas très vigilants face aux retours d'expériences, et tirerons les conséquences qui s'imposeront", assure-t-il là encore, appelant l'audience "à relayer ces dispositions le plus possible auprès des acteurs de la construction".

 

 

Les usagers avant les programmes

 

L'innovation qui est prônée dans ces nouvelles réglementations est pourtant revendiquée par les acteurs de la maîtrise d'ouvrage, notamment quand elle permet de lever certains freins. Le permis d'expérimenter, selon Dominique Sutra del Galy, président de la fédération CINOV, va dans la continuité de la nécessité, aujourd'hui, "d'imaginer des scénarios pour lesquels il faut avoir une approche ouverte et pragmatique". Pour lui, la réalisation des ouvrages doit davantage s'attarder sur "les usagers" et non plus "les programmes".

 

Pour les architectes, et celui qui les représente, en la personne de Denis Dessus, président du Conseil national de l'ordre des architectes, cette même innovation doit avant tout servir l'usager, la qualité et le confort du bâti, notamment suite "au démantèlement de la loi Mop prévue par la loi Elan". "Une innovation n'est qu'accessoire, nuance-t-il, elle n'est pertinente que si elle sert une dimension sociale, patrimoniale, environnementale".

 

La loi Elan étant au seuil de sa promulgation, "il est désormais temps de réfléchir aux modes opératoires pour bien concevoir et bien construire", estime Denis Dessus. Les grandes collectivités pourraient apporter leur patte à cette réflexion, à l'image de chartes de qualités, intégrées aux cahiers des charges de concours architecturaux ou d'appels à projets.

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