L’Association Le Corbusier pour l’église de Firminy-Vert a souhaité apporter son éclairage sur les grandes étapes de maîtrise d’ouvrage et de maîtrises d’œuvre pour réaliser «le dernier chef-d’œuvre de Le Corbusier», et dont les travaux d’achèvement ont été filmés.

L’église Saint-Pierre de Firminy-Vert, José Oubrerie au travers d’une maîtrise d’oeuvre de 47 ans commencée en janvier 1960 comme assistant de Le Corbusier, et un chantier d’achèvement filmé.

Le réalisateur Christian Garrier a eu la bonne idée de filmer les travaux d’achèvement de la célèbre église Saint-Pierre de Firminy conçue par Le Corbusier. À l’occasion de la présentation de ce film qui sera commercialisé à partir de janvier prochain, une conférence s’est tenue jeudi 14 décembre à l’École Nationale Supérieure d’Architecture de Paris-La Villette, animée par José Oubrerie. Architecte et professeur d’architecture aux Etats-Unis, José Oubrerie a été associé tout au long de sa vie professionnelle à la maîtrise d’oeuvre de cette église, qui, troisième contribution de Le Corbusier à l’art sacré contemporain, et bien que posthume, compte aujourd’hui parmi ses oeuvres majeures.

La présentation du film «Carnet de Chantier» de Christian Garrier est l’occasion de revenir sur les grands moments de la conception et de la réalisation de cet ouvrage exceptionnel. À Firminy, proche de Saint-Étienne, c’est en 1958 que ce projet est «commandité» par le maire de l’époque Eugène Claudius Petit à André Sive - emporté par une leucémie fulgurante - puis à Le Corbusier.

Dès la commande passée en janvier 1960, Le Corbusier demande à José Oubrerie de l’assister pour ce projet de l’église Saint-Pierre de Firminy-Vert : il réalisa ainsi les travaux d’études, de maquettes et de mises au point conduits et arbitrés par Le Corbusier jusqu’à sa mort en août 1965.

L’église Saint-Pierre : 47 ans de continuité de maîtrise d’ouvrage et de maîtrise d’œuvre pour réaliser le dernier chef-d’oeuvre de Le Corbusier
À la demande d’Eugène Claudius-Petit dès 1966, puis de l’Association LC pour l’église de Firminy-Vert, José Oubrerie partagea et porta en continu la maîtrise d’oeuvre du projet : il fut tout d’abord associé dès 1968 à Louis Miquel, avec qui il conduisit les phases de construction jusqu’à l’arrêt des travaux, faute de financement, en 1979.
Puis jusqu’à la mort d’Eugène Claudius-Petit en octobre 1989, il participa aux efforts des Amis de Le Corbusier et de l’Association LC pour l’église de Firminy-Vert, notamment aux USA, pour rendre possible l’achèvement de l’édifice.

À partir de 1990, à la demande de l’Association LC pour l’église de Firminy-Vert, il s’associa à Aline Duverger et à Yves Perret, afin d’actualiser le permis de construire et préparer l’instruction du classement monument historique, acquis par l’association en juin 1996 ; Romain Chazalon rejoignit l’équipe à partir de 2000, afin de dresser les plans des travaux d’achèvement.
C’est un édifice inachevé, classé, totalement payé et disposant des études, des concours et des autorisations pour que les travaux de reprise puis d’achèvement soient engagés, que l’Association LC pour l’église de Firminy-Vert céda, en octobre 2002, à Saint-Étienne Métropole.
Par un acte de donation exemplaire, les 800 donateurs privés de l’église Saint-Pierre de Firminy-Vert recensés depuis 1960, ont alors donné à la collectivité publique un chef d’oeuvre reconnu mondialement avant qu’il soit terminé.
Et pour préserver l’intégrité de ce chef-d’oeuvre d’exception conçu par Le Corbusier, l’Association LC pour l’église de Firminy-Vert, le ministère de la Culture et de la Communication, et Saint-Étienne Métropole ont veillé à ce que la continuité de la maîtrise d’oeuvre soit confirmée à José Oubrerie et à son équipe d’architectes stéphanois, pendant cette ultime phase de chantier.
Grâce aux financements qu’elle a réunis, la communauté d’agglomération de Saint-Étienne Métropole a accompli l’achèvement de ce chef-d’oeuvre, qui dès juin 2007, au bout de 47 ans d’efforts, vibrait pleinement de sa double fonction.
«Le travail de l’architecte relève toujours du va-et-vient entre les problèmes de prix et la réalisation du bâti» déclarait jeudi José Oubrerie. Le monument a été récemment labellisé «Patrimoine du 20e siècle» par le ministère de la Culture et de la Communication.

L’église Saint-Pierre : 47 ans d’efforts, 2 périodes de chantier et le meilleur «compagnonnage des technologies et des métiers pour ce chef-d’œuvre contemporain
Pour l’architecte Romain Chazalon, l’un des assistants de José Oubrerie pour l’achèvement, ce qui caractérise cette construction c’est justement «son côté très vivant» et sa modernité. Pendant les deux époques des construction, séparées par plus de vingt ans d’arrêt de chantier, la réalisation de ce chef-d’oeuvre a mobilisé les meilleures compétences et technologies du moment dans chacun des corps de métiers, comme au temps des bâtisseurs de cathédrales.
«Ce qui caractérise ce chantier, c’est qu’il s’agit d’une construction qui respire une forte pensée de l’architecture contemporaine», commente encore Romain Chazalon.

L’église Saint-Pierre : 47 ans d’efforts comme au temps des cathédrales, pour tenir la promesse faite à Le Corbusier de réaliser son dernier chef-d’oeuvre
Si pour les proches de Le Corbusier les débats fut rapidement conclu après sa mort par la décision de créer les associations et la SCI et de réunir les fonds nécessaires pour bâtir l’église, si cette décision conduisit en conséquence dès décembre 1973, La Fondation Le Corbusier à apporter à l’Association LC pour l’église de Firminy-Vert, une contribution de 20 % du devis qu’elle lui présenta alors, la reprise du chantier en 2003 n’a pas été sans soulever de critiques. «Nous avons été confrontés à l’incompréhension de tous ceux qui ont opposé une vision conformiste à notre vision d’architecte» précise encore Romain Chazalon.

L’église Saint-Pierre : clé de voûte de Firminy-Vert et des bâtiments que Le Corbusier y a construits
L’église fait partie d’un ensemble de bâtiments construits par Le Corbusier, notamment le stade, la maison de la Culture et la cinquième Unité d’habitation, qu'il inaugura et dont il posa la première pierre, respectivement, en mai 1965.
Conformément à la commande passée en 1960, le bâtiment se compose de deux parties que Le Corbusier a superposées l’une sur l’autre : la première regroupe les niveaux inférieurs avec des accès de pleins pieds sur la ville, et la seconde, constituée des niveaux supérieurs, accueille l’église Saint-Pierre à laquelle on accède par une rampe extérieure.
En 1990, l’évêque de Saint-Étienne nous a confirmé qu’à l’achèvement du bâtiment, le diocèse accepterait notre don de l’église comme église diocésaine, mais qu’il refuserait celui des niveaux inférieurs destinés initialement à accueillir la Maison paroissiale.
Aussi dès 1992, l’Association LC pour l’église de Firminy-Vert a décidé de substituer à cette fonction de Maison paroissiale désormais sans objet, celle d’un espace muséographique, associé au Musée d’Art Moderne de Saint-Étienne et destiné entre autres à présenter la contribution de Le Corbusier à l’art sacré contemporain.
Le bâtiment continue donc à servir deux missions conjuguées, celle d’accueillir une antenne du Musée d’Art Moderne de Saint-Étienne Métropole dans sa partie inférieure, et celle de porter l’église Saint-Pierre et ses activités cultuelles dans sa partie supérieure.
L’ensemble de ce monument contemporain est aussi prêt chaque jour à accueillir les visiteurs venus du monde entier qui viennent admirer comment Le Corbusier a su de nouveau maîtriser les volumes et les éclairages et créer en ces lieux une intimité et une présence exceptionnelles. La constellation d’Orion, implantée sur la paroi Est de la coque, nous rappelle que, fort de son voyage à Rome et de son voyage en Orient des débuts du 20e siècle, et conseillé entre 1959 et 1965 par les pères dominicains Couturier, l’artiste peintre, Cocagnac et Capellades, les architectes, Le Corbusier dessina dès 1962, la constellation qui viendrait éclairer l’église Saint-Pierre de Firminy-Vert de ses rayons, lesquels balayent aujourd’hui à merveille la coque de leurs arabesques inattendues, au gré du déplacement du soleil.

La passion d’être architecte
Face aux étudiants de Paris-La Villette venus nombreux à sa rencontre, José Oubrerie a abordé sa conception du métier d’architecte : communiquant chaleureusement sa passion pour son métier et le plaisir d’être confronté chaque jour aux matériaux avec lesquels il doit construire, José Oubrerie a affirmé avec force que ce métier «consiste à s’accrocher à une réalité de l’architecture liée à celle de la construction».
Et il a conclu son propos en affirmant tout le bonheur que lui apporte «la collaboration fantastique entre ingénieurs et architectes».


Fiche Technique d’achèvement de l'église Saint Pierre de Firminy-Vert

Maître d'ouvrage: Saint Etienne Métropole
Equipe d'architectes pour l'achèvement:
Architecte mandataire: José Oubrerie, architecte
Architectes d'opération: Yves Perret et Aline Duverger, architectes DPLG
Architecte chargé des dessins d'éxecution et modèles 3d: Romain Chazalon, architecte DPLG
Ingénieur structure pour la coque: André Accetta
Equipe d'architecte pour la rénovation des bétons existants:
Jean François Grange Chavanis, Architecte en chef des monuments historiques
Principales entreprises:
Maçonnerie: Chazelle, Jean Noël Chazelle, président, Aurélio Fernandez, Ingénieur et chef de projet chantier
Serrurerie: Blanchet, Jacques Blanchet, président, Yves Vernay, chef de projet chantier

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