Chargé par Jacques Chirac d'une mission sur la politique industrielle, le pdg de Saint-Gobain Jean-Louis Beffa a souligné la faiblesse de la France dans l'effort de recherche et développement (R et D) industriel.

«Cette faiblesse n'est pas liée à l'insuffisance de la R et D au sein de chaque entreprise : elle tient à la spécialisation industrielle excessive de notre pays dans des secteurs de faible technologie», a jugé M. Beffa. «La relance de l'innovation en France dépend donc tout autant de l'évolution de sa structure industrielle que du développement de l'effort de recherche dans chaque entreprise», a-t-il poursuivi. Selon lui, les instruments actuels de la politique industrielle -aide aux petites et moyennes entreprises, crédit d'impôt- «ne sont pas en mesure de provoquer une réorientation de l'industrie vers les hautes technologies».

La mise en place de l'Agence de l'innovation permettra une forte coordination entre les entreprises et la recherche publique ainsi qu'une aide de l'Etat aux entreprises pour leur faciliter la prise de risques. «Nos propositions se situent dans le cadre de la politique réglementée par l'Union européenne», s'est empressé d'ajouter le pdg de Saint-Gobain. «La France fera des programmes de recherche et développement qui s'arrêteront là où les aides publiques doivent s'arrêter».
Financée par une partie des recettes de privatisations à hauteur de 2 milliards d'euros d'ici à 2007, l'Agence soutiendra des projets tels que la voiture propre, les usines non polluantes en CO2, les réseaux à très haut débit sécurisés ou de nouveaux traitements contre les maladies neurodégénératives. «Les entreprises européennes pourront également déposer leur candidature», a assuré le Jean-Louis Beffa, qui a regretté que l'initiative d'une telle agence d'innovation n'ait pas été proposée par Bruxelles.
Autour du projet, le groupe de travail rassemble les économistes Patrick Artus, Robert Boyer et Lionel Fontagne, les syndicalistes Gaby Bonnand (CFDT) et Jean-Christophe Le Duigou (CGT), et des chefs d'entreprise : le pdg de Thales Denis Ranque, le pdg de Biomérieux Alain Mérieux, le président du directoire de la Sagem Grégoire Olivier, le président du conseil de surveillance de Thyssen Krupp Gehrard Cromme et le vice-président de la Fédération des industries électriques Pierre Gattaz.

Interrogé jeudi matin par France 2, le secrétaire général de la CGT, Bernard Thibault, s'est réjoui de constater que la nécessité d'une politique industrielle française refaisait surface dans le discours public, attendant désormais des projets concrets. La politique industrielle «était un des thèmes que la CGT avait développés au moment-même de l'installation de Jean-Pierre Raffarin comme premier ministre», mais «ce qui s'est passé depuis, c'est, à chaque fois, une justification d'impuissance de la majorité politique», a fait valoir M. Thibault. «Tant mieux si, enfin, la notion de politique industrielle en France est à l'ordre du jour», a poursuivi le secrétaire général de la CGT qui a toutefois ajouté : «au-delà des déclarations, il faut des actes plus précis pour être persuadé que nous allons effectivement changer de période en matière de politique industrielle».

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