BAILLEURS SOCIAUX. Budget 2020, revenu universel d'activité, remise en question du modèle de financement…la pile de dossiers de la rentrée s'allonge pour le secteur du logement social, après une année tumultueuse conclue par un accord sur la clause de revoyure.

Après un premier semestre tumultueux, entre négociation de la clause de revoyure et Grand débat, le congé estival sera bref pour les acteurs du logement social. Reçues le 23 juillet par le ministre du Logement Julien Denormandie, les fédérations HLM ont posé de nombreux points d'inquiétudes sur la table.

 

A l'aune des arbitrages budgétaires, "nous voulions nous assurer que toutes les dispositions relatives à la clause de revoyure seraient bien mises en œuvre", affirme à Batiactu la directrice générale de l'Union sociale pour l'habitat (USH) Marianne Louis, pour qui le ministre Denormandie s'est montré "plutôt serein".

 

Dans l'accord signé par les acteurs du mouvement HLM, Action Logement et la Caisse des dépôts, l'Etat consent une baisse de prélèvements à 950 millions d'euros, contre l'enveloppe de 1,5 milliard initialement imposée. Assortie d'un objectif de construction de 100.000 logements et 125.000 rénovations par an, la réduction de la note sera soutenue par l'ancien 1% Logement.

 

Détacher les aides au logement du revenu universel d'activité

 

Jusqu'en 2022, le groupe Action Logement versera 300 millions d'euros au Fonds national d'aide à la pierre (Fnap) via son Plan d'investissement volontaire doté de 9 milliards d'euros. Ce dernier est cependant mis à mal par le projet de loi finances pour 2020. Selon une information des Echos, l'Etat a l'intention de puiser 500 millions d'euros dans la trésorerie du groupe gouverné par le patronat et les syndicats. Une ponction qui n'aurait pas d'incidence sur les bailleurs sociaux, même si l'USH "sera vigilante, au vu de son attachement à la Participation des employeurs à l'effort de construction (Peec)", prévient sa directrice générale.

 

Marianne Louis Assises
Marianne Louis, directrice générale de l'USH aux Assises du Logement le 24 juin 2019. © Anouar Hendrixx / Contre-jour

 

A l'occasion des futurs débats sur les orientations budgétaires du pays pour l'année 2020, le mouvement HLM entend faire remonter des prescriptions connues, mais absentes de la clause de revoyure. APL Accession, Prêt à taux zéro sur les constructions neuves et TVA à 5,5% - "dans les villes situées au cœur des bassins miniers ou bénéficiaires du plan Action cœur de ville"- devraient alimenter des amendements.

 

Autre sujet sur lequel les bailleurs sociaux montent au créneau : le revenu universel d'activité (RUA). Le gouvernement prévoit de refondre les minima sociaux, la prime d'activité et les allocations logement dans une aide unique. Pour les fédérations et associations en faveur du logement abordable, les aides au logement n'ont pas leur place dans une telle fusion, car elles sont "associées à un droit", martèle Marianne Louis.

 

"On ne peut pas dire que les bailleurs soient dans l'immobilisme"

 

Le montant de la RUA pourrait être conditionné par la recherche active d'un emploi, "une forme de quasi-maltraitance" pour une grande partie des bénéficiaires de l'aide personnalisée au logement qui "sont des personnes salariées ou des personnes retraitées dont le parcours est finalement ignoré", juge la directrice générale de l'USH. Et de craindre que cette réforme du versement des aides sociales ne soit la première pierre d'une redéfinition du droit au logement et de son coût pour les ménages.

 

"Nous avons prévenu le ministre que nous étions très hostiles à cette réflexion qui circule, qui consisterait à dire que le loyer privé est désormais une référence, et que les locataires ou propriétaires d'un logement social seraient des privilégiés", fustige Marianne Louis qui craint que "le thermomètre objectif de la pauvreté" ne soit cassé.

 

"L'ambition d'une société ne peut pas être d'aligner tout le monde sur des taux d'effort de 35%, mais plutôt de s'attaquer à la régulation des prix du privé", ajoute-t-elle avant de conclure : "on voit globalement que l'Etat se désengage fondamentalement des aides au logement".

 

Pour l'heure, le gouvernement se penche sur les moyens d'accélérer la production et la rénovation de logements, pour tenter de calmer l'hémorragie de la demande. Un rapport a été demandé à l'Inspection générale des finances et le Conseil général de l'environnement et de développement durable visant à explorer les possibilités d'ouvrir le capital des bailleurs sociaux aux financements privés.

 

"Nous ne sommes pas fermés à la diversification des financements, mais on ne veut pas voir la financiarisation de ce qui relève de l'intérêt général", affirme Marianne Louis, citant les prêts de haut de bilan, les titres participatifs ou le démembrement qui permettent aux bailleurs de trouver de nouvelles pistes de financement. "On ne peut pas dire que les bailleurs soient dans l'immobilisme", conclut Marianne Louis pour qui le modèle français ne doit pas tomber dans la spéculation immobilière, à laquelle l'Allemagne ou la Grande-Bretagne ont déjà goûté.

 

 

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