Après la France en 2014, c'est à l'international qu'est désormais reconnu Mohed Altrad en tant qu'entrepreneur de l'année 2015. Retour sur le parcours atypique du dirigeant du groupe Altrad, spécialisé dans les échafaudages. Interview.
Ce 7 juin, Mohed Altrad a reçu le Prix Mondial de l'Entrepreneur de l'année 2015, décerné par le cabinet EY (ex-Ernst & Young). C'est la première fois qu'un Français est distingué et obtient le prix suprême, face à une soixantaine de concurrents venus du monde entier.
"Nous sommes très fiers qu'un lauréat français remporte, pour la première fois, le Prix mondial de l'entrepreneur de l'année. Je tiens à saluer le parcours exceptionnel de ce chef d'entreprise qui a su faire preuve de courage, de persévérance et d'audace au service e la création entrepreneuriale", a déclaré Jean-Pierre Letartre, président d'EY France, dans un communiqué.
Envie d'entreprendre
Car Mohed Altrad a bien un parcours atypique. Né dans une tribu nomade syrienne, Mohed n'a que très tard accès à l'école. Il en fait sa véritable planche de salut, et à force de travail, obtient son BAC et réussit à décrocher une bourse pour étudier la pétrochimie à Montpellier. Il complète sa formation à Paris, par un doctorat en informatique. Dès 1975, il entre chez Alcatel, puis chez Thomson où il acquiert une expérience en automatismes, informatique industrielle et téléphonie. En 1980, il rejoint une compagnie pétrolière à Abu Dhabi, mais c'est en 1984 qu'il décide de créer sa propre entreprise, et lance France Informatique Electronique et Télématique (FIET). Il la revend rapidement au groupe Matra, ce qui lui permet, dès 1985, d'acquérir un fabricant d'échafaudage en faillite, qui deviendra l'empire Altrad au fil des années.Renvoyer l'ascenseur
Mohed Altrad s'est dit "fier" de ce prix, ajoutant que pour lui un entrepreneur doit "certes être performant sur la durée, mais aussi s'inscrire dans la cité". Avant d'ajouter : "Un entrepreneur ne doit pas se transformer en robot qui fabrique de l'argent, il faut ajouter d'autres dimensions à l'économique (...). Il faut renvoyer l'ascenseur à la société", a-t-il insisté, citant son implication dans le club de rugby de Montpellier.Aujourd'hui, Altrad fabrique ses équipements dans 17 sites industriels, répartis sur 12 pays. Il dispose également une présence commerciale dans plus de 100 pays, anime 92 marques et compte plus d'un million de clients à travers le monde. En mars 2015, il a fait l'acquisition de 100% du groupe néerlandais Hertel, ce qui lui permet désormais de doubler de taille, pour atteindre plus d'1.8 Md€ de chiffre d'affaires avec un effectif de 17.000 salariés.
Mohed Altrad : Avant tout un message d'optimisme, de croyance en l'avenir. Dans un contexte terni par le chômage, la crise, la pauvreté… je pense qu'il y a toujours quelque chose de bon chez l'autre. La France ne représente que 20% de mon activité, et concerne surtout l'industrie et peu le bâtiment. Mais, je veux dire qu'il faut croire en ce que l'on fait. Il faut travailler, persévérer, pour affronter les périodes difficiles et les crises. Il faut avoir une stratégie, faire de la qualité. Vous savez, ce n'est pas Altrad qui a gagné, c'est la France !
M. A. : En effet, ou du moins ils n'ont pas encore réagi ! Je le répète, mon entreprise a servi de support, mais c'est le pays qui a été distingué par ce prix. Maintenant, si l'on me sollicite pour des conférences, débats et autres colloques, je le ferais avec plaisir.
M. A. : Une chose est sûre : je ne l'ai pas fait pour l'argent. Le club était en difficulté, et au regard de mon histoire personnelle, j'estime que c'est un simple renvoi d'ascenseur. Outre les valeurs d'un sport qui véhicule la générosité, le partage, le solidarité, c'est aussi une opération qui a rejailli sur mon entreprise puisque désormais le stade où joue le club porte le nom d'Altrad.