Le fournisseur de gaz et d'électricité Direct Energie, qui a procédé à ses premiers effacements électriques diffus à la fin du mois de janvier 2015, recommande une refonte du dispositif d'encouragement de cette pratique. Fabien Choné, son directeur général délégué, nous éclaire sur le principe "d'économie de capacité" que la société veut privilégier.
Direct Energie possède, depuis mai 2014, un agrément de RTE qui lui permet de procéder à des effacements électriques diffus. Environ 2.500 opérations ont été réalisées dans des foyers participant à l'expérimentation Modelec (soutenue par l'Ademe). En période de forte demande de courant électrique sur le réseau ("période de pointe"), le fournisseur modère la consommation de ses clients, particuliers, commerçants ou petites entreprises. "Nous agissons principalement sur le chauffage, la production d'eau chaude sanitaire et la climatisation qui peuvent être pilotés à distance", nous explique Fabien Choné, le directeur général délégué de Direct Energie. "Le gros électroménager comme les frigos, congélateurs, ou machines à laver, peut également être concerné". Hors de question évidemment, de couper l'approvisionnement électrique et de plonger dans le noir des habitations ou des commerces. "L'idée c'est d'adapter la consommation à la production électrique des énergies renouvelables intermittentes. Alors qu'auparavant, il fallait adapter la production à la demande…", nous précise-t-il.
Valoriser l'économie de capacité
Dans le cadre du tout nouveau mécanisme de valorisation de ces effacements diffus, une prime de 16 €/MWh économisé en heure pleine (et de 2 €/MWh en heure creuse) est allouée à l'opérateur des effacements. Mais Direct Energie estime que la méthode adoptée n'est pas la bonne : "La philosophie des effacements ne marche pas !", s'exclame Fabien Choné. "Depuis le départ, on se trompe, car on considère l'effacement comme une économie d'énergie, ce qui n'est pas le cas", poursuit-il. Car effectivement l'énergie est consommée mais à un autre moment, plus opportun, afin de ne pas solliciter davantage le réseau et les centrales de production. "Ce qu'il faut valoriser c'est l'économie de puissance, car l'électricité est non stockable. Au moment d'une pointe, il faut donc fournir l'intégralité de la demande", une situation qui induit des contraintes sur le système électrique. "L'effacement permet d'écrêter la courbe de charge et la demande de puissance, d'où une limitation du parc nécessaire pour y répondre. Et moins de centrales c'est avantageux pour la collectivité", fait valoir le directeur général délégué de Direct Energie.La société propose donc que cette économie de capacité soit rémunérée. "L'idée a été présentée à des parlementaires et au cabinet de la ministre. Le texte actuel, qui remonte à la loi Brottes, fait déjà l'objet d'un amendement actuellement discuté au Sénat. Même s'il est parti sur de mauvaises bases, il est difficile de faire table rase", nous confie Fabien Choné. "Nous demandons par exemple que les systèmes de pilotage des consommations à distance soient éligibles comme des dispositifs d'économie d'énergie et qu'ils soient utilisés pour l'effacement, afin de limiter les pics. Nous proposons que le prix de capacité soit garanti sur une période à déterminer", déclare-t-il. Le marché de capacité n'existe pas encore en France et, pour le spécialiste, rien n'indique encore qu'il enverra les bons signaux pour l'effacement.
Un potentiel d'effacement équivalent à plusieurs centrales nucléaires
Or, du fait de son profil inhabituel - la France disposant d'un parc de chauffages électriques équivalent à celui de tous les autres pays européens réunis - le potentiel d'économie d'effacement national est énorme : "Entre 10.000 et 15.000 MW, soit l'équivalent de 7 à 10 réacteurs nucléaires de type EPR. C'est colossal", assène le directeur général délégué de Direct Energie, qui indique également tout l'intérêt de développer des capacités de stockage qui seraient également gérées intelligemment.