Baisse de la construction, emploi, travail au noir, révision des prix, coût des matières premières, heures supplémentaires, projet du 0.15%... Autant de sujets brûlants qui nimpressionnent pas Didier Ridoret, qui sera élu Président de la Fédération française du Bâtiment, dans quelques heures. Rencontre avec un homme adepte de «lexpérimentation».
Comment réagissez-vous à lannonce, ces derniers jours, des conjonctures pessimistes sur le marché de la construction ou encore de la chute des ventes de logements ?
La sérénité ! Cest la position que nous voulons adopter. Effectivement, je confirme que les chiffres nont pas été extraordinaires ces dernières semaines. En ce qui concerne les ventes de logements, je crois que les promoteurs ont été très prudents et sages car ils ont, à ce jour, peu de stocks de logements finis. En fait, le problème actuel du logement concerne plutôt des logements dont le chantier va démarrer ou qui sont en cours de construction. Quant aux mises en chantier, je crois quil faut rester serein et ne pas saffoler aux premiers mauvais chiffres qui tombent. Il faut voir comment évoluera le sujet au cours des prochaines semaines. De plus, il plane un doute sur la fiabilité des chiffres qui nous sont communiqués. Les spécialistes aujourdhui nous disent que les chiffres publiés ne sont pas à limage de la réalité. Donc tout concourt à la plus grande prudence. Toutefois, que lon assiste à une stagnation, une pause ou un atterrissage en douceur, cest un fait. Au sortir dune très belle activité ces deux dernières années, on imagine que ça ne va pas chuter brutalement du jour au lendemain. Et noubliez pas que suite aux dernières élections municipales, le paysage de la construction risque de connaître quelques mouvements, notamment au niveau de la commande publique. Enfin, tant que les problèmes de banques mondiales ne seront pas purgés, lactivité sera ébranlée.
Mais y a-t-il des inquiétudes au sein de la profession ?
Non, pourquoi voulez-vous quil y en ait ? Nos entreprises ont du travail car les carnets de commandes ont été bons précédemment. Il y a effectivement une pause dans ces prises de commande. Si, dans les mois à venir, elles continuent de baisser dans les mêmes proportions, jaurais un discours un peu moins optimiste. Je ne fais pas la politique de lautruche, mais on ne court pas à la catastrophe. Arrêtons de faire peur !
Les prévisions demploi ne sont pas au beau fixe non plus
De toute manière, notre métier est en tension depuis longtemps. Bien évidemment, le recrutement suivra lactivité. Le phénomène lié au baby-boom se fait sentir, et lon assiste désormais à de nombreux départs. Donc le besoin est là.
Mais est-ce toujours aussi difficile dembaucher dans la profession ?
Oui, mais cest aussi valable dans dautres secteurs. Il est vrai que cela reste une préoccupation, et nous continuons de diffuser le message : nos métiers sont en recherche. On ne baisse donc pas la garde à ce niveau-là.
La communication vers la féminisation du métier a-t-elle porté ses fruits ?
Oui, cest dailleurs une initiative de mon prédécesseur, Christian Baffy. Lobjectif est de 30.000 femmes dans le Bâtiment à fin 2009. Les séduire, cest bien, mais il faut quelles restent et cela passe par des conditions et un cadre de travail plus adaptés : mécanisation, propreté des chantiers, allègement des charges à porter Il y a encore des métiers exclusivement masculins, mais il faut continuer à faire en sorte que le Bâtiment soit un secteur attirant pour elles.
Restons dans le secteur de lemploi Quid du travail au noir ?
Aujourdhui, on ne connaît pas son importance, on le subodore. La Fédération est bien sûr sensibilisée, et nous sommes dans une démarche légaliste. Notre combat a porté principalement sur deux axes : la TVA à 5.5%, qui a marqué un coup darrêt au travail au noir ; le partenariat avec les caisses de congés pays et la délivrance dune carte didentification professionnelle à porter en permanence sur le chantier. Reste le problème des travailleurs intérim et des artisans qui travaillent seuls
Avec le nouveau gouvernement, a été mise en place la loi sur les heures supplémentaires. Est-ce un dossier délicat à gérer au sein de la FFB ?
Essayons dêtre simple et clair. Aujourdhui, la profession du Bâtiment a un accord de branche calé sur 180 heures à 25%. Notre objectif est dobtenir un accord de branche supérieur en termes de volume dheures. Cela permettrait à nos salariés et aux entreprises de bénéficier, à volonté, de plus de travail. Aujourdhui, que ce soit au niveau du gouvernement ou du syndicat, nous sommes dans cette posture de demander davantage.
Est-ce en cours dacheminement ?
Cest une jolie formulation On y travaille, mais sengager sur une date est prématuré ! Le système, fait pour les salariés, est une réelle avancée. Bien sûr, les salariés sont demandeurs, sous réserve que lentreprise en ait les besoins. Et sur ce sujet, nos chefs dentreprises saccordent à dire quil faut aller vers une augmentation de ces 180 heures.
On parle beaucoup de pouvoir dachat, mais, en amont, reste aussi le problème du coût des matières premières
A ce sujet, nous rencontrons ce jour (11/06) le directeur de cabinet de Christine Lagarde pour lui faire part de nos inquiétudes sur la hausse continue des matières premières. Nous y allons bien sûr avec la FNTP, suite aux engagements pris en commun sur la révision des prix des marchés. Mais notre inquiétude qui reste toujours la même cest que nous avons un Etat français qui financièrement ne peut pas assurer. Non seulement les caisses sont vides, comme vous dites, mais il y a, en plus, un énorme découvert.
Quid du dossier des 35 heures ? Est-ce encore un souci dans la profession ?
Je crois que la pire des conséquences a été damener un état desprit, notamment sur lidée que le travail pouvait se partager. Intellectuellement, je ne renie pas lexpérience. Mais dans toute expérimentation, je pense quil faut savoir arrêter lorsque ça ne fonctionne pas.
Débat dactualité et houleux sil en est, le projet sur le «0.15»
Cest invraisemblable quun seul syndicat empoche largent des artisans ! Cest scandaleux ! Si jétais un artisan, je déchirerai de suite ma carte d'adhérent ! (rires) Nous ne nous gênerons pas pour communiquer sur les dérives de laffaire.
Vous prenez vos fonctions de Président de la FFB ce jour, quels seront vos chantiers prioritaires ?
Le premier sera, comme on le disait en début dinterview, lobservation et la surveillance du niveau du marché. On espère quil sera maintenu, voire augmenté par le Grenelle de lenvironnement qui se met en place. Dans notre profession, cest un sujet aux enjeux très importants. Nous accompagnerons nos adhérents dans lappropriation, lappréhension et la maîtrise de ce marché. Dautre part, le plan du ministre du Logement quant aux 500.000 logements en 2009 est un dossier important. Par rapport à tout cela, cest la sauvegarde des marges pour les entreprises que lon doit assurer. Travailler, cest bien ; gagner de largent, cest mieux voire indispensable ! Il faut donc que les entreprises fassent des efforts en termes de compression des frais généraux et veillent vis-à-vis de leurs clients à obtenir une révision des prix.
Y a-t-il des changements au sein de léquipe que vous dirigerez ?
Oui, il y a une nouveauté. Il sagit de larrivée dans mon équipe de deux élus à des postes qui nexistaient pas auparavant : lun sera en charge du dossier «Chantier» ; un autre sera dédié à tout ce qui touche aux énergies renouvelables, au développement durable et aux performances énergétiques des bâtiments et des déchets. Cest un signal fort envers nos adhérents à qui lon veut dire notre sensibilité et notre préoccupation sur ces questions.
Comment voyez-vous lavenir du Bâtiment ?
Rose ! Nous avons une très belle branche, qui a toujours été une branche motrice dans lactivité de notre pays. Et aujourdhui plus quhier. Je crois, en revanche, quil faut accroître la qualité de notre personnel dencadrement. Ce sera une de mes tâches : que le Bâtiment séduise le plus possible des jeunes avec des têtes bien faites ! Avec un personnel mieux formé et de meilleure qualité, la rentabilité des entreprises augmentera car en moyenne, les rentabilités sont faibles - et du coup nos coûts pourront être réduits. Tout le monde sera gagnant !
La sérénité ! Cest la position que nous voulons adopter. Effectivement, je confirme que les chiffres nont pas été extraordinaires ces dernières semaines. En ce qui concerne les ventes de logements, je crois que les promoteurs ont été très prudents et sages car ils ont, à ce jour, peu de stocks de logements finis. En fait, le problème actuel du logement concerne plutôt des logements dont le chantier va démarrer ou qui sont en cours de construction. Quant aux mises en chantier, je crois quil faut rester serein et ne pas saffoler aux premiers mauvais chiffres qui tombent. Il faut voir comment évoluera le sujet au cours des prochaines semaines. De plus, il plane un doute sur la fiabilité des chiffres qui nous sont communiqués. Les spécialistes aujourdhui nous disent que les chiffres publiés ne sont pas à limage de la réalité. Donc tout concourt à la plus grande prudence. Toutefois, que lon assiste à une stagnation, une pause ou un atterrissage en douceur, cest un fait. Au sortir dune très belle activité ces deux dernières années, on imagine que ça ne va pas chuter brutalement du jour au lendemain. Et noubliez pas que suite aux dernières élections municipales, le paysage de la construction risque de connaître quelques mouvements, notamment au niveau de la commande publique. Enfin, tant que les problèmes de banques mondiales ne seront pas purgés, lactivité sera ébranlée.
Mais y a-t-il des inquiétudes au sein de la profession ?
Non, pourquoi voulez-vous quil y en ait ? Nos entreprises ont du travail car les carnets de commandes ont été bons précédemment. Il y a effectivement une pause dans ces prises de commande. Si, dans les mois à venir, elles continuent de baisser dans les mêmes proportions, jaurais un discours un peu moins optimiste. Je ne fais pas la politique de lautruche, mais on ne court pas à la catastrophe. Arrêtons de faire peur !
Les prévisions demploi ne sont pas au beau fixe non plus
De toute manière, notre métier est en tension depuis longtemps. Bien évidemment, le recrutement suivra lactivité. Le phénomène lié au baby-boom se fait sentir, et lon assiste désormais à de nombreux départs. Donc le besoin est là.
Mais est-ce toujours aussi difficile dembaucher dans la profession ?
Oui, mais cest aussi valable dans dautres secteurs. Il est vrai que cela reste une préoccupation, et nous continuons de diffuser le message : nos métiers sont en recherche. On ne baisse donc pas la garde à ce niveau-là.
La communication vers la féminisation du métier a-t-elle porté ses fruits ?
Oui, cest dailleurs une initiative de mon prédécesseur, Christian Baffy. Lobjectif est de 30.000 femmes dans le Bâtiment à fin 2009. Les séduire, cest bien, mais il faut quelles restent et cela passe par des conditions et un cadre de travail plus adaptés : mécanisation, propreté des chantiers, allègement des charges à porter Il y a encore des métiers exclusivement masculins, mais il faut continuer à faire en sorte que le Bâtiment soit un secteur attirant pour elles.
Restons dans le secteur de lemploi Quid du travail au noir ?
Aujourdhui, on ne connaît pas son importance, on le subodore. La Fédération est bien sûr sensibilisée, et nous sommes dans une démarche légaliste. Notre combat a porté principalement sur deux axes : la TVA à 5.5%, qui a marqué un coup darrêt au travail au noir ; le partenariat avec les caisses de congés pays et la délivrance dune carte didentification professionnelle à porter en permanence sur le chantier. Reste le problème des travailleurs intérim et des artisans qui travaillent seuls
Avec le nouveau gouvernement, a été mise en place la loi sur les heures supplémentaires. Est-ce un dossier délicat à gérer au sein de la FFB ?
Essayons dêtre simple et clair. Aujourdhui, la profession du Bâtiment a un accord de branche calé sur 180 heures à 25%. Notre objectif est dobtenir un accord de branche supérieur en termes de volume dheures. Cela permettrait à nos salariés et aux entreprises de bénéficier, à volonté, de plus de travail. Aujourdhui, que ce soit au niveau du gouvernement ou du syndicat, nous sommes dans cette posture de demander davantage.
Est-ce en cours dacheminement ?
Cest une jolie formulation On y travaille, mais sengager sur une date est prématuré ! Le système, fait pour les salariés, est une réelle avancée. Bien sûr, les salariés sont demandeurs, sous réserve que lentreprise en ait les besoins. Et sur ce sujet, nos chefs dentreprises saccordent à dire quil faut aller vers une augmentation de ces 180 heures.
On parle beaucoup de pouvoir dachat, mais, en amont, reste aussi le problème du coût des matières premières
A ce sujet, nous rencontrons ce jour (11/06) le directeur de cabinet de Christine Lagarde pour lui faire part de nos inquiétudes sur la hausse continue des matières premières. Nous y allons bien sûr avec la FNTP, suite aux engagements pris en commun sur la révision des prix des marchés. Mais notre inquiétude qui reste toujours la même cest que nous avons un Etat français qui financièrement ne peut pas assurer. Non seulement les caisses sont vides, comme vous dites, mais il y a, en plus, un énorme découvert.
Quid du dossier des 35 heures ? Est-ce encore un souci dans la profession ?
Je crois que la pire des conséquences a été damener un état desprit, notamment sur lidée que le travail pouvait se partager. Intellectuellement, je ne renie pas lexpérience. Mais dans toute expérimentation, je pense quil faut savoir arrêter lorsque ça ne fonctionne pas.
Débat dactualité et houleux sil en est, le projet sur le «0.15»
Cest invraisemblable quun seul syndicat empoche largent des artisans ! Cest scandaleux ! Si jétais un artisan, je déchirerai de suite ma carte d'adhérent ! (rires) Nous ne nous gênerons pas pour communiquer sur les dérives de laffaire.
Vous prenez vos fonctions de Président de la FFB ce jour, quels seront vos chantiers prioritaires ?
Le premier sera, comme on le disait en début dinterview, lobservation et la surveillance du niveau du marché. On espère quil sera maintenu, voire augmenté par le Grenelle de lenvironnement qui se met en place. Dans notre profession, cest un sujet aux enjeux très importants. Nous accompagnerons nos adhérents dans lappropriation, lappréhension et la maîtrise de ce marché. Dautre part, le plan du ministre du Logement quant aux 500.000 logements en 2009 est un dossier important. Par rapport à tout cela, cest la sauvegarde des marges pour les entreprises que lon doit assurer. Travailler, cest bien ; gagner de largent, cest mieux voire indispensable ! Il faut donc que les entreprises fassent des efforts en termes de compression des frais généraux et veillent vis-à-vis de leurs clients à obtenir une révision des prix.
Y a-t-il des changements au sein de léquipe que vous dirigerez ?
Oui, il y a une nouveauté. Il sagit de larrivée dans mon équipe de deux élus à des postes qui nexistaient pas auparavant : lun sera en charge du dossier «Chantier» ; un autre sera dédié à tout ce qui touche aux énergies renouvelables, au développement durable et aux performances énergétiques des bâtiments et des déchets. Cest un signal fort envers nos adhérents à qui lon veut dire notre sensibilité et notre préoccupation sur ces questions.
Comment voyez-vous lavenir du Bâtiment ?
Rose ! Nous avons une très belle branche, qui a toujours été une branche motrice dans lactivité de notre pays. Et aujourdhui plus quhier. Je crois, en revanche, quil faut accroître la qualité de notre personnel dencadrement. Ce sera une de mes tâches : que le Bâtiment séduise le plus possible des jeunes avec des têtes bien faites ! Avec un personnel mieux formé et de meilleure qualité, la rentabilité des entreprises augmentera car en moyenne, les rentabilités sont faibles - et du coup nos coûts pourront être réduits. Tout le monde sera gagnant !
A 56 ans, Didier Ridoret prend aujourdhui la tête de la Fédération française du Bâtiment. Il succède ainsi à Christian Baffy aux côtés de qui il assurait la vice-présidence de la FFB.
Diplômé de la Faculté de Panthéon-Sorbonne en maîtrise de gestion, Didier Ridoret a été président du Conseil national de la sous-traitance (CNSTB) FFB en 1999. De 1991 à 2002, il a pris les fonctions de conseiller auprès de la Banque de France et de 2000 à 2009, il est membre du bureau du Medef des Deux-Sèvres (79). Concernant ses actions syndicales et ses mandats, Didier Ridoret a été en 2002 président de la Commission des Affaires Sociales de la FFB et vice-président de la FFB. En 2006, il a été président de la Fédération Départementale des Deux-Sèvres.
Diplômé de la Faculté de Panthéon-Sorbonne en maîtrise de gestion, Didier Ridoret a été président du Conseil national de la sous-traitance (CNSTB) FFB en 1999. De 1991 à 2002, il a pris les fonctions de conseiller auprès de la Banque de France et de 2000 à 2009, il est membre du bureau du Medef des Deux-Sèvres (79). Concernant ses actions syndicales et ses mandats, Didier Ridoret a été en 2002 président de la Commission des Affaires Sociales de la FFB et vice-président de la FFB. En 2006, il a été président de la Fédération Départementale des Deux-Sèvres.