Les gaz de schiste, pourtant définitivement écartés par le Président de la République, continuent de faire débat : l'Académie des Sciences a proposé la création d'une autorité scientifique indépendante, afin d'encadrer la recherche sur les techniques d'exploration (et d'éventuelle exploitation), tandis que l'OPECST a remis son rapport sur les alternatives existant à la fracturation hydraulique. Les deux instances recommandent de ne pas ignorer cette source potentielle d'énergie.

Alors que la Pologne vient d'autoriser l'exploitation commerciale des réserves de gaz de schiste contenues dans son sous-sol (estimées entre 800 et 2.000 milliards de m3 soit de quoi couvrir les besoins actuels du pays pendant 150 ans), la France hésite encore à franchir le pas. Si le président de la République et le Premier ministre avaient écarté toute exploitation en France de ces "hydrocarbures non conventionnels", certaines voix se font entendre afin de ne pas totalement fermer la porte à cette énergie contenue dans le sous-sol français. Dans un avis publié le jeudi 21 novembre dernier, l'Académie des Sciences a notamment proposé la création d'une autorité scientifique indépendante et pluridisciplinaire, afin d'encadrer la recherche sur l'exploration - et l'éventuelle exploitation - des gaz de schiste. Les auteurs estiment que, "dans le contexte actuel de transition énergétique, la question (…) mérite d'être examinée". Ils recommandent même "le lancement d'un effort de recherche soutenu dans le domaine", afin d'évaluer les ressources et les méthodes d'extraction.

 

Fracturation par arc électrique, procédé thermique…
Hormis la méthode de la fracturation hydraulique, très décriée, d'autres méthodes existantes font l'objet d'un rapport, présenté ce 27 novembre, par l'Office parlementaire des choix scientifiques et techniques. Le document, présenté par Jean-Claude Lenoir (sénateur UMP de l'Orne) et Christian Bataille (député socialiste du Nord), recommande lui aussi d'estimer les réserves nationales, notamment dans le bassin parisien (huiles de roche-mère), dans le sud-est (gaz de roche-mère) et dans la région Lorraine-Pas-de-Calais (gaz de houille). S'ils suggèrent l'emploi de techniques "non invasives", en actualisant les connaissances grâce à la sismique, ils considèrent néanmoins que les forages d'exploration resteront nécessaires.

 

Un non ferme et définitif ?
Selon les rapporteurs, la fracturation hydraulique serait "une technique ancienne et maîtrisable", qui a déjà été employée en France et qui évoluerait encore de nos jours, de façon rapide. Les parlementaires évoquent des alternatives, comme la fracturation à l'aide d'un fluide sous pression autre que l'eau, ou la stimulation par d'autres procédés physiques comme la fracturation par arc électrique ou par réaction thermique. Pour Jean-Claude Lenoir et Christian Bataille, l'exploitation des gaz de schiste serait une opportunité qui se présenterait à la France et qu'il faudrait saisir. Avec l'avènement massif de cette énergie aux Etats-Unis, qui perturbe aujourd'hui l'ensemble de la production mondiale d'énergie, ils s'interrogent sur la possibilité de maintenir longtemps le statu quo décidé par le gouvernement et entériné par la décision du Conseil constitutionnel, le 11 octobre dernier, interdisant la fracturation hydraulique en France. Les pro-gaz de schiste mettent en avant la baisse potentielle du coût de l'énergie et la création de 100.000 emplois envisagée, tandis que les anti- craignent les risques de pollution et le recours à des produits nocifs.

 

Encadrement strict mais objectif
Concernant la surconsommation d'eau, l'Académie des Sciences précise, non sans humour, que les 15.000 m3 nécessaires à la réalisation d'un forage par fracturation hydraulique correspondent à deux mois de consommation d'un golf haut de gamme de 18 trous. Néanmoins, les académiciens pensent que "rien ne saurait être entrepris sans de nombreuses vérifications et expérimentations préalables encadrées par une réglementation rigoureuse, afin de maîtriser les risques potentiels pour l'environnement et pour la santé". Ils souhaitent que le débat entre les parties prenantes soit clair et honnête sur les avantages et inconvénients potentiels. L'exécutif reviendra-t-il sur sa décision ? On se souvient qu'Arnaud Montebourg, ministre du Redressement productif, avait appelé à confier l'exploitation des gaz de schiste français à une compagnie nationale publique qui emploierait une technologie respectueuse de l'environnement.

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