TRANSITION ENERGETIQUE. La Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), approuvée en 2016, doit prochainement être révisée afin de définir des trajectoires pour les cinq prochaines années. Jacques Archimbaud, le secrétaire général de la Commission nationale du débat public (CNDP) nous dévoile les enjeux de la consultation populaire qui se déroulera sur les prochains mois.
Batiactu : Pouvez-vous, tout d'abord, nous rappeler le rôle de la Commission nationale de débat public ?
Jacques Archimbaud : Elle a été mise en place au milieu des années 1990 par Michel Barnier, puis Dominique Voynet lui a conféré son statut d'autorité administrative indépendante, au même titre que le CSA par exemple. Puis le Grenelle de l'environnement a élargi son champ d'action et ses prérogatives. La commission était, à l'origine, tournée vers des projets d'infrastructures et équipements d'aménagement du territoire dont le budget était supérieur à 300 M€. Mais les ordonnances prises par Ségolène Royal font que ce sont tous les plans et programmes susceptibles d'avoir un impact environnemental qui sont soumis à une évaluation par des débats publics.
La CNDP a traversé les alternances et gouvernements et montré son utilité. Elle est plurielle dans sa composition avec des membres du tribunal administratif, des commissaires enquêteurs, des représentants d'associations, de syndicats… Pour chaque projet d'autoroute, de ligne à haute-tension, de stade, de voie navigable ou d'aéroport - comme Notre-Dame-des-Landes - elle organise entre 70 et 80 débats. Suite à quoi environ 1/3 des projets est poursuivi, 1/3 est remanié et 1/3 abandonné, sans que ce soit forcément lié à nos conclusions.
Jacques Archimbaud : Elle a été mise en place au milieu des années 1990 par Michel Barnier, puis Dominique Voynet lui a conféré son statut d'autorité administrative indépendante, au même titre que le CSA par exemple. Puis le Grenelle de l'environnement a élargi son champ d'action et ses prérogatives. La commission était, à l'origine, tournée vers des projets d'infrastructures et équipements d'aménagement du territoire dont le budget était supérieur à 300 M€. Mais les ordonnances prises par Ségolène Royal font que ce sont tous les plans et programmes susceptibles d'avoir un impact environnemental qui sont soumis à une évaluation par des débats publics.
La CNDP a traversé les alternances et gouvernements et montré son utilité. Elle est plurielle dans sa composition avec des membres du tribunal administratif, des commissaires enquêteurs, des représentants d'associations, de syndicats… Pour chaque projet d'autoroute, de ligne à haute-tension, de stade, de voie navigable ou d'aéroport - comme Notre-Dame-des-Landes - elle organise entre 70 et 80 débats. Suite à quoi environ 1/3 des projets est poursuivi, 1/3 est remanié et 1/3 abandonné, sans que ce soit forcément lié à nos conclusions.
Batiactu : Pour la Programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), ce n'est pas un seul projet mais plusieurs filières qui seront impactées, avec des dizaines de projets sur tout le territoire. Comment la CNDP va-t-elle procéder ?
Jacques Archimbaud : Un débat public est, d'ordinaire, d'un format un peu pauvre et réduit puisqu'il réunit généralement des hommes, de plus de 60 ans, fortement instruits, et compte peu de jeunes ou d'ouvriers. Notre but est de diversifier l'outil de consultation pour aller au contact de tous les publics : dans les gares, les hôpitaux, les stades… Cette démocratie locale ne doit pas mobiliser que les populations concernées ou les seuls riverains, mais doit mettre en mouvement tous les citoyens en général. D'où un débat national qui s'étalera entre le 15 mars et le 30 juin avec une cinquantaine de dates prévues sur tout le territoire. Bien sûr dans des grandes métropoles mais également dans des régions rurales ou des territoires industriels comme à Fos ou Gravelines. A partir de ces consultations, nous publierons un rapport résumant l'opinion de la population française sur la PPE, ainsi qu'une cartographie des arguments. Puis nous formulerons des propositions faisant évoluer cette programmation sur les points de dissensus qui risquent de générer des conflits. Le but sera de revoir la copie pour obtenir l'adhésion la plus large possible.
Batiactu : Quelles seront les options présentées aux citoyens ?
Jacques Archimbaud : La PPE est une question de politique générale, elle est donc multidimensionnelle et porte de grands enjeux. L'idée sera que le choix à faire pour chaque citoyen sera du même ordre que les décisions prises au plus haut niveau : il faudra réduire notre consommation de pétrole, développer davantage des solutions alternatives comme l'hydrogène ou la mobilité électrique… Sur l'habitat, il faudra inciter les citoyens à mettre moins de fioul et passer au gaz, au bois énergie, aux pompes à chaleur. Il sera également question d'isolation thermique. Les débats porteront donc sur la mobilité, sur la rénovation, sur l'économie circulaire. D'où une multiplicité des sujets et des options qui seront étudiées sous l'aspect de leur rentabilité économique et environnementale selon des usages spécifiques : logement, tertiaire… En partant de la demande d'énergie et des besoins on remontera ainsi à la production qui sera nécessaire et aux options à prendre. Ou à éviter, pour des raisons de risques ou d'impact contradictoire avec le but recherché. La solution choisie devra être sage et équilibrée, avec un mix énergétique qui correspond aux territoires et aux usages.
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Batiactu : Mais entre une option électrique et une option gazière, comment ferez-vous pour vous affranchir des lobbies ?
Jacques Archimbaud : La Réglementation environnementale 2020 sera-t-elle la revanche de l'électricité après une RT2012 favorable au gaz ? Les arbitrages à faire déboucheront sur des choix de politique publique cohérente sur la formation, les appels à projets, les soutiens et réglementations, l'information… S'affranchir des lobbies sera impossible mais les remettre à leur place, comme les autres participants du débat national, sera faire preuve de bon sens. L'opinion des consommateurs, qui ne sont pas tous des spécialistes, sera également écoutée pour parvenir à une décision équilibrée pour dimensionner correctement le parc de production. Nous remarquons d'ailleurs que même EDF et RTE ne sont déjà pas du même avis. Le tout sera de fournir des éléments de sensibilité, pas des expertises. Et ce qu'il ressort de concertations antérieures, c'est l'attachement des Français au gaz et au service public d'EDF. Ils sont en revanche agacés par des choix "tout ceci" ou "tout cela". Et tout emballement pour une solution devra s'appuyer sur des éléments tangibles, vérifiés.
Batiactu : Quelle sera la suite donnée au rapport de la CNDP ?
Jacques Archimbaud : Une réunion de clôture aura lieu à la toute fin du mois de juin au Conseil économique, social et environnemental (CESE). Le rapport final sera rendu deux mois plus tard, faisant une synthèse des options à prendre ou éviter. Il sera remis au Premier ministre dans une première version au cours de l'été, puis retravaillé avec les apports d'un groupe d'experts indépendants et un avis du Conseil national de la transition écologique (CNTE) afin d'aboutir à une version définitive à la fin de 2018. Le gouvernement entendra - ou pas - les conclusions de ce débat national, mais ce sera de sa responsabilité.