L'architecte marseillaise Corinne Vezzoni, interrogée sur la radio France info, a proposé une solution radicale pour repenser la manière de construire : rendre l'ensemble du territoire français inconstructible. Paradoxal, pour une architecte ? Pas tant que cela. Explications.
Corinne Vezzoni serait-elle une architecte qui ne souhaite plus construire ? Elle a en effet affirmé, dans le cadre de l'émission de France info intitulée "Moi président", qu'elle souhaitait rendre l'ensemble du territoire français inconstructible. Certains répondront que l'architecte, marseillaise, est peut-être portée à l'exagération, mais ce n'est pas le cas. Elle explique les raisons de cette proposition qui ne manque pas d'étonner, venant d'un membre de sa profession.
Pour elle, l'architecte ne doit pas avoir pour seul objectif de construire à tous prix. "Son métier, c'est aussi de penser à la beauté des choses, faire en sorte que les gens vivent d'une meilleure façon", avance-t-elle. "Nous avons terriblement abîmé notre territoire, nous avons consommé des terres à outrance, terres agricoles, forets, espaces naturels..." Selon l'architecte, il faut changer son regard de manière à ne plus considérer tout espace comme potentiellement constructible. "Il faut se demander s'il n'y a pas d'autres solutions de s'installer sur le territoire." Dans l'esprit de celle qui a récemment obtenu la légion d'honneur, il faudrait ne rendre constructible un terrain qu'en cas de dernier recours.
Eviter les "marées de bagnoles"
Il faudrait aussi davantage mettre la priorité sur la qualité de vie des gens qui habiteront les logements construits. "C'est naturel de construire des logements, mais est-ce naturel de les édifier loin des villes, dans des zones pavillonnaires mono-activité ?", s'interroge-t-elle. Comme alternative, elle propose donc de réinvestir les entrées de villes "moches" et les zones commerciales et industrielles. "Au dessus de ces zones commerciales, on peut construire des bureaux et des logements en superposant, plutôt que de s'étaler à plat et d'avoir des marées de bagnoles", estime-t-elle.
Pour l'architecte qui a participé à la conception du Mucem de Marseille, qui sont les responsables de cette défiguration de certaines entrées de ville ? D'une part, les politiques, qui ont cherché à rentabiliser au plus vite des terrains. Mais aussi, des architectes. "A un moment donné, certains d'entre eux, pour des raisons qui leur appartiennent, ont accepté de construire ces zones commerciales. Chacun prend ses responsabilités. Mais ce n'est pas pour cela que l'on doit cautionner cette démarche. A présent, nous devons rattraper les erreurs du passé, en reconstruisant la ville sur la ville, et en tirant parti de tous les vides qui existent dans ces périphéries."